Effondrée

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Les yeux lourds et rouges, le teint pâle, la bouche pâteuse, j'essayais tant bien que mal de lutter contre les effets qui envahissaient mon corps si rapidement. Les battements de mon cœur s'accéleraient, je sentais le regard pesant de ma mère qui s'abattait sur mon corps mou.

" - Tu t'es enfin décidée à rentrer? Tu crois que tout est permis? Essaye de grandir un peu, fais au moins honneur à ta mère. "

Il n'était même pas 10 heures du matin. Je n'avais pas réussi à dormir, le manque frappant à la porte de mes besoins, de mon cerveau. C'était la seule chose qui pouvait calmer mes émotions si naucives.

La porte claqua, me fis sursauter, et à peine avait-elle refermer la porte, que j'avais déjà oublié les mots sortis de ses lèvres sèches, tels le venin d'un serpent.

La pièce tournait autour de moi, et malgré ça, je fouillais dans mes tiroirs, sous mon vieux tapis dégueulasse, sous les lattes de mon lit. Rien.

Je n'avais pas le moindre sou, ni dans ma tirelire, ni dans mes poches.

Il fallait que je me défoule. Frapper. Faire des dégats, me faire mal, fumer, hurler, c'est tout ce qui m'importait.

Ce qui venait de m'arriver m'avait détruit, et ça allait sûrement se reproduir.
Et je ne pouvais en parler à personne.
Comment allais-je faire? J'avais besoin d'aide. Telle une pauvre enfant perdue, telle une adolescente suicidaire. Ça me faisait rire. J'étais tellement à bout que je cru m'évanouir.
Comment allait se passer cette nuit? Je n'avais plus de force. Plus de sentiments, plus d'émotions. Mes sens s'étaient éteinds. Et mon cœur aussi. J'étais là, une âme solitaire, un corps perdu. J'avais froid, j'étais seule. Pas la moindre chaleur.
Pas de bras pour m'enlasser, rien pour me rassurer.
La seule personne qui était là pour moi, pour qui je continuais à vivre, était morte. Morte et enterrée. Et pourtant, j'étais venue te rendre visite, malgré moi.
J'aurais voulu t'oublier, mais cela me semble impossible. Mon esprit et mon corps ne le veulent pas. Pourquoi? Pourquoi putain? C'est naucif, et ça va devenir mortel. Je le sais très bien.

J'étais dans l'incompréhension. La plus totale.
Noyée ou asphyxiée, peu importe, je m'étouffais dans mon souffle trop rapide et mes spasmes violents.

Je me levais d'un bond.
J'avais toujours ce bruit sourd dans mes oreilles. Il ne me quittait pas, et devenait de plus en plus fort. Ça sifflait, ça tambourinait, ça me faisait mal. Ma vision devint noire pendant un cours instant. Je ne bougeais plus.

Lorsque ça se calma, j'attrapais en vitesse mon vieux sac déchiré, mis quelques affaires dedans. J'ouvris ma fenêtre. J'avais l'habitude de fuir quelques fois, même souvent. Il m'était donc facile de descendre seulement un étage, et d'atterrir derrière un arbre.

Enfin mes pieds touchèrent le sol. La douleur me coupa la respiration.
Je couru rapidement, pour me défouler, au moins 5 kilomètres pour enfin arriver chez la seule personne qui pouvait peut-être me comprendre. En tout cas je l'espérais. C'était le meilleur ami de mon copain décédé, et je m'étais decidée à aller le voir.
Je ne voulais plus rentrer chez moi.
Je ne voulais plus faire semblant, comme si tout allait bien.

Je m'arrêtais sur des escaliers sales et délabrés, le temps de m'allumer une cigarette, histoire de me calmer un peu.

Je pris mon courage à deux mains, récupérais les dernières forces mentales qu'il me restait.

Je frappa à sa porte. Je voulais partir, faire marche arrière, mais pourtant je restais plantée là. Le bruit du verrou me tira de mon angoisse. Son regard traversa le mien. Nous restâmes debout comme ça. Pendant longtemps.
On se fixait, en silence, sans bouger.
On s'était oubliés, et on avait regretté.

Il me prit dans ses bras. Il me serra fort. Très fort. Comme j'en avais perdu le goût, et l'habitude.

IsoléeWhere stories live. Discover now