Elle veut un truc sympa, un verre de vin, une petite planche d'apéro. Elle ne sait pas où aller. En taxi, ils y seraient en cinq minutes chez Renkli. Lui s'y résout, toujours mieux que les arnaques du centre touristique. Les voitures défilent, Elle suit les phares, cherche un lumineux Taxi sur le toit, rien. Pas de taxi. Et Internet dit quoi ? Les tramways ne sont pas intégrés à l'application. Trente-cinq minutes à pied ? Trop loin. Il attrape le téléphone d'Elle, avec un soupir léger, bim bam boum, clique, clique, rechercher, là devant, tramway 9, cinq stations. Quinze minutes plus tard, les voilà chez Renkli.

Ça cause, ça fourmille, ça sourit, ça glouglougloute dans de grands verres pleins de pourpre, assiettes d'Antipasti sur les tables, lumière tamisée, musique d'ambiance, un peu rock urbain, c'est glamour, ni trop jeunes, ni trop vieux. À gauche, un serveur débordé derrière le bar où sont installées des filles lancées dans une discussion qui paraît passionnante. À droite, là, sur la table ronde, un type avec la barbe fournie travaille sur sa tablette, les lunettes rondes, col roulé, pantalon velours, la quarantaine passée, sûrement un éditeur, peut-être un auteur, venu à la Foire du Livre.

Ils avancent, scannent la salle, cherchent une place. Une fille surgit, avec le sourire naturel d'une reine qui s'ignore, elles les installent au fond, à côté de quatre grands garçons, leurs huit yeux s'attardent une poignée de secondes sur Elle, avant que Lui ne s'en amuse qu'à moitié, et leur réponde par un regard soutenu, la bouche semi-ouverte, à la manière d'un cow-boy, la main sur le revolver.

- Was möchten Sie trinken heute abend ? Rote oder Weiss. Leicht oder Stark.

- Qu'est-ce qu'elle a dit, j'entends pas ?

- Si nous voulions du rouge ou du vin, plutôt léger ou fruité ?

- Ils ont pas de carte ?

- Haben Sie eine Karte ?

- Leider nicht.

- Non, pas de carte.

- Un rouge, alors, plutôt léger ?

- Ein leichtes rotes Wein, bitte.

- Gerne.

La serveuse repart avec son grand sourire, sa peau blanche neige, ses grands yeux verts, disparaît dans la cuisine.

Lui s'avance vers Elle, et fait remarquer l'air amusé :

- C'est drôle. C'est la plus jolie des allemandes que je vois, depuis qu'on est là ? Elle a un truc, non ? Du charme, un côté glamour ? Non, tu trouves pas ?

- Elle doit pas être totalement Allemande.

- Tu penses ?

- Bah tu vois bien...

Elle baisse la voix.

- Elles sont un peu foutues comme des poteaux les Allemandes. En un bloc : épaules, bassin, hanches. Costaudes. Mais pas très sensuelles. Dans les vestiaires de la salle de gym, en tout cas, j'observe, bam un bloc, des hanches d'hommes, pas très larges, et elles ont des épaules, et comme les vêtements ne sont pas taillés pour elles, forcément ça ne valorise pas forcément le physique.

- Mouais...je suis pas convaincu de ta théorie...Tu penses pas que c'est parce qu'elles n'ont pas envie d'être sexy qu'elles ne le sont pas. J'ai l'impression qu'ils ont peur de la drague, de la séduction, du flirt.

- Oui, oui, oui, c'est ce qu'on se disait. Mais pour revenir à la serveuse, regarde les traits de son visage, ces grands yeux, c'est assez rare en Allemagne.

Elle et IlМесто, где живут истории. Откройте их для себя