Héros, vilains. La frontière est beaucoup trop mince. Venant de quartiers démunis, le jeune délinquant Jiro Kyuban s'en rend vite compte et son dégoût pour la société ne cesse d'augmenter, jusqu'au jour où un héros borderline apparaît dans sa vie...
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Le soleil de dix heures tapait déjà sur la banlieue Est de Tokyo et la vie avait déjà repris son cours ainsi que sa folie urbaine. Plusieurs rues avaient été fermées pour travaux.
Jiro avait décidé de retourner sur les lieux où il avait vu Knuckle Duster pour la dernière fois. Sans son sweat gris qui avait été endommagé durant le combat de la veille et avec son tee-shirt de sport noir, il avait tout l'air d'un touriste sac sur le dos. Il avait un pansement sur la joue et des bandages posés à la vas-vite récupérés en express dans une pharmacie entouraient sa taille, dissimulés sous son haut.
Il aurait bien aimé voir comment allait son coéquipier d'un soir, mais il n'avait pas la moindre idée de l'hôpital dans lequel il avait été pris en charge. Il ne pouvait que constater les dégâts qu'avaient commis le héros et le vilain en se battant. Il serait probablement mort à l'heure actuelle si celui-ci n'était pas apparu miraculeusement. Ses blessures étaient graves, et fuir avait été difficile. Tomber lourdement depuis le haut du toit lui avait fait l'effet d'un bain de lames.
La nuit avait été torride et les douleurs étaient toujours vives. Il ne fallait surtout pas qu'il fasse des efforts inutiles. C'était trop risqué de voir un médecin, encore plus de consulter à l'hôpital. Vu dans l'état dans lequel il se trouvait, on ne l'aurait pas soigné sans réagir et sans que la police ne s'intéresse au sujet. Maintenant il fallait qu'il fasse profil bas, mais ce n'était pas une mince affaire.
En épiant l'avenue, il semblait évident que les effectifs de police et de héros en patrouille étaient très nombreux. Jiro détailla tour à tour ces nombreux hommes en uniformes et costumes présent dans la partie bouclée de la ville par d'innombrables banderoles jaunes « Keep out » . Cependant les policiers étaient tout aussi nombreux en dehors du périmètre de sécurité. La surveillance était maximale et le jeune homme savait pertinemment qu'ils l'avaient dans le collimateur. Ils avaient déjà de multiples raisons de l'arrêter sans qu'il ne pusse nier.
Jiro préféra ne pas rester plus longtemps et fit demi-tour, s'engouffrant dans la première ruelle venue. Les rayons de soleil qui filtraient au travers les immeubles éclairaient la poussière en suspend, dont des milliers de petits grains virevoltaient en scintillant parfois dans ces faisceaux lumineux, projetant au passage de nombreuses ombres aux formes variées sur les façades un peu périmées.
Le jeune délinquant monta tranquillement l'un des murs arrière d'un bâtiment, se servant de ses paumes et de son alter pour progresser sûrement. Il économisait le maximum de ses forces, ce n'était pas le moment de faire des extras. La population était déjà à fleure de peau, le moindre incident pouvait faire exploser toutes les forces de police du coin, sans compter les agences de héros. Un rien pouvait être la goutte d'eau faisant déborder le vase. Un rien, comme ce qui l'attendait en haut de la façade...
A peine Jiro mit-il un coude par-dessus la balustrade en fer qu'entrèrent dans son champ de vision trois loubards qui l'attendaient ici bien patiemment. Il capta tout de suite que leurs intentions étaient hostiles. L'un avait déjà activé son alter et des griffes sortaient de ses mains au niveau des premières phalanges.
- Le voilà le p'tit Runner ! Une rumeur disait que tu étais affaiblit. J'ai pas pu m'empêcher de sauter sur l'occasion. J'ai payé une blinde pour prendre le métro jusqu'ici ! Dit-il en brandissant un ridicule ticket orange. Tu te rappelles de moi connard ? Il y a plusieurs mois tu étais dans le sud de Tokyo et tu as massacré pas mal de mes potes. Je ne l'ai jamais digéré ! Je me suis entraîné comme un malade pour pouvoir t'égaler et maintenant c'est le jour de fête !
Soga était un peu plus grand que Jiro et devait avoir à peu près le même âge. Il était accompagné de deux mecs plutôt costauds et enveloppés. Jiro sauta sur la barrière et s'accroupit en face d'eux. Il serra les dents. Ce n'était pas le moment de se battre ! La douleur de son flanc ne faisait que croître. Il était beaucoup trop désavantagé et son adversaire était prêt à en découdre. Et il n'allait pas patienter bien sagement...
