Chapitre 2

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Quand Alexander se réveilla le lendemain matin, il eut une impression bizarre. Il ouvrit ses paupières et jura de surprise. Debout, près de la fenêtre, Stefaniel le fixait, totalement immobile.

—T'aurais-je surpris ?

Le jeune homme tenta de calmer son cœur qui battait la chamade.

—J'aurais plus dit «terrifié».

L'ange ne bougea pas, si bien qu'Alex se demanda s'il pouvait se transformer en statue.

—Au cours de la nuit, tu as fait six cauchemars, dont quatre différents.

Alex ne releva pas, tant cette information se révélait dérangeante. De plus, son désir de connaître la teneur de ses songes hantés était de l'ordre du néant.

—Je te donnerais accès à mon ordinateur pour que tu puisses t'occuper quand je dors. Je ne veux plus jamais me réveiller ainsi. Plus jamais.

Le céleste haussa les épaules et s'exila plus loin dans l'appartement. L'informaticien, quant à lui, s'évertua à calmer son rythme cardiaque avant de se lever. Une fois apaisé, il se prépara et s'accouda à son balcon, une cigarette à la main.

—N'es-tu pas censé prendre un petit-déjeuner complet et nutritif ?

—Les adultes n'ont aucune obligation de ce type.

—Je ne parle pas d'obligation mais de bon sens. Ta masse corporelle n'est pas suffisante, tu devrais donc penser à t'alimenter davantage.

Alexander se redressa, légèrement vexé. Il n'osa toutefois pas se montrer grossier, ayant bien trop peur de froisser un être céleste.

—Peu importe.

Il jeta son mégot dans le cendrier gisant sur la petite table en plastique. Ce dernier n'avait visiblement pas été vidé depuis des lustres.

Bien que le jeune homme souhaitait reculer au maximum le moment de sortir, il ne pouvait pas fuir éternellement. Sa copine étant vexée et n'ayant aucune envie de parler à des livreurs, comment allait-il se nourrir ? Excédé par sa déchéance, il enfila sa veste en cuir, y rangea ses clés et posa sa main droite sur la poignée. Celle-ci semblait bien plus froide que d'ordinaire. Il frissonna. Son grand-père lui avait souvent raconté que les portes de l'Enfer étaient gelées. S'il passait celle-ci, que lui arriverait-il ? Le Styx l'attendait-il derrière ? Perdrait-il la vie, noyé dans ses émotions ?

La main d'Alex, tremblante, se resserra sur la poignée. Des cris résonnèrent. Était-ce une hallucination ou les plaintes d'âmes tourmentées qui ne parvenaient pas à traverser le fleuve ? Des frissons parcoururent lentement sa colonne vertébrale. S'il sortait de son appartement, qu'allait-il advenir de lui ? Cette désagréable sensation de froid s'amplifierait-elle? Des hurlements surgirent des entrailles de sa mémoire. Dehors, la mort l'attendait probablement, prête à rectifier son tir raté. Ses membres se figèrent, prisonniers d'une terreur grandissante. Une unique larme, honteuse, roula alors sur sa joue, déjà creusée par la fatigue.

Perdu dans les méandres de son traumatisme, l'informaticien mit plusieurs minutes à sentir la main qui serrait légèrement son épaule gauche. Une douce chaleur semblait s'en échapper, le sauvant peu à peu de sa panique. Il se focalisa sur cette sensation rassurante, souhaitant plus que tout quitter l'Enfer. Après ce qu'il lui sembla une éternité, Alexander parvint à s'ancrer de nouveau dans la réalité, guidé par la voix de Stefaniel.

—Lâche la poignée Alexander.

Sa voix était douce. Le jeune homme parvint à obtempérer et fut guidé par le céleste sur le canapé.

Il a ditWhere stories live. Discover now