Chapitre 19: Vengeance épicée (partie 1)

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− Depuis quand mon sort t'intéresse d'ailleurs ? Je pensais que tu ne voulais plus me parler, que notre pacte était rompu, grogné-je, rancunière.

La voix d'Agathe s'élève dans la cuisine, elle se met à chantonner, de bonne humeur, pendant que des personnes vont et viennent, apportant la vaisselle utilisée pour servir la table du roi et de ses fichus nobles pour ce midi. Je sens déjà mes mains me faire mal à la vue de toute cette vaisselle. Ces mains ont certes l'habitude des sacs de sables, des cotes et des mâchoires, mais elles n'ont jamais été confrontées à l'eau gelée, au bois, et au frottage intensif. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour une bonne crème hydratante et quelques pansements.

Je soupire, ils viennent de finir de manger et à la vue de la bonne humeur de cette vieille femme, tout ça, c'est encore pour moi.

− Écoute Éloïse, je suis désolée, je sais que ce n'est pas facile pour toi, je n'aurais pas dû me fâcher comme ça. Tu ne l'as pas dit dans le but de me faire du tort.

− Et ça t'a pris quatre jours pour t'en rendre compte ?

Détournant le regard de ses grands yeux tristes, j'essaye de me concentrer sur les mouvements dans la cuisine que je tente d'apercevoir entre les fissures de la porte, mais je n'y arrive pas. Je sens le regard d'Ode posé sur moi et ça me perturbe : pourquoi cherche-t-elle à ce point à ce que je lui pardonne ? Pourquoi ne vit-elle pas seulement sa vie comme elle l'a fait jusqu'à présent ? Pourquoi me donne-t-elle autant d'intérêt ?

− Qu'est-ce que tu veux de moi, Ode ?

Je sens son corps se rapprocher du miens pour mieux se dissimuler derrière la porte.

− Je veux être ton amie.

Mes sourcils se froncent à l'entente de ses mots, mon corps se crispe et mon cerveau tourne à plein régime, cherchant où pourrait être l'intérêt de ma colocataire, mais je ne trouve rien.

− Ça ne sert à rien, je n'ai rien à t'apporter.

La froideur de mon ton la surprend. Agathe quitte la pièce avec empressement après avoir lu le message qu'un petit garçon est venu lui apporter, j'en profite donc pour repousser Ode et ouvrir la porte pour sortir de ma cachette. Je me dirige vers le chaudron rempli aux trois-quarts, défait les lacets de la petite pochette que j'ai payé une petite fortune et y verse les piments forts après m'être assurée de ne pas avoir de témoins, à part Ode, mais je m'assurerais qu'elle garde le silence.

Sans lui laisser le temps de sortir de son incompréhension, je l'attrape par le bras et la tire à ma suite. Les pièces sont occupées à être nettoyées pour la plupart et à l'intérieur, tout le monde s'agite beaucoup trop. Après environ cinq minutes de marche, nous sortons du palais par la porte qu'empruntent les domestiques et une fois que je suis sûre que personne d'autre ne nous regarde, je la plaque contre le mur du palais.

− Tu n'as pas intérêt à cafter à qui que ce soit ce que tu as vu, on est d'accord hein !

Les beaux yeux verts de ma colocataire m'observent avec étonnement, je n'y vois pas la moindre trace de peur, ce qui me désarçonne ; j'en ai impressionné plus d'un avec ce regard noir. Qu'est-ce qui ne va pas avec elle ?

− Cafter ? Oh, oui, je ne savais pas que... Oh, mais tu sais, la solitude n'est jamais bonne. Je ne dirais rien, n'ai crainte, tu peux me faire confiance. Je veux simplement être ton amie, que l'on s'entende bien, rien de plus.

Relâchant hâtivement ma prise, je m'éloigne d'un pas pour mieux l'observer.

− Tu mens.

− Je ne mens pas.

Pour Sa MajestéWhere stories live. Discover now