15 ~ Portrait de femme

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Leur dernier rêve

Édition Finale Souvenirs de Plume(s)

Fanfiction Escaflowne écrite par Andromeda Hibiscus Mavros

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Rating / Classement [+18]

Livre 2

Numb
(« Paralysé », Chanson de Linkin Park, 2003)

Chapitre 15

Portrait de femme

Publié pour la première fois le 3 janvier 2012

Crédits : L'univers de The Vision Of Escaflowne est la propriété de Shoji Kawamori et du studio Sunrise, je ne fais que l'emprunter pour cette histoire.
Exception faite pour quelques personnages et lieux que j'ai créés pour l'occasion.

O~O~O~O~O~O

Le comportement anormal d'Hitomi fut immédiatement remarqué par les personnes présentes. Affolés, Van et Merle accoururent et tentèrent de la faire revenir à elle, en vain.
Elle était assise, la tête en arrière, les yeux grands ouverts sur ses pupilles dilatées laissant son regard vert sans vie. Son cœur battait normalement, mais elle était amorphe.

La jeune femme était là physiquement, mais son esprit était ailleurs. Ailleurs, dans un néant noir, avec Yiris :

— Qu'est-ce que je fais là ? Pourquoi vous me faites ça et, surtout, comment vous le pouvez ? interrogea Hitomi avec inquiétude.
— J'ai déjà montré un talent de médium, non ? s'amusa la générale. Quand vous avez voulu fouiller dans ma mémoire, il y a peu !
— Oui, mais... Je sens... Maintenant, c'est clair, vous n'êtes pas une humaine normale, c'est ça ?
— Effectivement, mais je ne suis pas tout à fait autre chose...
— Comment ça ?
— Vous êtes ici pour le comprendre, parce que, par votre intermédiaire, j'espère convaincre Sa Majesté de faire ouvrir le tombeau et de découvrir si Alexandre est Folken.
— Mais pourquoi vous agissez ainsi ?
— Je veux savoir si les morts peuvent vraiment ressusciter sur Gaea, autrement dit, si ce qui s'est appliqué à moi peut l'être à Alexandre... Je veux juste comprendre...
— Quoi ? Vous êtes morte ?
— Écoute mon récit, il répondra à tes questions !

Yiris tendit les bras à sa verticale, puis, les fit doucement descendre de chaque côté pour les poser sur ses hanches, découvrant derrière elle des images, ses souvenirs :

