Dans ce coin de terre
Un petit pont bizarre
Enjambe un nénuphar
Au milieu des fougères
Yves Duteil
Tu marches déjà depuis plus de trente jours dans ce désert de pierres
Tu as laissé derrière toi les rapaces du pouvoir
Tu entrevois enfin un passage verdoyant surplombé par un pont de bois.
Tu te laisses charmer par ces serpents à trois têtes
Tu te perds un peu plus dans cette vaste atmosphère
Tu y laisses ton âme et te mets à nu.
Tu te souviens de ce petit pont de bois qui enjambait naguère la rivière
Tu aimerais te rafraîchir et te baigner
Mais il ne pleut plus guère aujourd'hui qu'une ou deux fois par an.
Tu te souviens de cette odeur qui enivrait tes poumons
Tu sais, ce feu qui brûlait là, dans les bois
Et quand tu criais juste pour écouter l'écho de ta voix.
Ce feu que tu embrasais avec le bois du petit pont vieillissant qui s'écroulait sous le poids des ans
La rivière à l'époque qui réfléchissait tel un miroir ton amour infini pour cette belle inconnue d'un jour
Cette douce folie qui te consumait à chaque pas que vous faisiez l'un vers l'autre.
Puis ce sentiment qui te dévorait atrocement la poitrine comme un rongeur qui grignote le bois du pont
Tu avais le cœur si chaud et les yeux si froids
Tu te souviens même de son parfum
Elle t'a marqué l'esprit, cette jolie passante.
Il pleuvait ce jour-là, une fine et tiède pluie comme la mousson
Tu t'es rapproché d'elle pour l'aider à se sécher
Tu as enfoui ton visage au creux de son cou
Ah comme c'était doux et enivrant!
Comme si des diamants tombaient du ciel
Ton cœur chantait sous ta peau
Et tu te laissais transporter dans ce nuage, ivre de sensualité.
Ta poitrine frémissait au rythme des vocalises de ton cœur palpitant
Tu titubais l'esprit perdu dans un ailleurs surréaliste
Ton âme vacillait au bord de la rupture.
Et un jour, tu es tombé, ton cœur en miettes
Tu l'observais en train de brûler
Comment réparer les morceaux décollés...
Tu te retrouves maintenant devant ce pont qui fut le témoin de tant de bonheur et de destruction aussi
Tu hallucines un monde enchanteur
Tu voudrais faire taire ta douleur.
Le pont se fissure à son tour
Tu chutes avec lui
Au nom de cet amour
Complètement anéanti.
Média: Empty de Pvris
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L'écho de deux voix.
PoetryCe recueil commun est une aventure amicale de longue date. Il nous a paru presque évident de partager nos univers et nos sensibilités. Nos écrits sont ainsi l'écho de deux voix et de deux âmes rêveuses. Nous espérons que notre plaisir à écrire ensem...