Phoenix de la liberté by GaiaChroniques (French)

68 12 8
                                    

Phoenix de la liberté

by GaiaChroniques


Dans la ville de Montréal, dans un des quartiers abandonnés, que l'on surnommait jadis « Le Vieux », on retrouvent encore des sous-sols accessibles, obscurs et à moitié écroulés

Oops! This image does not follow our content guidelines. To continue publishing, please remove it or upload a different image.

Dans la ville de Montréal, dans un des quartiers abandonnés, que l'on surnommait jadis « Le Vieux », on retrouvent encore des sous-sols accessibles, obscurs et à moitié écroulés. Dans l'un d'eux, la maigre lueur d'une lampe solaire vétuste éclaire un être chauve et imberbe. La nuit est son univers. Il va ici ou ailleurs, depuis son antre jusqu'à la rue, pour régner sur son royaume.

Noctivague, la nuit est son domaine, il s'éveille pour pouvoir poursuivre la quête qui lui a été fixée.

Dans les rues de l'ancienne métropole, c'est un rat de misère, un loqueteux de l'antique rue Sainte-Catherine ; un visage inconnu que les yeux des passants évitent avec mépris ; une silhouette qu'ils contournent sur le chemin emprunté pour retourner vers les trottoirs automatiques des étages supérieurs. Lui, il croupit en bas, tout en bas de la société, tout en bas de la ville. Il se terre dans les fondements décrépits de la Nouvelle mégapole étrangère qui s'élève en strates au-dessus de la lie.

Et pourtant... La nuit c'est l'oiseau nocturne, le phœnix de la liberté !

** ** **

J'ÉCRIS !

Pour ce monde qui me rejette. Pour tous ceux qui m'évitent. Pour une passion qui m'étreint, depuis toujours il me semble. J'écris. Sans me lasser. Les lignes s'ajoutent sur le papier. Je les frappe en tempo : staccato, crescendo, moderato... Les lettres s'additionnent et au final ce sont des textes...des appels... des cris. Du talent ? Je ne sais pas. Mais peu importe : bien ou mal écrit, cela n'a pas d'importance ! En effet, car écrire quand on y pense : c'est illicite ! Plus personne ne s'y risque. Et pourtant, j'écris !

Dans le fond du sous-sol poussiéreux, bien caché derrière des poutrelles, emmitouflé dans mon manteau de gabardine élimé, qui fut un jour le point central de mon image de marque, un bonnet rouge sur la tête et les doigts découverts au bout de mes gants de laine usée, je pose ma vieille Royale 200 sur mes genoux et... je tape ! Je tape avec force sur cette amie fidèle : mes jambes en tressautent. Parfois je pose mon clavier sur une vieille boite de livraison en bois, mais celle-ci fait caisse de résonance et, dans le silence de la nuit, j'ai peur d'attirer l'attention. Alors je reprends mes jambes comme table et poursuis mon ouvrage dans un silence cliquetant.

Ce n'est pas que le pâté de maison soit peuplé de bonnes gens qui cherchent à jouer au shérif, mais, entre les clochards, les vagabonds, les fugitifs et les Dames de compagnies, on ne sait jamais... S'y cacherait-il un délateur ? Que ne dirait-on pas pour quelques crédits ? Pour sauver sa vie ? Pour améliorer son quotidien de misère et s'élever d'un étage vers la lumière naturelle ?

J'écris ! Comme si chaque frappe devait être la dernière. Et l'antique ruban fatigué transmet mes frappes sur le papier, quelque peu jauni par le temps, un peu froissé par mes déplacements impromptus, souvent délavé par les intempéries.

Tevun-Krus #52 - International Edition 2Where stories live. Discover now