— Je me nomme Yiris Aryenxiapoulos, je suis née le 4 août 1969, à Thessaloniki, en Grèce. Mon père se nomme Philippos, il est professeur d'histoire en faculté, ma mère s'appelle Olga. Elle ne travaillait plus à l'époque de ma naissance, mais elle était aussi professeur à la base.
Avant que je ne naisse, mes parents ont eu des faux-jumeaux, Iris et Konstantinos, premier du nom, nés en le 6 novembre 1959, décédés le 7 juin 1966, renversés par un camion conduit par un chauffeur ivre. Ils étaient sur le trottoir, mon père, un peu en arrière, refaisait son lacet, il a vu le drame sans rien pouvoir y faire.
Suite à cela, ma mère a plongé dans une profonde dépression, gardant leurs chambres intactes et passant des heures à y prier. Au bout de deux ans, elle a commencé à se ressaisir, à envisager de retravailler, mais là, elle a eu la surprise de constater qu'elle était enceinte, de moi.
Malgré le désaccord de mon père, qui fit volontairement une erreur à l'état civil en rajoutant une lettre upsilon au début, ma mère m'a donné le nom de ma sœur défunte. Pour elle, j'étais sa deuxième chance, couvée, adorée, vénérée, un poids très lourd sur mes petites épaules.
Au bout d'un temps, voyant que j'étouffais, mon père lui suggéra d'avoir un quatrième enfant. Ce fut un garçon qui reçut lui aussi le baptême morbide, mais cette fois, sans erreur, car vérifié par notre mère, Konstantinos, né le 20 novembre 1975.
Dernier membre de notre famille, une surprise étant donné les quarante ans révolus de ma mère, Nikaia, née le 3 juillet 1980.
Mes relations avec mes parents n'étaient pas simples. Assez vite, je suis rentrée en conflit avec ma mère car je ne ressemblais pas à ma sœur, de physique et de caractère. Cependant, mon père était toujours là pour calmer le jeu. Konstantinos non plus ne ressemblait pas à notre aîné, mais il avait l'art de savoir plaire, par une attitude posée, et d'être un enfant plutôt posé et bon élève.
Moi, j'étais tout le contraire, j'étais agitée, j'étais infernale au collège, je cherchais toutes les façons de me faire remarquer. Ainsi, ma dernière dispute avec ma mère eut lieu à propos de ma robe à l'occasion du mariage d'une cousine. Des années auparavant, ma mère avait dessiné un modèle de robe de demoiselle d'honneur, parfaitement adapté pour les circonstances, pour ma sœur défunte, et souhaitait que je le porte. Son idée ne me plaisait pas, trop dentelé, avec des volants... Et surtout, même si je respectais la mémoire de cette Iris que je n'avais pas connue, je ne supportais pas qu'on veuille me confondre avec elle.
La veille de la fête, j'ai volontairement renversé du jus de fruit bien salissant sur le modèle qu'elle avait fait coudre, en signe de rébellion. Là encore, mon père intervint et souligna que c'était à moi de choisir ma robe. Mécontente, ma mère se résigna.
Cette bêtise d'adolescente m'offrit ma dernière vraie sortie. Trouver une robe toute prête à ma taille en si peu de temps n'a pas été facile, mais nous y parvinrent et j'ai pu être à mon goût pour les festivités.
Néanmoins, j'avais un autre souci, enfin à l'époque, ça en était un... Avec Konstantinos, ce 10 août 1982, nous voulions suivre un match de football de l'équipe d'Athènes, donc nous avions pris la radio à piles avec nous. La fête avait lieu dans le massif des Météores. Alors que nous essayons de suivre notre match depuis une crête rocheuse, un étrange éclair vertical est tombé du ciel.
Irrésistiblement, Konstantinos et moi avons été attirés vers lui, et nous sommes allés jusqu'à son point d'impact où nous avons trouvé une pierre rose dans un ruisseau.
Au contact de nos mains, elle s'est mise à briller. Une colonne de lumière s'est formée, nous emportant dans le ciel...

Yiris s'arrêta quelques instants, ce qu'elle allait raconter était le fardeau qu'elle portait et qui lui empoisonnait chaque jour.

Hitomi ressentit son profond mal-être et fit le choix de la laisser continuer :

— Nous avons atterri dans le Grand Lac de l'Ouest, près d'Irini. À notre grande surprise, ce sont des hommes-chats qui nous ont sauvés. Konstantinos et moi avons été adoptés par les habitants très gentils à notre égard, même si l'exil était difficile. Mon frère était encore petit et pleurait beaucoup. Pour l'apaiser, je lui ai promis de le ramener à la maison, même si je n'avais aucune idée de comment faire.
Nos journées étaient calmes et simples. Nous aidions les hommes-chats dans leurs tâches quotidiennes, comme la cueillette, on s'occupait des plus petits... Nous étions tristes d'être loin de chez nous, mais nous étions appréciés.

Observant la vision du passé, Hitomi remarqua une petite fille-chat aux cheveux roses qui gambadait près de Yiris et Konstantinos :

— Merle ?

Yiris acquiesça en opinant de la tête, puis reprit son récit :

— Un jour, le calme prit fin. Le village fut bombardé de flèches enflammées. La plupart des habitants s'enfuirent vers des grottes secrètes, mais la fuite était délicate dans les flammes et la fumée.
Alors que Konstantinos et moi étions en bonne voie pour échapper à l'incendie, nous avons vu Merle, écrasée sous les décombres en feu d'une maison qui s'était effondrée. Difficilement, nous avons réussi à la dégager, mais c'était trop tard, les braconniers entraient dans le village. Quelques habitants nous avaient parlé d'eux, il tuaient les hommes-animaux et vendaient leur fourrure à des collectionneurs fous.
Il fallait leur cacher Merle. Nous avons pensé au puits. Nous avons jeté Merle dedans avec un seau pour flotter, la suppliant de rester là sans faire de bruit.

À nouveau, la jeune femme eut besoin de faire une pause, elle contenait avec peine des larmes d'émotion :

— Pour nous, il était trop tard, les braconniers nous menaçaient déjà. Surpris de trouver des humains, ils nous laissèrent la vie sauve, mais nous emportèrent comme prisonniers.
Dans un camp situé un peu plus loin, nous avons été présentés à leur chef, un certain Dirken, un homme dont nous avons eu immédiatement peur. Voyant mon frère, il décida directement de l'enrôler dans son armée, comme page de soldat. Et là...

Temps d'hésitation, Yiris reprit son souffle, difficilement. Il lui fallait tout dire d'un trait, sous peine de ne pouvoir reprendre. Hitomi percevait sa détresse et avait peur de découvrir la vérité :

— Et là, je me suis interposée. J'ai hurlé que mon frère n'avait que sept ans, qu'il ne devait pas devenir un soldat. Amusé par ma rébellion, le chef me demanda mon âge, je lui répondis que j'allais bientôt avoir quatorze ans, ce qui lui arracha un sourire mesquin. Il me répondit que j'étais en âge de recevoir une « bonne leçon ».
Il partit vers une tente et ses hommes m'emmenèrent à sa suite, j'ai commencé à comprendre...
On m'a poussée dans sa tente, il était déjà en train d'enlever son armure. Torse nu, il s'avança devant moi et voulut m'embrasser de force, j'ai réussi à me dérober. Il essaya de me bloquer, je me suis débattue autant que je le pouvais...
Une fois de plus, il se pencha vers moi, et là, je tentais une dernière chance, un coup de tête qui l'étourdit autant qu'il me fit mal, mais ce ne fut pas suffisant pour m'échapper. Il m'attrapa, et me fit tomber sur le sol.
Alors, en me crachant des paroles salaces à l'oreille comme quoi il allait me mater, il remonta ma robe et me força à écarter les jambes. Il était trop fort, je n'arrivais pas à résister.
Soudain, j'entrevis qu'il lui restait un poignard dont le fourreau était accroché à sa hanche. Quelques secondes, j'arrêtais de me débattre pour m'en emparer, et sans trop y réfléchir, je lui ai planté la lame dans le flanc.
La douleur l'arrêta net. Il roula sur le côté, moi, je tentais de reprendre mes esprits. J'avais réussi à échapper au viol, mais je me doutais que je ne m'en tirerais pas comme ça.
Entendant ses cris, des soldats déboulèrent, m'attrapèrent et me mirent en joug avec leurs épées, Dirken les interrompit, voulant personnellement « me casser la gueule ».
Je ne sais combien de temps il m'a frappée. Les coups étaient d'une grande force, ses bagues me déchiraient la chair, ses coups de pieds me brisaient les côtes. Au terme de cette torture, je n'étais qu'une poupée molle sanguinolente.
En guise de dernier coup, me tenant par les cheveux, il décida de m'administrer une lacération sur le visage avec le poignard que j'avais utilisé sur lui. Me découpant lentement de la tempe, en passant par le nez pour atteindre la commissure des lèvres, il me creva l'œil droit.
Estimant qu'il s'était assez défoulé, il ordonna à ses hommes de me mettre dans un cachot d'un petit fortin voisin qu'ils avaient conquis, et de me laisser mourir là.

Soupirant, la générale marqua un temps d'arrêt supplémentaire pour se ressaisir. Aux tremblements nerveux succéda une étrange sérénité, reflet d'un certain fatalisme.
Hitomi suivait toujours le récit, muette. Elle ne pouvait cependant s'empêcher de penser qu'elle avait eu bien de la chance de rencontrer des gens corrects sur Gaea, chance que n'avait pas eu Yiris.

