Prologue

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    Les pieds dans le vide. Comme suspendue sur une corde. À quelques mètres du sol. Le ciel nocturne s'entendait à perte de vue de là où j'étais. La grande lanterne était son seul obstacle. Ce ciel rempli de milliers de scintillants petits points. D'ici, j'avais la ville à portée de main. Tel un égoïste souhait pour pouvoir aller n'importe où, pour prendre n'importe quoi.
Mais en effet, ce n'est qu'un souhait, qu'un rêve.
Une impression donnée par cette hauteur.
Du haut de l'immeuble, plus précisément du 10ème étage.

J'avais de la chance que notre vie nous permette de vivre dans cette modeste bâtisse située dans les hauteurs de Paris. "La ville lumière" : elle porte bien son nom. Pour sûr, en plus des étoiles, la ville était encore éclairée. On pouvait voir le sacré cœur, Notre Dame ou encore la tour de Montparnasse. Que des endroits remplis de touristes toute la journée. Bonne chance pour parvenir à y pénétrer. Les monuments de cette ville étaient devenus pourtant une banalité pour moi. Dans mes souvenirs, quand je suis arrivée petite ici, j'appelais cette grande tour aux vitres marrons : "la tour chocolat". Ridicule, n'est-ce pas ?

D'un coup, mon portable se mit à vibrer dans la poche de mon jean. J'attends un instant appréciant le titre de ma sonnerie "one for money". Rien de tel que du rock pour tenir une journée. Balançant mes pieds dans le vide, je me décide de sortir l'appareil afin de décrocher. Un prénom s'affichait sur l'écran du Samsung. Bien entendu, ma meilleure amie n'a pas trouvé mieux que de me déranger à deux heures du matin.

Faisant glisser mon doigt de gauche à droite puis, mettant le chorus, je lui réponds.

-Bien le bonsoir, chère Élisabeth. Que me vaut cette joie d'être dérangée par ton petit égo ? Tu n'a pas encore un de tes magnifiques partenaires qui ne te convient plus ?

Mon interlocutrice rigole au bout du fil.

-Bonsoir Louna ! Je vais bien merci. Et non je n'ai pas changé de petit ami c'est gentil de t'en soucier ! dit-elle sous un ton pessimiste.
Je voulais simplement parler à la meilleure bijoutière de l'université ne trouvant pas le sommeil, mais on dirait plus que je te dérange.

Je souris. Elle ne changera jamais et, heureusement. Elisa est la seule qui peut se permettre de réagir ainsi avec moi.

-En effet, tu n'a pas le droit. répliquais-je avec ironie.
Tu me sors de ma contemplation, vois-tu ? Et tu n'a pas encore descendu des bouteilles pour pas arriver à dormir ?

-Non non, rien de tel voyons, je sais que je suis une fêtarde mais aucune soirée en vue. Attends quoique...

J'entendis son portable se poser alors qu'elle faisait tourner les pages de son agenda.

Elle s'exclama :
-Ah si ! Vendredi prochain ! Le 29. Soirée chez Brad à 22 heures.
Pourquoi ne viendrais-tu pas cette fois ?

-Non merci, j'ai du travail. Pas le temps pour des futilités. Répondis-je sèchement.

-Allez, viens Louna ! Pour une fois, viens te détendre avec moi ! Fais plaisir à la belle blonde qui te sert de meilleure amie ! ~~

Elle parlait de sa voix toute mignonne. Prolongeant chaque fin de phrase pour tenter de me faire craquer.
Je finis par répondre après un long soupir.

-C'est entendu. Pour être honnête, un peu de repos ne me fera pas de mal. Et pour faire plaisir à la petite idiote blonde "qui me sert de meilleure amie".

Je l'entendais crier de joie et bouger sur son matelas lâchant une seconde fois le combiné.

-Merci! Je te promets qu'on va s'éclater ! Prépare ta robe, le thème est cliché mais faut venir masqué ! Tu trouveras peut-être ton Roméo !

Elle s'extasiait à cette pensée. Exaspérée, je lui crachais mes pensées. Elle savait certainement que depuis mon premier petit copain, je n'en veux plus. Cela cause simplement du mal et des problèmes.

-Je ne pourrai pas retomber amoureuse, Élisa. C'est simplement impossible. Tu sais combien de mal Chail m'a fait. Je n'ai pas besoin de cela avec tout le travail que j'ai déjà. J'ai des clients à satisfaire, tu le sais bien. Ma profession en plus de mes études me prend déjà toute ma vie sociale.

Elle eut un temps de silence puis s'exclama

-Écoute ! Arrête de dire cela et de vivre dans ton passé. C'est fini Louna, tu sais bien. Oui, tu n’as plus de vie sociale et je le vois très bien. Tu passes ton temps chez toi à confectionner des bijoux. Mais mes cheveux se sont hérissés et je le sens, tu vas trouver quelqu'un vendredi soir ! Mes cheveux ne me trompent jamais ! J'ai un pressentiment et j'en suis certaine.

Un silence s'installa. Ma blonde est forte pour deviner, c'est comme un sixième sens chez elle. Je savais que quand Élisa ressent quelque chose, il y a une majorité de chance pour que cela arrive.
Effectivement, elle a prédit plusieurs malheurs comme celui avec Chail. Ou encore lorsqu'un de mes grands clients m'avait lâchée en pleine grande commande de pièces en diamant. Cela avait fait beaucoup de mal à l'entreprise familiale.
Ma mère avait dû rembourser un sacré montant pour rembourser les pierres et avait dû nous priver de plusieurs mois de tissu et de matériaux. Ma daronne est couturière ; c'est la raison pour laquelle je travaille avec elle et pourquoi on vit dans un immeuble à Paris. Depuis des générations, notre famille sont des spécialistes de la haute couture et du luxe. Ma grand-mère, par exemple, confectionnait des coiffes à base d'élégantes et raffinées fleurs pour les plus grandes personnalités.
Pourtant, nous avons préféré rester dans le privé et non en faire une industrie.

-Hé ! Louna, je te parle ! s'énerva mon amie m'extirpant de mes pensés. Je m'excusai et lui demandai de répéter.
"Je disais que je pense que tu penses que j'ai tort. Oui, cette phrase n'est pas française, je sais. Mais ! Je t'assure que tu verras que j'ai encore une fois de plus raison. Tu te souviens sûrement que j'ai souvent juste. Regarde quand notre professeur de design n'était pas là étant tombé dans les escaliers, je le savais en avance."

On se mit à rire aux éclats à la pensée de ce magnifique souvenir. C'était une des premières fois que je rencontrais Élisabeth : lorsqu'on allait en cours, en passant devant la cage d'escalier, on vit notre professeur Mr Dasout se faire recaler par une professeur. De musique. Après cette déception amoureuse, il avait glissé dans les escaliers alors qu'il avait la tête baissée. Une belle glissade devant nos regards curieux et ébahis. Nous avions dû courir chercher l'infirmière avec encore le sourire aux lèvres après l'hilarité de cette scène.

-Bon allez, ma belle, je commence à m'endormir. Jeudi on ira se chercher une robe, j'en ai besoin pour renouveler ma garde-robe de soirée.

J'allais protester quand elle me coupa la parole nettement.

Hors de question que ce soit ta mère qui l'a fait ! Je respecte votre travail et ce n'est pas pour te vexer mais je préfère l'acheter en boutique. On ira dans les Galeries Lafayette, j'adore cet endroit !
D'accord, d'accord Lili, je passerais te chercher alors. On ira en métro comme ça, pas besoin de payer le parking des Galeries.

Elle acquiesça et finit par me souhaiter une bonne nuit avant de raccrocher.
Tirant une cigarette de mon paquet, je l'embrassai directement et la portai à ma bouche, regardant toujours le paysage nocturne.

    Il est tard et demain, on a cours, mais je ne m'en fais pas pour moi. Je sais que je n'ai pas besoin de sommeil. Tout cela grâce à l'insomnie, n'est-ce pas super ?
Après avoir consumé l'entièreté du petit cylindre toxique, je l'éteins dans le cendrier. Je me levais finalement stoppant la musique et rentrais à l'intérieur de l'immeuble.
Regardant une dernière fois en arrière afin d'observer le ciel. Celui-ci prenait une couleur rougeâtre. Un frisson me parcourut, cela devait être la fatigue qui me faisait halluciner après plusieurs semaines sans sommeil.
"Je vais devoir reprendre des somnifères, moi..."me disais-je en fermant la porte du toit.

α รµเѵɾε... 

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 31, 2019 ⏰

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