La Pieuse

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Bienvenue chers lecteurs, suivez-moi à la découverte d'une autre maison, allons venez, ne vous en faites pas, nous nous ferons aussi petit que des souris, ou mieux, comme Peter Pan, nous les regarderons depuis la fenêtre. Ils ne se rendront pas compte que vos yeux avides les observent. 


Dans la grande maison des Patt, une atmosphère feutrée régnait. Les deux enfants de la famille, Chastity et Charity, toutes deux âgées de 10 ans, le visage entouré de boucles blondes sévèrement retenues par un ruban noir, dormaient déjà à poings fermés. Leur chambre plongée dans l'obscurité laissait deviner auprès de chaque lit de bois brun un coffre assorti sur lequel la robe du lendemain était déjà déposée, soigneusement pliée. Face aux lits, pour chacune des enfants, se trouvaient un prie-Dieu et un crucfix accroché sur le mur blanc. De lourds rideaux noirs occultaient les lumières joyeuses provenant de Tottenham Court Road en fête. Les petites filles n'avaient que peu de jouets, tout au plus une poupée à l'effigie d'un nourrisson chacune qu'elles baignaient, nourrissaient, berçaient et bordaient à horaire régulier comme s'il eut s'agit de leur propre enfant. Comme seuls livres, les petites jumelles possédaient la bible et quelques sermons anglicans. Souvent, elles regardaient par les carreaux de leurs chambres les enfants du voisinage jouant sur les pavés de la rue londonienne. Leurs éclats de rire et leurs voix heureuses montaient jusqu'à leur fenêtre tandis qu'elles ne faisaient que prier, chanter les louanges du Seigneur et apprendre à être de bonnes mères et de bonnes épouses. Engoncées dans leurs robes aux couleurs foncées cachant la moindre parcelle de leur corps, elles ne rêvaient que d'une chose, sortir de ce carcan, vivre une enfance heureuse et colorées, remplies de joujous, de bonbons, de rires et d'amis.

Dans l'immense salle à manger, Dorothea et son époux, l'avocat reconnu Alexander Patt étaient installés, chacun à une extrémité de l'immense table. Seule la peau au teint de pèche de la jeune femme laissait deviner qu'elle n'avait pas encore atteint les 30 ans. Elle portait une lourde robe noire posée sur une immense crinoline limitant la plupart de ses mouvements. Sa taille était affinée par un corset serré à la limite de l'étouffement et ses longs cheveux d'or bouclés étaient sévèrement retenus dans un chignon d'où aucune mèche folle ne dépassait. Ses traits étaient pincés comme si elle croquait perpétuellement dans un citron, quant à sa voix mélodieuse, elle était devenue dure et sèche à force de se taire. Dorothea Patt ne parlait en effet que peu, comme il seyait à une bonne épouse et à une véritable Lady. On ne l'entendait que lorsqu'elle murmurait des prières, aboyait des ordres aux domestiques et à ses enfants ou encore quand elle animait un petit salon de ferventes bigotes. Le juge lui-même n'était plus vraiment certain de savoir à quoi ressemblait le rire de son épouse avant leur mariage. Assise à cette table, silencieusement, mangeant en ouvrant à peine la bouche de peur de dévoiler ses dents, n'osant regarder son mari dans les yeux, elle semblait être déjà une vieille femme. Elle portait régulièrement sa tasse de thé à ses lèvres entre les petites bouchées qu'elle prenait d'une assiette pratiquement vide. A ses yeux, boire de l'alcool était l'un des pires péchés qu'une femme puisse commettre. Mais il était vrai qu'à ses yeux, chaque geste, chaque mot, chaque respiration d'une femme, jusqu'à son existence même étaient un péché dont elles devaient chaque jour se repentir en priant inlassablement, en servant Dieu et son mari, et en faisant pénitence. Elle ne mangeait que peu, d'où l'assiette bien peu remplie et tendrait à ressembler plus à un squelette dans son linceul noir qu'à une femme de la haute société si son joli visage ne surplombait pas toutes ses couches noires. Alexander quant-à-lui, semblait l'exact opposé de sa femme. Il était fringant, portant fièrement ses 41 ans et en faisant bien 5 de moins. Toutes les femmes de la haute société étaient à ses pieds, ne jurant que par lui, par la sagesse de ses plaidoiries et surtout par son imposante stature. Ses cheveux sable étaient nettement taillés mais quelques mèches semblaient perpétuellement s'échapper, lui donnant l'air d'un soldat romantique revenant du front. Bon vivant, il aimait manger, boire, danser et plaisanter mais son métier et ces divertissements ne lui laissait que peu de temps pour s'occuper de ses deux petites. Il était peiné de voir que les deux enfants semblaient ne pas s'épanouir dans cette vie austère et stricte mais à chaque conversation qu'il tentait d'avoir avec son épouse à ce sujet, celle-ci s'indignait, lui rappelant que la bienséance voulait que les hommes ne s'occupent que de façons minimales de leurs enfants surtout dans le cas où ceux-ci sont de sexe féminin.

