Chapitre | 6

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- Hope ? La questionnais-je. Tu t'es toi-même attribué ce prénom ?

- Je suis programmée pour choisir un prénom au hasard dans ma base de données si on ne m'en donne pas un dans les vingt-quatre heures suivant mon activation, alors techniquement, oui.

- Fantastique, commentais-je en attrapant un cookie dans la cuisine et en me dirigeant vers ma chambre.

- Tu vas travailler ?

Je sentais les prunelles noires sur moi, brûlant presque mon dos. Elle n'est pas réelle. C'est un robot, ce n'est pas elle. Je me répétais cette phrase intérieurement.

- Oui.

Arrivé dans mon repère, je jetai mon sac sur le sol et m'étalai sur mon lit, la tête pendant dans le vide et les yeux rivés au plafond.
J'avais érigé tant de barrières en l'espace d'une année. J'avais cru que cet espace de ma mémoire était emmuré, telle une forteresse, derrière des remparts infranchissables. Et ce simulacre d'être humain faisait tout ressurgir. A chaque fois que je croisais Hope, puisque c'était ainsi qu'elle s'était elle-même baptisée, c'était comme si une rivière de souvenirs remontait à la surface. Comme si une vague, énorme, passait par-dessus les remparts, les brisait un peu plus à chaque fois et permettait à certains évènements de se rappeler à moi.
Comme cet été 2030.

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- Juillet 2030 -

Le soleil brillait haut dans le ciel. Ses rayons réchauffaient nos peaux peu habituées à de telles températures, en cette semaine de canicule. Nova, Ombre, Clay et moi-même avions roulé une bonne heure, dans la vieille Peugeot que ma mère avait accepté de nous prêter, jusqu'à Hunmanby Gap, sublime plage du Yorkshire. Malgré la météo splendide, seul un petit nombre de personnes lézardait sur le sable sec et brûlant. Peut-être faisait-il trop chaud.
Une brise, chaude elle aussi, ne parvenait pas à rafraîchir l'atmosphère.
Le seigle de mer ondulait doucement, produisant son petit bruit atypique et relaxant. Même les mouettes, d'ordinaire si bruyantes, semblaient s'être tues, accablées elles-aussi par la chaleur.

- Je suis en train de cramer, constata Nova sans pour autant bouger d'un pouce.

Elle seule avait refusé de s'appliquer de la crème solaire. Il était vrai que sa peau était naturellement légèrement cuivrée et qu'elle ne prenait jamais de coups de soleil, mais aucun de nous n'était habitué à ce soleil de plomb. Nous vivions en Angleterre, tout de même.

Elle roula pour se placer sur le dos, la tête de l'autre côté, probablement les yeux fermés.
Ses longs cheveux bruns foncés trainaient sur ses épaules, le vent les chahutait un peu. Ses bras fins étaient repliés sous sa tête et les muscles de son épaule frémirent lorsqu'une mouche importune s'y posa.
Mes yeux se perdirent sur l'horizon tandis que j'essuyais de ma main une goutte de sueur qui coulait sur mon front. Foutue chaleur.

- Même avec un spf 50, je finis brûlée au je ne sais quel degré, se rembrunit Ombre plus d'une minute après.

La chaleur nous abrutissait tous. Ces dernières années, la température avait grimpé de plusieurs degrés sur la planète entière. Le réchauffement climatique était bien là, personne ne pouvait le nier désormais.
Depuis presque une semaine, des températures atteignant parfois les quarante degrés assommaient la France et le Royaume Uni, quand un été habituel à York tournait autour des vingt degrés Celsius en moyenne.

- Je jouerais bien au volley, ajouta Clay, mais j'ai beaucoup trop chaud.

- On pourrait pas se mettre à l'ombre ? Soupirais-je, exténué de n'avoir rien fait de ma journée.

Une pastille bleue en AutomneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant