Cameron

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Aujourd'hui, nous retournons à l'entraînement. Cette fois, Rana pète la forme. Elle slalome entre nous, rectifie certains de nos mouvements... Mais je suis mal à l'aise, comme tout le monde. Quand on s'entraîne, on ne reconnait pas la Salope à laquelle on était habitués. C'est une nouvelle Commandante qui est là : joyeuse, presque amicale... Comme si enseigner était une chose qui la comblait de bonheur. Beurk. 

Le soir, je me jette sur mon lit, avide de me blottir dans mes draps. 

« J'ai maaaaal paaartouuut... gémit Diane.

- Je suiiiis fatiguééé... ajoute Paul. 

- Et bah fermez-la et dormez ! grogne Bill. Bande de tapettes ! »

Je me redresse dans mon lit et m'écrie d'une voix de fausset :

« Quoi, t'es homophobe c'est ça ? »

Toute la case éclate de rire et Bill m'envoie son oreiller dans la tête. Je le renvoie d'un coup de pied, me saisis du mien et me jette sur lui avec un cri de guerre. 

Et voilà comment lancer une bataille de polochon générale en moins de trente secondes. Hé hé.

Mais c'est sans compter cette putain de vie de merde, qui ne manque pas une occasion de nous replonger dans l'horreur et le désespoir.

D'abord, des hurlements.

Ensuite, une odeur de saucisse. 

« Que se passe-t-il ? demande Sam.

- Ça viens de dehors ! répond un frère d'arme. »

Nous nous précipitons aux fenêtres. 

« Y'a l'feu ! lance quelqu'un. »

En effet, dans la cour en contre-bas, des bâtiments brûlent. Ce sont les appartements des serviteurs libres. Des gens se pressent autour, faisant la chaîne avec des sauts en attendant les secours. Il y en a d'autres qui sortent, brûlés, crachant de la suie. Je ne distingue pas de visage, car le brasier est trop près et trop important. 

« On devrait pas aider ? propose quelqu'un.

- Les portes sont fermées à clé, la nuit ! lui rappelle Sarah. 

- On doit juste regarder ces gens... mourir ? s'étrangle l'un des plus jeunes. »

Le silence accueille ses paroles. 

« Oui, lâche Sam. Oui, c'est ça. »

Merde.

Soudain, une nouvelle personne arrive, des soldats et infirmiers avec elle. C'est Liraho. Il hurle des ordres, et on entend son agaçante voix d'ici. Il cours d'un endroit à un autre pour organiser les opérations. Soudain, il se fige. Il regarde quelque chose qui sort du bâtiment. Enfin non, pas quelque chose. Quelqu'un. 

C'est une femme. Elle porte une longue chemise de nuit blanche, et ses manches sont tellement amples qu'elles cachent ses mains. Sous chaque bras, elle porte un serviteur, comme s'ils ne pesaient rien. Elle les déposent loin de bâtiment, et fait face à Liraho. Il se fâche, mais sa voix est couverte par un toit qui s'effondre. La femme se recroqueville et déplace de trois-quart. Ainsi placée, elle nous fait face, et le feu est derrière elle. Je ne distingue pas son visage, je ne peux pas voir clairement ses traits.

Pourtant je sais qui c'est. Je la reconnais. 

Et c'est comme si on m'enfonçait un pieu dans le cœur.

Alors, je me penche au dessus de vide, et je hurle.

Et Diane hurle avec moi.

Indéfinis 1 - Un monde sans AmisWhere stories live. Discover now