— Il s'est passé beaucoup de choses ces derniers temps...

— Je vois.

Non, elle ne voyait pas. Mais j'imagine qu'elle se fichait un peu de mes problèmes. De toute manière, ce n'était pas comme si j'avais l'intention de m'ouvrir à elle. On se connaissait à peine, elle et moi. Je n'allais tout de même pas lui raconter ma vie.

— Toi, t'aimes ça vivre à Toronto ?

Comment détourner la conversation, signé Logan Campbell.

— Oui, c'est une belle ville. Assez animé, aussi.

— Et c'est différent de Montréal ?

— Pas vraiment. Mais il faut dire que j'habitais en banlieue de Montréal, donc c'est pas vraiment la ville. Je peux donc pas vraiment comparer, tu saisis?

— Euh, on va dire.

Gina a souri. Puis, son regard s'est porté sur l'horloge au-dessus de la porte principale. Elle a posé son balai.

— Il est tard, a-t-elle affirmé. Tu devrais rentrer, je vais terminer le reste.

— Tu es sûre ?

— Ouais, je suis une grande fille. Je vais me débrouiller.

— D'accord, alors.

J'ai retiré mon tablier, heureux d'en avoir terminé avec cette journée de travail. Ce n'était pas que je n'aimais pas cet emploi, seulement je passais mes journées dans le Bistro Nouveau. J'avais besoin de changer d'air. Rien de mieux que de rentrer chez soi dans ces moments-là.

Je me suis dirigé vers la salle des employés, où j'ai rapidement pris mon manteau ainsi que mon sac à dos. Je suis retourné à l'avant, pour saluer Gina. Elle venait tout juste de commencer à nettoyer les vitrines. Elle a levé les yeux dans ma direction, tout en continuant de frotter.

— Qu'est-ce que tu fais demain soir ? m'a-t-elle demandé.

— Pas grand chose. Pourquoi ?

— Il y a un film que j'ai envie de voir au cinéma. Puisque tu n'as rien de prévu, j'imagine que ça ne te dérangera pas de m'y accompagner.

J'ai haussé les sourcils.

— Je croyais que t'étais une grande fille.

— Oui, mais les grandes filles ont parfois besoin de compagnie.

J'ai souri.

— Euh, ouais, pourquoi pas. C'est pas comme si j'avais des plans, après tout.

— Et s'il-te-plaît, n'invente pas d'excuses bidons à la dernière minute.

Gina m'a souri.

— C'est promis, ai-je dit.

Elle a cessé de nettoyer les vitrines.

— Tu connais mon numéro.

— Ouais.

— À demain, alors.

— À demain.

Gina m'a souri une dernière fois, avant de se remettre au nettoyage du bistro. Je me suis éloigné, dépassant le comptoir, pour me rendre à la salle des employés. J'ai enfilé mon manteau et je suis parti sans dire un mot. J'ai sorti mon parapluie, histoire de me protéger de la pluie torrentielle que procurait cette tempête, en vain. Il y avait beaucoup trop de vent. Je me suis donc résigné à être tout trempé. En marchant jusqu'à l'arrêt de bus, je me suis mis à remettre en question la demande de Gina. Venais-je d'accepter un rencard ? Ça m'a frappé de plein fouet au visage. Un rencard. C'était aussi bête que ça. Et je n'avais rien vu venir, comme le dernier des imbéciles.

La théorie des cactusWhere stories live. Discover now