Sans prévenir Soga partit à l'assaut, poing brandit en avant et le jeune aux cheveux bleu foncé se retrouva à faire du corps à corps sans possibilité de fuite. Ses petits copains tentaient eux aussi de l'attaquer en s'en donnant à cœur joie.
D'un coup, l'un des poings des voyous s'abattit sur son flanc et Jiro poussa un gémissement. Il n'avait pas la possibilité d'avoir une bonne défense face à autant d'adversaires. Il recula d'un bond et s'accroupit au raz du sol, une main par terre et l'autre plaquée contre sa blessures de la veille. Ça n'avait pas raté, en retirant sa main elle était déjà rouge de sang et cela n'échappa pas au clébard qu'était Soga, qui riait aux éclats.
- Hahaha ! J'ai bien choisi mon jour alors !
Sans attendre, il redonna des coups à Runner, épines sorties des phalanges. Ce dernier esquivait comme il pouvait, mais son alter ne lui était absolument d'aucune utilité dans un combat. Il ne pouvait jouer qu'avec sa souplesse et son agilité pourtant bien diminuée et il n'était pas spécialement très musclé non plus. Il serrait les dents pour résister à la douleur, mais Urban ne s'était loupé la veille.
Après un échange de coups intenses, Jiro dû mettre genoux à terre, complètement épuisé face à ses adversaires aux sourires sadiques.
- Nah, c'est pas assez drôle. Repris le chef du groupe le sourire jusqu'aux oreilles. Je me demande quel est le meilleur moyen pour te détruire encore plus que tu ne l'es déjà, pauv' con !
- Attend, j'ai une idée Soga. Déclara l'un des deux autres en se dirigeant tranquillement vers le rebord de l'immeuble.
Jiro écarquilla les yeux, alarmé. Il était déjà trop tard quand il comprit ce que ce type voulait faire.
« Hey !! Il y a Runner juste ici ! Faites quelque chose !» Gueula-t-il à travers toute la rue.
Comme les immeubles n'étaient pas particulièrement haut, cela n'échappa pas à toutes les personnes les plus proches. Ils venaient de mettre en application la plus grosse crainte du jeune homme, c'était la goutte d'eau faisant déborder le vase. Il ne fallut que quelques secondes pour que les policiers du coin soient alertés et ils accoururent pour monter sur les hauteurs.
Le sang de Jiro se glaça, ils étaient beaucoup trop nombreux cette fois-ci. C'était bien pire que ce à quoi il était accoutumé. Il se leva au quart de tour sans perdre une seconde et parti en courant le plus vite possible, une main violemment cramponnée sur sa blessure ensanglantée.
Alors que les policiers avaient donné l'alerte et qu'ils arrivaient sur les toits, les trois voyous rirent aux éclats. Jiro s'en mordait les doigts, c'était bien la dernière chose qu'il fallait faire. Ils étaient trop nombreux. Il courrait à en perdre haleine en sautant de toit en toit et en franchissant les obstacles. Cependant il sentait que ses jambes ne répondaient pas entièrement aujourd'hui. Sa blessure rouverte était trop handicapante et il ne tarda pas à entendre des cris venant de partout. « Il est là! », « Arrête-toi! », « Tu ne t'échapperas pas bien longtemps! »
Jiro sauta sur un mur un peu trop loin et se prit le rebord dans le torse. Il remua les jambes aussitôt pour se relever et continuer sa fuite. En jetant un œil en arrière, sa respiration se coupa en voyant une bonne dizaine d'hommes qui le pourchassaient en empruntant des chemins différents. Son cœur battait la chamade. Il était terrifié et son souffle beaucoup trop court. L'adrénaline excessive faisait même disparaître la douleur.
Il sauta et s'agrippa à un rebord de fenêtre en glissant. Il utilisa aussitôt son alter pour se coller à la façade et remonter plus vite que jamais, avant de se laisser glisser par dessous des tuyaux d'aération. Il passait plusieurs obstacles en Thief Vault et Monkey Vault. Autour, c'était la panique. Il pouvait sentir dans l'air les policiers qui se rapprochaient, les sirènes dans les rues et une fois de plus, son chemin le dirigeait inexorablement vers le chantier en construction, un lieu difficile et instable. Dangereux...