— La nuit était là, j'avais froid. Je m'étais recroquevillée pour garder le peu de chaleur que j'avais. Il y avait plein de sang autour de moi, mon ventre était gonflé et douloureux, je comprenais ce qui m'attendait, la mort. À ce stade, je voulais juste que ça soit rapide tant je souffrais.
Par le soupirail de mon cachot, je voyais le ciel, la Terre et la Lune qui brillaient. En les fixant, j'essayais de penser à des choses agréables mais je n'y arrivais pas. Je pensais à Konstantinos, que j'allais laisser seul avec ces fous, alors que je lui avais promis, à maintes reprises, que je le ramènerais à la maison, même si je ne savais pas comment.
C'est alors qu'une voix s'adressa à moi, grave, elle semblait venir d'un mur s'adressa à moi et se désola de l'état dans lequel j'avais été mise « Pauvre petite créature, personne ne devrait être traité ainsi. Dirken n'a donc fixé aucune limite à sa cruauté ? ».
J'avais beau observer dans la direction d'où provenaient ces paroles, je ne voyais personne. J'osais un « Qui êtes-vous ? ».
En guise de réponse, une silhouette humanoïde se détacha des pierres, émanant une odeur désagréable. Il s'agissait d'un individu à la peau violacé couverte de lignes colorées aux longs cheveux gris aux yeux d'un vert bizarre, drapé dans une cape noire.
Étendant son bras, il s'accrocha à un barreau de la fenêtre qu'il arracha sans difficulté. Puis, il me souleva et me fit passer la fenêtre, avant se faufiler ensuite, avec une invraisemblable facilité. Il continua de me porter jusqu'au bord du lac et, là, s'arrêta et me déposa délicatement.
Ensuite, il partit récupérer un sac, dissimulé dans un buisson, et en sortit une couverture dont il me recouvrit en me disant « Ton état est désespéré, les remèdes n'y feront rien. Tout ce que je peux faire, c'est t'aider à souffrir le moins possible ! ». Il me fit boire une petite potion et me garda dans ses bras et la douleur s'évapora. J'étais sereine, apaisée, j'allais mourir et je l'acceptais totalement.
Le soleil rougissait le ciel, mes dernières forces m'abandonnaient, je murmurais un « merci » à celui qui m'avait au moins permis de ne plus souffrir. Intrigué par mon calme face à ma fin imminente, calme uniquement troublé par quelques larmes, il me demanda « Tu pars donc sans regret ? ».
Je lui dis que non, que j'allais abandonner mon frère et que je n'avais aucun moyen de le protéger. Ma réponse sembla le toucher, il me demanda mon nom, je lui donnais.
Alors, il me posa une étrange question « Si on t'offrait la possibilité d'une autre vie, pourrais-tu t'engager à respecter l'aspect sacré de ce cadeau en jurant de ne jamais prendre la vie d'autrui ? ».
La demande était étonnante. J'eus du mal à répondre « Je considère déjà la vie comme sacrée, mais je pense aussi que personne ne peut préjuger de ce qu'il fera, néanmoins, on peut toujours faire de son mieux. Mais, de toute façon, on ne sauve pas les agonisants. ».
Il me sourit et répondit « J'aime ta franchise, même face à ta propre mort, tu es peut-être la personne que je cherchais ! ».
J'avais envie de comprendre, cela dit, mon dernier souffle s'envola tandis que je sentais pour la dernière fois les rayons du soleil se levant sur mon visage, faisant comme briller mes cheveux dont on disait qu'ils avaient la couleur des pétales de tournesol.

La suite, Yiris ne la commenta pas, les images parlaient pour elle. Une main sur la bouche, horrifiée, Hitomi assista à une scène de cauchemar.

Le fausse-personne vérifia l'absence de pouls de la blessée, puis entailla son propre poignet avec ses dents. Il déchira le haut de la robe, au niveau du cœur et y dessina un étrange symbole avec son sang, lorsqu'il apposa le dernier point, le corps tressauta. Il mit son bras ensanglanté au-dessus de la bouche de Yiris, quelques gouttes y tombèrent.
Et soudain, les yeux révulsés, celle-ci se redressa et se mit à boire compulsivement le liquide rouge. Il lui accorda plusieurs gorgées avant de la repousser.
Recroquevillée sur elle-même, l'adolescente convulsait de douleur.

Son regard terrorisé trahissait son incompréhension.

O~O

Pendant que Hitomi continuait son parcours dans les souvenirs de Yiris, Van, Merle et Meinmet étaient auprès d'elle. Tous étaient inquiets et ne savaient pas quoi faire.
Depuis près d'une heure, elle était assise sur une chaise, le regard hagard. Ayant appris son état, les serviteurs en discutaient dans le couloir.

Soudain, la troupe de curieux fut bousculée par Konstantinos qui déboula dans la Salle du Conseil. Son arrivée fracassante stupéfia les présents. Sans saluer personne, le jeune homme porta un regard blasé sur Hitomi, en transe :

— Je sens que c'est un coup de ma sœur !

