— Pourquoi alors ?

— Parce que j'ai envie qu'on passe l'après-midi ensemble.

— Comme tous les autres jours, au fond.

Elle m'a tapé l'épaule. J'ai ri.

— Non, pas comme tous les autres jours. C'est vrai, quoi ! Soit tu as le nez dans tes études, soit tu bosses au bistro. Avec Gina, en plus ! Excuse-moi, mais nous n'avons pas une seule seconde à nous.

— On s'appelle tous les soirs, je te signale. Toi et moi, on discute pendant des heures.

Ma copine a ignoré ma remarque.

— Allons au parc d'attraction, qu'est-ce que tu en dis ?

— Tu es certaine que tu as envie d'y retourner ?

— Pourquoi, tu as peur ? Tu n'auras qu'à me tenir la main, si ça peut te rassurer.

J'ai secoué la tête.

— Non, mais la dernière fois...

— Je croyais que tu t'étais bien amusé ? m'a coupé Sacha.

— Oui, parce que ni toi ni moi n'avons été pris sur le coup. J'ai pas envie que cette fois, nous nous fassions prendre.

— Ça n'arrivera pas.

— Comment tu peux en être aussi certaine ? lui ai-je demandé.

— À vrai dire je n'en sais rien.

J'ai soupiré. Sacha m'a pris la main et m'a souri.

— Fais-moi confiance.

J'ai ri.

— Si on se fait prendre par contre, c'est toi qui explique à mes parents pourquoi nous sommes au poste de police.

— C'est si dramatique.

— Je suis sérieux ! me suis-je exclamé.

Elle a ri.

Heureusement, nous n'avons pas mis de temps à quitter la clinique d'ophtalmologie. J'étais bien content partir de cet endroit où une forte odeur de désinfectant flottait dans l'air. Sacha a salué la réceptionniste, puis elle m'a entraîné avec elle dans le stationnement. Nous avons marché jusqu'à l'arrêt de bus parce que faute de n'être que des étudiants, c'était notre seul moyen de transport. Surtout quand ni elle ni moi n'avions envie de nous taper plusieurs kilomètres de marche.

La bus n'a pas mis de temps à arriver. Nous nous sommes entassés à l'arrière, côte à côte. Sacha m'a passé un de ses écouteurs et ensemble, nous avons écouté sa playlist « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur ».

— Tu te fais des playlists pour chaque livre que tu lis ?

— C'est tout nouveau, m'a-t-elle répondu. En fait, il y a quelques temps je me suis mis à penser à un truc. Tu sais, parfois, tu écoutes une chanson que tu aimes bien à répétition pendant un certain temps ? Si tu écoutais cette chanson à la plage, elle te rappellerait la plage. Tandis que si tu écoutais cette chanson après une rupture difficile, elle te rappelait ce moment. Tu saisis ?

— Ouais et où veux-tu en venir ?

— On associe certains souvenirs à une chanson.

— C'est la mémoire auditive.

— Exact, a murmuré Sacha. Eh bien, je me dis que quand je serai incapable de lire je pourrai toujours me référer à cette playlist pour me rappeler les moments forts de ma lecture.

La théorie des cactusWhere stories live. Discover now