J'ai souri à Sacha. Celle-ci m'a frappé le bras amicalement.

— C'est mon anniversaire.

— Et alors ? Ce sera le mien dans trois mois. Aussi bien en profiter maintenant.

— Attends ton tour.

J'ai levé les yeux au ciel, amusé.

En attendant que la pizza arrive, Sacha et moi sommes allés au balcon. Nous nous sommes installés sur des chaises pliantes. Il pleuvait un peu depuis ce matin, si bien que l'air était humide. Sacha a ramené ses genoux contre sa poitrine et m'a regardé.

— Demain, on repart, a-t-elle murmuré.

— Je sais et j'en ai pas envie.

— À cause de tes amis ?

— À cause de mes amis et de nos deux derniers mois d'école.

— Ça te fait peur ?

J'ai ricané.

— Tu sais bien que graduer, c'est ce qui me fait le plus peur.

— Pourtant, t'as rien à craindre.

— Je sais bien, ai-je dit. Je ferai des erreurs, mais c'est ainsi que va la vie. Tu me l'as déjà dit, ça. Seulement, je sais pas... Je continue d'avoir peur d'être adulte.

Elle a souri.

— C'est vrai que ça fait peur.

— J'ai peur d'être indépendant, Sacha.

Son sourire s'est effacé.

— Toi, tu y arrives très bien.

— Pour le moment.

— Sacha...

— C'est la vérité, a-t-elle dit. Toi, tu as peur d'être indépendant, moi j'ai peur d'être dépendante.

— Ça peut-être pour ça qu'on s'entend aussi bien toi et moi.

Elle a ri.

— Pourquoi est-ce qu'on parle de ça, au juste ? a-t-elle demandé. On n'est pas encore rentré à Toronto tous les deux. C'est déprimant.

— Tu as raison. Il faut profiter du moment présent.

J'ai souri.

— Au fait, tu ne m'as jamais dit ce que tu voulais faire plus tard. Tu veux aller étudier à McGill, mais pourquoi faire ?

— Je croyais qu'on venait de dire qu'on profitait de l'instant présent.

— Je suis simplement curieux. Après cette question, j'arrête.

Sacha a semblé réfléchir.

— Professeure de littérature, a-t-elle dit. Je veux devenir professeure de littérature.

Ça ne m'a même pas surpris.

La pizza est arrivée vers dix-neuf heures. Sacha, son père et moi nous sommes installés à la table de la salle à manger. Avec nos assiettes de carton et nos verres en plastique, je trouvais que nous avions vraiment une drôle de manière de célébrer. Pourtant, c'était une manière simpliste qui me plaisait bien. Il y avait quelque chose de chaleureux dans cette façon de fêter. Niveau écologie, c'était une toute autre histoire.

Au beau milieu du repas, je me suis mis à piqué des frites dans l'assiette de Sacha. Elle m'a tapé la main, les sourcils froncés.

— Hé ! Bas les pattes, s'est-elle défendue. N'oublie pas, c'est un truc de couple ça.

La théorie des cactusWhere stories live. Discover now