- Comment sais-tu qu'il habite ici ?

Alex hausse les épaules avec un sourire incertain en reprenant mon casque de mes mains.

- J'ai fait de mon mieux, c'est tout. Je me suis renseigné dès que Céline m'a envoyé son message. Nous avions trop peu de temps pour hésiter sur l'endroit où aller, non ?

Sa dernière phrase sibylline me laisse hésitante. Je hoche la tête et il me lance un sourire amer.

- Je ne t'attends pas, je suppose. N'hésite pas à me rappeler si tu as besoin de moi pour te ramener.

J'acquiesce d'un air coupable et il me lance un dernier sourire.
Un vrai cette fois. Aussi lumineux que ceux que je connaissais.
Pendant quelques secondes, je retrouve mon véritable Alex. Mais c'est Alex et ce n'est plus Alex. Il est trop blessé pour ne pas avoir changé, et désormais, il va s'en aller.

Mais avant qu'il ne parte, il faut que je lui dise. Que je sois honnête avec lui. Ou je le regretterai toute ma vie.

« Merci, Alex. Merci d'avoir toujours été là. Merci d'avoir toujours privilégié mon bonheur avant le tien. Je m'en veux, si tu savais comme je m'en veux. Je ne savais pas, je ne comprenais pas… Et crois-moi, j'aurais aimé t'aimer. Ca aurait été plus facile. On aurait été heureux. On aurait été amoureux. Mais ça marche pas comme ça, et j'en suis réellement désolée. Je ne sais pas comment te dire à quel point tu vas me manquer. Et je n'ai pas envie que tu partes. Parce que des personnes comme toi, on n'en rencontre qu'une seule dans sa vie. Alors merci, Alex. »

Il me barre les lèvres d'un doigt avant que j'aie pu dire quoique ce soit.
- Je t'aime, Joy. Je t'aimerai probablement toujours. Alors merci à toi, merci pour tout ce que tu m'as offert.

Il enlève son doigt de ma bouche mais je ne me sens pas capable de parler pour autant. D'un geste doux, il replace une de mes mèches de cheveux correctement et s'éloigne légèrement.

- Il a de la chance, souffle-t-il. Au revoir, Joy.

Ce sont ses derniers mots. Aussitôt après les avoir prononcés, il recule et remonte sur sa moto sans avoir même remis son casque. Je n'ai pas la force de l'arrêter ou de lui dire quoique ce soit. Je me contente de le regarder partir, le bruit du moteur ronronnant encore dans mes oreilles plusieurs minutes après qu'il ne soit parti.

***

Il me faut encore bien deux minutes pour me décider à sonner chez Nathan. Car j'avais beau ne pas me l'être avoué, j'étais terrifiée. Terrifiée à l'idée qu'il me rejette, qu'il me haïsse, ou pire encore : que ma présence l'indiffère. Ma vie avait été tellement bouleversée ces derniers jours que je n'avais pas réfléchi à ce qu'il se passerait si je parvenais à le retrouver. Et maintenant qu'il était temps de faire ce qui était juste, je mourrais de peur.

Mais une voix dans ma tête me revint. La voix de Nathan. Toujours là, même lorsque je me sentais plus seule que jamais.

« Tu ne dois pas avoir peur, Joy. Tu ne dois surtout pas avoir peur. »

Aussitôt, je sens une force lumineuse s'infiltrer en moi, qui puise sa source dans mes souvenirs.
Souvenirs heureux.
Avec Nathan.
Il ne m'a jamais vraiment abandonnée.

Ma main ne tremble pas lorsque je sonne à sa porte. Je me sens juste bien. La peur s'est envolée, pour ne laisser place qu'à une seule chose : l'amour. Lorsque mon coeur commence à s'affoler alors que j'entends des pas se rapprocher de la porte, il ne me faut que quelques instants pour le calmer.

Inspiration.
Je ne dois pas avoir peur.
Expiration.
Je n'ai jamais été seule.
Inspiration.
Je ne le perdrai pas.
Expiration.
Il sera toujours avec moi.

Déchirure -Relation prof-élève-Where stories live. Discover now