Chapitre 6

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Perturbée par ce nouvel entretien, Lyana ne se rendit pas compte que le garde l'avait menée, et laissée, dans le couloir des serviteurs. La jeune fille se mordilla la lèvre et regarda autour d'elle. Rien ne lui était familier, si ce n'était l'escalier emprunté quelques minutes plus tôt pour passer du rez-de-chaussée au premier étage. Et nulle trace de Maceo, qui devait pourtant s'occuper d'elle. Deux choix s'offraient à elle: retourner aux cuisines en espérant que quelqu'un la renseignerait, ou tenter de monter au deuxième étage dont elle était censé avoir la charge.

Le souvenir de la gouvernante débordée lui vint en mémoire, et Lyana choisit de ne pas aller la voir. Quelque chose lui soufflait que pour rester, mieux valait être autonome et débrouillarde au plus vite. Elle prit donc le risque de se diriger seule au deuxième étage.

Le second étage était tout aussi vaste que le premier. Heureusement pour la jeune fille, pas de gardes en vue, elle put donc éviter les remarques salaces et observer les lieux. Les tapisseries représentaient des batailles épiques et sanglantes, sans doute reproduisant de grands moments de l'histoire du royaume. Cela donnait un aspect lugubre au couloir qui lui déplaisait fortement. Elle avait beau faire partie des criminels de la cité, et se défendre quand elle se sentait en danger, la violence et les massacres la mettait mal à l'aise.

La voleuse soupira d'aise quand elle entendit du bruit derrière une porte. Elle la poussa, doucement, pour avoir le temps de fuir si elle tombait par mégarde sur un des maîtres de la demeure. Mais ce n'était que Maceo qui s'employait à nettoyer une chambre vaste. Elle s'approcha discrètement pour observer le moindre de ses gestes. Gracieusement, il agitait un plumeau sur les armoires, les étagères et les coiffeuses en bois pourpre. Sa précision et la rapidité de ses gestes témoignaient de l'expérience qu'il avait pour entretenir une maison. Un moment, la voleuse se demanda quel pouvait bien être son chemin de vie pour atterrir aussi jeune chez les serviteurs et être déjà aussi doué.

Le garçon se retourna soudain, probablement dans l'optique de passer à une autre tâche, tombant nez à nez avec les yeux brillants d'intérêt de Lyana. Il sursauta violemment avant de se reprendre en toussotant.

— Depuis combien de temps es-tu revenue ? Je ne t'ai pas entendu rentrer ! s'exclama-t-il, puis il secoua la tête de gauche à droite. Non laisse tomber, je suis agréablement surpris que tu sois si discrète, ça vaut mieux pour nous autres serviteurs ici.

Sans plus attendre, il lui mit le plumeau dans ses mains et posa ses mains sur ses hanches.

— Cela dit, il est hors de question que tu me regardes faire. Tu dois être autonome rapidement. Le plumeau se passe sur tous les meubles, tous les jours. Allez, je te regarde.

Le plumeau était l'étape la plus simple et Lyana s'y acquitta sans aucun souci. Venait ensuite la lourde et délicate tâche de battre les couvertures, ainsi que les coussins, par la fenêtre pour en extirper la poussière. Ils étaient très encombrants, ce qui valut à Lyana de belles frayeurs en les manipulant et beaucoup de sueur pour parvenir à ses fins. Pas une seule fois Maceo ne l'aida. A l'inverse, il ne cessa de lui parler d'une voix ferme.

— Le dimanche, quand nos maîtres sont de sortie, nous battons également les tapis et nettoyons le sol. Pendant ce temps-là, les blanchisseuses changent les draps. Cependant, si l'un des enfants rentre, le parquet devra être lavé tous les jours. Rassure-toi, ça ne risque pas d'être de sitôt. On ne t'aurait pas confié une tâche si ardue dès ton entrée.

Une fois la première chambre finie, ils firent de même avec la deuxième et la troisième. Alors que la voleuse s'était extasiée sur les superbes appartements des nobles, elle en vain à détester rapidement toutes ces fioritures encombrantes et lourdes qu'elle devait battre pour enlever la poussière. A la fin, les muscles de ses bras tremblaient tous seuls de fatigue. Elle était pourtant en bonne condition physique. D'un hochement de tête, et avec son premier sourire de la journée, Maceo la félicita.

La Guilde Des OmbresWhere stories live. Discover now