Histoires comme ça...

La Fin du Monde I

 01/02/19

 Cher journal, c'est fini. 

Tout de suite après avoir entendu l'alerte, je suis partie en courant, prenant seulement mon journal et mon doudou préféré. Je sais c'est une honte, à quinze ans, d'avoir encore un doudou. Mais il me rassure, sans lui je serais sans doute morte de panique.

 J'ai quitté la maison en disant à ma famille que je les aimais, mais je ne voulais pas mourir ici, avec eux. Étouffée entre les cris et les pleurs.

  Puis je me suis mise à courir, ignorant les sirènes, la panique ambiante et les enfants perdus qui pleuraient. C'est la fin du monde. Ces dernières minutes seront miennes.

  Tout en écrivant ça, cher journal, je me suis mise à pleurer. C'est normal si quelques tâches sont apparues sur ta page blanche, ce sont mes larmes. Bref, je n'ai pas fini. 
  Je suis sûre que mon téléphone a sonné plus d'une fois, que les gens me cherchent mais n'essayez pas de me comprendre. Vous n'avez jamais réussis, ce n'est pas aujourd'hui que ça va marcher.

Voilà ce que je dirais aux gens, dans le monde des morts. "N'essayez pas de comprendre". 

  Je continue mon histoire. Après, je suis venue ici, dans cette forêt. Je veux mourir entre ces arbres, je les ai toujours aimés. Vont-ils être détruits, eux aussi, par la météorite? Excuse moi, cher journal, si ce n'est pas très bien écrit. Ma main tremble un peu...

  Prise par une angoisse soudaine, je me suis roulée en boule pendant quelques secondes. J'ai fermé les yeux, j'ai pensé à ma vie... Qu'est ce que j'ai fais? Rien! Je vais mourir comme ça, jeune, sans avoir rien accomplis! J'avais une vie devant moi, un destin... Quel destin? Celui de mourir? Et j'ai pensé à tous ces nouveau-nés qui voient à peine le jour... Des femmes sont elles en train d'accoucher dans les hôpitaux? Je suis heureuse de ne pas être à leur place.

   Il paraît qu'un météorite va s'écraser sur la Terre, en Russie précisément. Son impact va sûrement détruire notre planète et, si il ne le fait pas, la France ne sera pas épargnée. 
  J'ai rempli ma tête de questions et d'images pour de ne pas penser à ma famille, mes amis... Je pleure depuis tout à l'heure. En même temps, que faire d'autre?

 J'ai quinze ans, je vais mourir.

C'est dit.

 Je serre mon doudou, Caluche, contre moi. Ça me réconforte. D'ailleurs, je n'ai pas fini mon histoire! J'ai pas envie de raconter, ça ne sert à rien. Mais bon, autant finir. Je me suis cachée dans un trou, au fond de la forêt. Il n'y a pas beaucoup de lumière, je ne suis pas sûre d'écrire droit.

  Pourquoi j'écris en fait? Je pourrais, je sais pas moi... Ouais, que faire? C'est la fin, la Terre ne sera plus, tout ce que l'Homme à fait sera détruit... L'univers va nous montrer sa puissance. J'ai peur. Je suis terrifiée, j'ai une boule au ventre depuis tout à l'heure et tout mon corps tremble. Je ne veux pas mourir, vous entendez, JE NE VEUX PAS!!!

  J'ai crié ça, dans mon trou, le plus fort possible, d'une voix que je n'ai pas reconnue. J'ai la gorge sèche. 

  Je n'ai pas pu écrire pendant un bout de temps, j'imaginais l'explosion, quand la météorite va s'écraser... Je n'ai que ça dans la tête.

  "Alerte, alerte! Confinez vous, risque de destruction, une météorite va s'ecra..." J'ai les mots de la radio dans la tête, avant qu'elle soit coupée. Avant ma vie était normale, banale, la routine. Et là, pendant dix minutes j'ai l'impression d'en avoir plus fait que pendant quinze ans.

  Un cri. Je viens d'entendre un cri. J'ai peur. Je ne veux pas mourir, je tiens à la vie! J'ai trop de regrets, trop de choses à faire! Une crise d'angoisse m'emporte, j'ai du mal à écrir...

  Un bruit déchirant se fait entendre depuis quelques secondes. Seule, dans mon trou, je ne pense plus à rien sauf à ça. Je suis trop concentrée là dessus, je veux entendre toutes les nuances de l'arrivée de la mort. 

  Cher journal, je vais t'enfouir sous une couche de terre.

  Cher journal, j'ai peur.