5 décembre

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– Madame Faussette !

Mais qui crie aussi tôt ? Il frappe sur la porte en métal alors qu'elle est ouverte et qu'il est déjà à l'intérieur.

– Quoi ? criai-je à mon tour.

– Réveillez-vous, vous allez être interrogée par le lieutenant Brill.

Je me lève difficilement. J'ai le corps endolori par le béton sur lequel j'ai dormi. Je passe un peu d'eau sur mon visage. On m'emmène aux toilettes. Et puis, de nouveau, dans la salle d'interrogatoire. Je ferme les yeux. Je dors debout, je ne peux pas m'en empêcher.

– Le réveil est dur, madame Faussette ?

Je sursaute. Je le regarde. C'est le même qu'hier. Il sourit. Il m'énerve.

– Je vous emmerde.

– Bonjour, je vais bien, merci.

Je n'ai pas envie de rire ce matin. Pas du tout.

– Vous savez que nous fait beaucoup de recherches sur vous et vos parents.

– Et alors ? dis-je, exaspérée.

– Vous étiez au courant des activités de vos parents ?

– Non, je ne suis au courant de rien, répondis-je en me frottant les yeux. Si vous voulez savoir, ils me considéraient comme indésirable. Donc, on n'avait pas vraiment de discussion à table, si vous voyez ce que je veux dire.

– Et où est-ce que vous vous procuriez la drogue que vous vendiez ?

Je soupire.

– Quoi ? Vous voulez monter votre affaire ? Je me la procurais auprès de plusieurs vendeurs et producteurs, ça dépendait ! Pourquoi vous me demandez tout ça ?

– Vos parents ont organisé des trafics de stupéfiants vraiment impressionnants, en direction de toute l'Europe. Et ça, jusqu'à leur mort. Ce n'est pas courant, dites-moi, deux mafieux de deux pays différents et de deux mafias rivales qui « montent une affaire » comme vous dites et qui se marient !

– Ils faisaient leur vie ! C'est pas moi qui leur ai demandé de se rencontrer !

Il me défie du regard.

– Vous ne vous procuriez pas la drogue auprès de vos parents ?

– Non ! Sinon, ils m'auraient fait des prix d'enfer et j'aurais jamais pu avoir un peu d'argent de poche ! J'aurais même croulé sous les dettes !

– Ils ne vous envoyaient pas vendre la drogue ?

– Non plus ! Ecoutez, je ne sais pas ce que vous insinuez, mais vous pouvez d'ores et déjà considérer que mes parents et moi, on avait des affaires distinctes. Je ne leur faisais pas confiance, ils ne me faisaient pas confiance. Ils n'ont jamais été dans ma vie. Je n'ai jamais été acceptée dans la leur. Affaire réglée.

– C'étaient vos parents pourtant. Vous étiez leur fille.

Ok, ce matin, il veut m'attaquer sur mes parents. Très bien. Attends que je te raconte.

– J'étais un enfant qu'ils n'ont jamais voulu. Mon père m'a répété pendant toute mon enfance que je le gênais, que j'étais une mauvaise fille, que je n'étais pas de la famille ; ma mère m'a avoué avoir voulu avorté, ne pas savoir pourquoi je vivais, ne pas comprendre pourquoi je n'étais pas déjà partie me suicider. Alors, je vais vous dire : il n'y a aucun lien entre moi et mes parents.

– Pourtant, monsieur Van Hecke nous a affirmé que leur mort vous avait bouleversée. Il nous a dit que vous avez pleuré. On ne pleure pas pour des gens avec qui on n'a pas de lien.

U4 - CamilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant