Chapitre 40 - Il court, il court le Olivier

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— Oh... c'est vrai... j'avais oublié.

— Eh oui.

Moi, je ne peux pas oublier. Je ne peux pas oublier qu'il est tout ce qu'il me reste dans mon semblant de « famille ».

Mine de rien, je réussis à trouver le sommeil entre deux ronflements d'Olivier. C'est étonnant, je ne suis pourtant pas du genre à tolérer ce genre de nuisance.

On a donc pris le petit-déjeuner ensemble avant de se préparer et de prendre la route direction l'hôpital. C'est la première fois que nous y allons ensemble alors qu'on a toujours eu tendance, jusqu'à présent, à s'y retrouver comme par hasard. Le trajet se fait tout en silence. Peut-être parce que nous sommes tous les deux bien trop occupés dans nos petits mondes respectifs pour se soucier de l'autre.

Je me demande comment va Adélaïde, mais je m'inquiète aussi pour mon propre grand-père.

— Je te laisse, je vais par là.

Olivier tourne dans un couloir différent et moi, je m'en vais de mon côté.

— Ah, bah tiens ! Quand on parle du loup ! Elle daigne enfin se montrer, siffle ma cousine en me voyant passer la porte.

Capucine est là. Au chevet, près du lit.

Ça m'étonne. Capucine ne vient jamais à l'hôpital et je suis normalement celle qui s'occupe de tout ça. De lui.

— Viens dehors cinq minutes, Philippine. On va causer, toi et moi.

Je n'aime pas son ton. Elle referme alors la porte de la chambre derrière moi sans que je n'aie le temps d'apercevoir mon papy et me regarde avec son air des plus hautain.

— T'étais où, putain de merde ? m'interroge-t-elle avec son ton le plus désagréable possible.

— En voyage d'affaires. J'ai prévenu. Désolé que tu n'aies pas eu le « mémo ».

— Tu te fous de moi ? Tu ne peux pas partir quand ça te chante. Qui s'occupe de lui quand t'es pas là ? Hein ? Les médecins ont essayé de te joindre plusieurs fois, mais comme j'ai mon numéro en plus sur le dossier, c'est tombé sur ma pomme. Tu fais vraiment chier. C'est trop te demander un petit effort ?

Pardon ? Attends, attends. Je crois rêver là.

— J'ai ouï dire que t'avais un nouveau boulot.

— Ouais et qui paye bien mieux que l'ancien parce que qui se tarte les factures de l'hôpital ? Ce n'est pas ta royale personne, je crois.

— Dis-le, m'ordonne-t-elle sèchement.

— Dire quoi ?

— Tu préférerais qu'il meure pour que tu sois allégée de tout ça.

— T'es vraiment qu'une connasse, Capucine.

Et moi aussi, car plusieurs fois je l'ai secrètement pensé. Oui, je me suis imaginé comment serait ma vie avec tout cet argent en plus. Oui, je me suis imaginé ce que ça serait de ne plus venir aussi régulièrement à l'hôpital et de ne plus avoir à m'occuper de tout ça. Ça dure depuis des années, c'est devenu un poids.

Mais rien que pour avoir eu ce genre de pensées abjectes et immondes, je me déteste. J'ai envie de me mettre des baffes. Comment peut-on souhaiter ce genre de chose ? Grand-père a toujours pris soin de moi. À la mort de mes parents, il m'a éduquée, il a été le « papa » que je n'ai pratiquement jamais eu. Il s'est donné à fond pour moi et même quand la maladie le ronge, je sais qu'il la combat de son mieux pour paraître au mieux de sa forme devant moi.

Philippine - Tome 1Where stories live. Discover now