Van ne répondit rien. Au contraire, il baissa les yeux.

— Allons, Votre Majesté, c'est de la magie de fausse-personne ! s'énerva l'homme aux dagues.

Ces paroles intriguèrent l'assemblée, seul Van n'était pas plus surpris que cela. Hésitant, Meinmet voulut prendre la défense de la générale et comprendre cette histoire :

— Qu'est-ce que tu racontes Konstantinos, tu es humain, non ? Ta sœur ne peut être une fausse-personne !
— En effet ! Quand je pense qu'elle passe son temps à rattraper tes conneries, tu n'as donc aucun respect ! renchérit Hylden, furieux.

Absolument indifférent aux propos des deux hommes, Konstantinos ricanait :

— Cela se voit que vous ne savez pas à qui tu faites confiance et encore moins avec qui tu couches ! C'est une grave erreur, n'est-ce pas, Votre Majesté ?

Mal à l'aise, Van abandonna quelques instants le chevet d'Hitomi et se releva.

Le secret de Yiris, il le connaissait, il avait promis de le garder, ce qu'il avait fait jusqu'à présent. Cependant, là, sa générale ayant elle-même brisé son serment d'allégeance, il n'était plus tenu de se taire :

— Effectivement, Yiris maîtrise la magie des fausses personnes...
— Quoi ? s'exclamèrent Meinmet et Hylden d'une seule voix.
— Yiris est une humaine normale à la base, mais elle a été ramenée à la vie par le pouvoir de Lig Viete, un grand maître fausse-personne, un des trois plus grands guerriers de Gaea. Elle possède une partie des capacités de ce peuple et, surtout utilise extrêmement bien utiliser leur magie. Je pense que l'état d'Hitomi peut effectivement être son œuvre.
— C'est impossible ! Yiris est humaine, tout ce qu'il y a de plus humaine ! s'indigna Hylden. Oui, sa force est peu commune, mais pas improbable non plus ! Et son aspect, il est normal !
— Tu oublies qu'elle peut faire des tours de fausse-personne ! expliqua Konstantinos. Elle se donne apparence humaine, c'est tout...
— Si elle pouvait vraiment modifier son apparence, elle ne voudrait pas être ainsi défigurée ! répliqua le jeune général.
— Pour une raison qu'elle ne comprend pas non plus, certaines de ses blessures sont impossibles à dissimuler, peut-être un des derniers restants d'humanité... soupira le garde du corps, indifférent.

Le vieux Prince écoutait les explications avec résignation. La vérité était atroce, mais évidente, inutile de se voiler la face. Le fait que Yiris soit en partie fausse-personne expliquait sa survie, son ascension...

Un point de doute subsistait :

— Pourquoi s'attaquerait-elle à Hitomi ? demanda-t-il.
— Sans doute dans son acharnement à chercher sa fameuse vérité ! répondit Konstantinos.
— Quelle vérité ? s'agaça Meinmet. Pourquoi ferait-elle du mal à Hitomi ? Elle sait que c'est une personne fragile, proche de Van. Bref, cela ne lui ressemble pas !

Le frère cadet ne savait pas trop comment expliquer sa pensée Quelque part, c'était peut-être le dernier point qui le rapprochait de sa sœur : trouver un sens à leur venue sur Gaea.

Aussi, ce fut Van qui répondit à sa place :

— Quand j'ai connu Yiris, j'ai tout de suite senti qu'elle avait de quelque chose de particulier. Je n'ai pas eu besoin de l'interroger plus que ça, elle m'a raconté spontanément son histoire.
Le fardeau qu'elle porte l'accable à un stade tellement étouffant qu'elle ne vit que pour y trouver un sens. Chaque indice, chaque événement, comme l'affaire de l'épée de mon frère défunt, qui pourrait l'aider dans sa quête, la fait réagir de façon extrême.
Je n'ai pas été assez lucide, il y avait un risque qu'elle aille trop loin dans l'affaire Alexandre... Et c'est Hitomi qui en subit les conséquences... Tout ceci est ma faute...

Il n'y avait rien à ajouter. Essayant de réconforter son maître, Merle lui caressait la joue. Elle aussi avait du mal à imaginer que Yiris, à laquelle elle devait la vie, en était arrivée là. Elle l'avait elle-même recommandée à Van quand elle avait reconnu sa sauveuse.

O~O

Dans les limbes de ses pensées, face à Hitomi bouleversée, la générale reprit la parole :

— Mon calvaire a duré trois jours de ce que je sais. Quand je me suis éveillée, j'étais épuisée. Cependant, j'ai constaté que, non seulement j'étais vivante, mais qu'en plus, une grande partie de mes blessures s'étaient refermées. Je voyais même à nouveau de l'œil droit, à travers une brume rouge.
Mon sauveur se présenta, il se nommait Lig Viete, c'était un épéiste fausse-personne très puissant. On disait d'ailleurs de lui qu'il était un des trois plus grands guerriers de Gaea.
Il m'expliqua qu'il était à la fin de son existence car pour se purifier, il avait renoncé à voler des vies et ses forces s'en ressentaient. Avant de mourir, il souhaitait enseigner l'art qu'il avait développé après avoir abandonné l'épée et je lui étais apparue comme l'élève idéale.
Alors, il me montra un bâton qu'il avait taillé et durcit en comblant les veines avec de la résine. Celui-ci était couvert d'inscriptions. Il m'expliqua qu'il s'agissait de formules protectrices. Il avait écrit une partie avec son sang et le reste avec le mien. Ce bâton serait mon arme, il m'apprendrait à m'en servir pour me battre, mais jamais pour tuer.
Je lui dis que je voulais aider mon frère, le sauver, il me répondit que je ne pourrais rien faire tant que je ne saurais pas me battre.
La résignation fut difficile. J'ai tenté de fuguer de nombreuses fois et, à chaque fois, Lig Viete me punissait en me cassant une jambe pour me forcer à rester avec lui. Même si les fractures guérissaient en quelques jours, je ressentais toute la douleur qu'elles causaient.
Finalement, à force de me voir m'acharner à fuir, il me brisa aussi les bras et me transporta pour m'éloigner de la région.
Pendant des années, j'ai suivi celui qui était devenu mon Maître. Pour vivre, nous exécutions de basse besogne, en particulier enterrer les morts des épidémies, et ce car nous ne pouvions être atteints par les miasmes humains. Le fait de côtoyer parfois des enfants renforçait ma conviction quant à l'aspect sacré de la vie.
Après de longues années d'errance, les pas de mon Maître nous ramenèrent au bord du Grand Lac de l'Ouest, là-même où il m'avait ramenée d'entre les morts.
Il m'apprit que son temps de vie était écoulé et qu'il était heureux d'avoir pu apprendre son art à quelqu'un. Il a prononcé une phrase que je n'oublierai jamais : « Mon histoire s'arrête ici, maintenant, c'est la tienne qui commence ! ».
Avant de rendre l'âme, il me fit part de ces dernières volontés. Il souhaitait que je l'exsangue, et que je récupère son sang, car il serait une chance de plus de me sauver en cas de blessure grave. Je devais promettre de ne jamais finir la bouteille, sous peine de perdre toute mon humanité, et de la confier à mon pire ennemi pour ne pas être tentée de m'en servir facilement... Étrange raisonnement...
Cette nuit-là, j'ai recueilli son dernier soupir. Puis je me suis livrée à la besogne qu'il m'avait confiée. Je l'ai suspendu par les pieds à une branche, et je l'ai égorgé, récupérant le sang dans une grosse bouteille.
Après avoir parachevé ce rituel morbide, ses restes se sont comme évaporés, il ne subsistait rien de lui... J'ai brûlé ses quelques effets personnels, et je suis partie accomplir ma volonté.

D'une voix timide, Hitomi osa l'interrompre :

— Et quelle volonté ?

O~O~O~O~O~O

Notes de l'auteur : Ce chapitre avait clairement pour but de montrer que, finalement, Hitomi a eu de la chance sur Gaea de tomber sur les bonnes personnes et d'être bien entourée.
Ici, Yiris est donc un miroir noir de ce qui lui est arrivé, avec du bon, du mauvais et surtout le fait de rester prisonnière de ce monde.


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Escaflowne, Leur dernier rêveWhere stories live. Discover now