La Meurtrière: Première Partie

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À la fin du cours je me dépêche de sortir mais le prof me retient.

-Elise... Je t'ai trouvée un peu distraite pendant ce cours et ça ne te ressemble pas... Quelque chose ne va pas?

Il faut que je sorte de la classe et que j'aille aux toilettes pour envoyer un message à Anissa. Je ne suis pas le genre d'élève à faire ces choses là mais c'est urgent!

-Non... Je bredouille, tout va bien monsieur, vraiment.

-Tu es sûre?

-Certaine! C'est juste que j'ai faim...

Je pose ma main sur mon ventre pour accentuer l'effet.

-Pourtant il n'est même pas onze heures!

-Oui mais vous savez, à l'adolescence, on a toujours faim!

Il se met à rire.

-Si tu veux, si tu veux! Bon, au revoir et revois ton cours!

-Promis! Au revoir!

Je me dépêche de marcher dans le couloir et dévale les escaliers. J'évite le mieux possible les obstacles que sont les élèves et me précipite vers les toilettes. Verrouillées! J'attends un peu et quelqu'un en sort. La personne me regarde bizarrement. 

-Quoi? J'ai un truc sur le visage?

Cette phrase un peu froide est sortie toute seule de ma bouche mais je ne m'en occupe pas et entre dans les toilettes avant de fermer à clé.

-Ok... Ok... Sms... 

Tiens? Un message d'Anissa! Enfin! Elle me dira peut être ce qu'elle fait!

Je lis le message mais il faut que je m'y reprenne plusieurs fois pour en comprendre le sens... et je m'effondre sur le sol.

Je ne sais pas quoi dire.

Je ne sais pas quoi faire.

Elise.

Je voudrais d'abord te remercier, te remercier d'avoir été celle que tu as été: une amie si parfaite. Tu es incroyable et j'espère que tout le monde en pense autant, je ne pourrais jamais exprimer combien tu as été importante dans ma vie...
Elise. Je voudrais aussi m'excuser. M'excuser de ce que je suis et de ce que je t'ai fait. C'est vrai, j'ai pu être désagréable et je m'en veux tellement... Dans ta bonté je sais que tu m'as déjà pardonnée et c'est une qualité exceptionnelle chez toi, cette empathie, ce sens du pardon. Punaise j'ai envie de pleurer, pas toi? Bref, je voudrais m'excuser de ce que tu as dû supporter. Je sais que je ne dois pas me haïr, tu m'as dit que j'étais géniale mais à ma manière et ça m'a beaucoup touché mais... Je n'y arrive pas. À m'aimer. Je n'y arrive juste pas.
Alors désolée pour mes sauts d'humeur, désolée pour mon absence parfois, désolée d'avoir voulu te retenir... 
Écoutes.
Si tu reçois ce message c'est que tu ne me verras plus jamais.
Tu dois être en cours là, ou pendant la récréation voire chez toi... J'ai pris soin de l'envoyer en même temps que l'heure d'histoire... Pour que... Je puisse réussir... Car je sais que tu... Tu aurais...
Elise.
Tu es géniale.
Tu es fantastique.
N'oublie jamais ça.
Une lettre est sur mon bureau, elle n'a pas de destinataire, je voudrais que tu la lise en premier. Elle te donnera la raison de mon acte.
Ne me demande pas où je me serai donné la mort, oui c'est ce qui va se passer. Je ne peux pas faire autrement. Je n'en peux plus, tu ne peux même pas imaginer à quel point j'ai mal.
Je sais que c'est définitif et que mes problèmes ne le sont pas, mais plus rien ne pourra m'en empêcher.
Tu étais mon dernier rempart, et le mal l'a brisé.
C'est grâce à toi si je ne l'ai pas fait avant, c'est grâce à toi que j'ai pu parfois retrouver le goût du bonheur.  C'est grâce à toi si ma vie a été quelque peu belle. Tu es une source de joie. 
Je suis profondément désolée.
Pourras tu me pardonner cette fois?

Anissa, celle qui te dois la vie.

J'ai pleuré.

J'ai pleuré d'avoir perdu ma meilleure amie.

J'ai pleuré de n'avoir pas pu l'en empêcher.

J'ai pleuré de panique et de désespoir.

J'ai pleuré car son message m'a beaucoup trop touché.

Mais j'ai surtout pleuré car je suis impuissante.

J'ai hurlé dans les toilettes et en suis sorties en trombes, téléphone à la main.

Les gens ont essayé de me retenir, je leur ai hurlé dessus.

Un surveillant m'a attrapé par le bras et je lui ai donné un gros coup de talon dans le tibia. Puis j'ai vociféré des propos incompréhensibles dans ses oreilles.
J'étais en transe quand je suis sortie du Lycée.

Je suis encore en transe, maintenant, devant la maison d'Anissa. Il ne pleut plus. La douleur au fond de moi n'a pas bougé, elle fait, au contraire, encore plus mal.

Je n'arrive pas à y croire... Tout ça n'est qu'un rêve, un putain de rêve!

Je baisse la poignée de la porte et constate avec surprise qu'elle est ouverte! C'est étrange, ses parents ne sont pas encore rentrés pourtant...

Mon cœur bat la chamade quand j'entre dans la maison.

Histoires comme ça...Where stories live. Discover now