Prologue

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Clémence ouvrit brutalement les yeux pour se confronter à la glaçante obscurité.

Elle rejeta doucement l'édredon et passa ses jambes en dehors de la couverture pour entrer en contact avec le sol de la chambre. Elle ramena les tissus sur le haut du lit pour ne pas déranger son mari dans son sommeil qu'il avait la chance d'avoir profond. 

Sans prendre la peine d'allumer une lampe elle sortit de la chambre dans sa longue chemise de nuit, les cheveux défaits. Elle traversa le couloir où seul le bruit sourd et régulier de ses pas résonnait. Elle ne savait pas exactement se qu'elle allait faire en bas mais elle avait besoin de marcher, d'oublier ses rêves qui la taraudaient, la culpabilisaient. Elle la connaissait bien, la culpabilité, cette blessure qui rendait les miroirs si douloureux. Plus douloureux encore que la vue de sa blessure au plexus. Souvenir ineffaçable qu'elle avait sentit la mort dans ses entrailles... bien plus qu'une femme ne le devrait jamais. 

Alors Peter, à acheter le manoir des DeMortsan, loin de Paris. Face à un lac dans lequel la façade blanche se reflète, entouré d'arbres et de quelques hameaux. Loin de Paris.

Pourtant, depuis, elle se servait toujours de ses dons, sur des affaires de vol, de tromperie... Elle aidait mais restait pleine d'insatisfaction. Un virus aguerri qui ne se guérissait pas.

Ils avaient reçus la visite de la famille Jørgensen, durant un weekend. Bien qu'agréable désormais, la compagnie du norvégien ne cessait de tourmenter la jeune femme. Elle ne savait si l'affaire de la boulangerie l'avait traumatisée ou non, mais son souvenir éveillait en elle d'étranges sentiments. Elle gardait le poignard de William, le revolver lebel d'Henri, la pipe de l'inconnu, la lettre menaçante et un collier ayant appartenu à Hélène. 

Et Peter voyait tout ça. Il voyait la tempête sans fin dans l'esprit de sa femme, le manque qu'elle éprouvait face à l'ennuie puis ses yeux se posait sur les cicatrices. 

Il avait manqué de la perdre. 

Qu'aurait-il fait dans ce cas là ? Il aurait erré dans des décors vides, où plus personne ne l'attendait. Où personne ne saurait recollé les morceaux. Inlassablement battue par des vagues de tristesse. 

Alors qu'elle, Clémence était là. Sa présence emplissait chaque pièce du manoir. Si elle souffrait de ses blessures, ils se postaient sur la terrasse, à l'arrière du manoir et s'endormaient dans les bras de l'autres. Ils étaient bien, là, tout les deux.

De toute manière, ils ne pouvaient pas être trois.

Clémence entra dans la salle à manger et se posta face à la mince porte-fenêtre qui donnait sur l'immense domaine. D'une main elle tenait son verre d'eau, de l'autres une lettre. 

"Décidément tout commençait de la même manière."


Clémence Oswald, tome IIWhere stories live. Discover now