Ce soir-là le couple fêtait la veillée de Noël. Au pied de la cheminée avait été placée une crèche attendant l'arrivée, pour le soir même, de la statuette de l'enfant Jésus et pour le 6 janvier des statues des rois mages. Aucune autre décoration si ce n'est des chaussettes au nom des différents membres de la famille n'avaient été suspendues dans le salon, pas même un grand arbre de Noël. Dans les chaussettes, Dorothea avait placé, peu après le coucher des jeunes filles, quelques fruits et un petit livre de psaumes. Dans la chaussette de son mari, elle avait placé un écrin contenant une plume, un encrier et du parchemin de haute qualité. Quant à sa propre chaussette, elle était vide à l'exception d'un crucifix, lui rappelant que l'ensemble de sa vie sur terre était vouée à Dieu. Elle ne savait point que dans la poche de la redingote de son époux se trouvaient trois petits paquets soigneusement emballés. Le premier contenait un délicat chapelet fait de perle de jade et de saphir. Il savait que son épouse n'accepterait aucun cadeau que ceux en lien avec sa piété et avait donc choisi, plutôt que de faire monter en collier ces pierres offertes en paiement par l'un de ses clients ayant fait fortune aux Indes, il avait décidé de les faire polir et enfiler sur un chapelet. Les deux autres petites cadeaux contenait chacun une longue chaine en or ornée d'une croix sertie de 3 petits diamants symbolisant la Sainte Trinité. Ils étaient destinés à ses filles, Alexander estimant qu'il était temps, à dix ans, que les enfants aient leur premier bijou, ne serait-ce que pour paraître en société. Il savait que si elle serait au départ opposée à l'idée, Dorothea serait réceptive à la présence tant de la croix que de la symbolisation de la Sainte Trinité et finirait donc par céder et par laisser leurs petits anges les porter. Alors qu'il s'apprêtait à se lever pour aller déposer ces paquets dans les chaussettes, entre le fromage et le dessert, une vive clarté envahi la pièce. Dorothea sursauta, laissant échapper un cri de surprise et, sous le choc, oublia de fermer la bouche, ses lèvres formant un O parfait. Portant la main à sa gorge couverte de noir, elle tenta de calmer son cœur affolé en triturant la croix qu'elle portait toujours autour du cou. Terrifiée, elle se mis à réciter des prières dès l'instant où ses sens lui revinrent. S'approchant doucement de la fenêtre à laquelle Alexander était déjà penché, elle vit avec horreur une forme lumineuse s'élever dans le ciel en grésillant. L'effroi empli ses yeux.

« Les sorcières chuchota-t-elle Les sorcières sont parmi nous, nous sommes damnés »

Alors, qu'en pensez-vous, Dorothea vous plait ? Et Alexander ? Pour les fans d'Harry Potter, n'hésitez pas à me dire si vous avez remarqué mes petites références et inspirations ! A bientôt :)

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