Chapitre 14

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- 27 décembre 2018 -

Grace

Nous sommes assis côte à côte dans le canapé. L'ambiance est froide, pesante même. Et le film que nous regardons n'arrange rien.

Avant l'annonce de ma grossesse, tout aurait été différent. Alexander et moi aurions ri devant un navet pareil. On aurait critiqué et rigolé comme pas possible. Mais aujourd'hui, je ne peux m'empêcher de me sentir triste en repensant à ce temps-là. On était beaucoup plus à l'aise l'un avec l'autre. On pouvait parler de tout, se confier tout et n'importe quoi mais maintenant, rien n'est plus pareil. Il est froid, très froid avec moi. Il n'est pas à l'aise et ça se voit. Il se comporte comme si j'étais une inconnue. Il m'adresse à peine la parole et ça me pèse.

L'ancien Alexander me manque. J'ai besoin de notre complicité comme de l'air que je respire. Sans ça, j'ai l'impression de ne pas être en vie. J'essaie de lui faire comprendre depuis plusieurs jours que je veux que tout soit comme avant. J'essaie d'être aussi avenante et sympathique que d'habitude mais rien n'y fait. Il ne voit pas les signaux que je lui envoie ou tout du moins, fait semblant de ne pas les voir.

J'ai désormais compris qu'une seule solution est possible : la dispute. J'aimerai juste discuter avec lui mais je sais que ça va partir très rapidement en dispute, cela ne fait aucun doute. J'attends juste le moment opportun pour lancer le sujet. Le problème c'est qu'il ne vient jamais. Avant-hier, c'était le vingt-cinq décembre. Je n'allais quand même pas lancer une troisième guerre mondiale à l'appartement le jour de Noël. Et puis, hier, il a passé sa journée au travail et moi, j'ai pris un repos : j'étais totalement lessivée. Je ne sais pas si ce sont mes enfants ou leur père qui me fatiguent mais une chose est sûre, je n'allais pas particulièrement bien.

Mais aujourd'hui, cela va beaucoup mieux. Je suis prête à lui faire comprendre mon point de vue. J'en ai marre de me faire marcher dessus.

- Grace ?

Je me tourne vers mon meilleur ami. Peut-être qu'en fin de compte, il se rend compte de son comportement stupide et il veut bien en parler.

- Quoi ?

Il me désigne le saladier que je tiens sur mes jambes.

- Tu peux me passer le pop corn ?

- Tu peux te servir.

- Non passe-le moi. C'est plus simple.

Ne me dites pas qu'il n'ose pas prendre du pop corn parce qu'il se trouve sur mes jambes. Non mais c'est quoi cette blague ?

- Tu ne veux pas prendre du pop corn parce que tu ne veux pas mettre tes mains là ou je pense ?

- Non, c'est pas ça.

- Si c'est ça. Je vais pas te violer tu sais ! Et puis même en prenant ce foutu pop corn, tu ne pourrais pas me toucher.

Il me fusille du regard avant d'en prendre une poignée.

- Tu vois, il ne t'est rien arrivé. Tu pensais quoi ? Que si tu me touchais, tu m'en ferais un troisième.

Il détourne ses yeux et continue de regarder le film.

- Très drôle.

Je pose le saladier sur la table basse en face de moi et me lève pour lui couper la vue.

- Tu es devant la télé là !

Je me penche, prends la télécommande et éteins le téléviseur.

- Non mais tu fais chier !

- MOI je fais chier ?!

- Oui.

Tu es mon toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant