II.

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Axel.

La nuit rôdait encore sur la petite ville quand il s'est levé, les yeux clos, la bouche pâteuse et la tête encore pleine de rêves. Il a traversé son appartement, s'est lavé à l'eau froide, s'est habillé de gestes lents, consciencieux, puis a déjeuné seul à la table de la cuisine.

Il est parti, silencieux comme une ombre, marchant dans la pénombre et admirant le lever du soleil par delà les toits pentus.

Même s'il était encore tôt, la chaleur commençait déjà à le faire transpirer dans son teeshirt bleu. Il sentait l'air moite s'infiltrer contre sa peau, effleurer ses poils, remonter sur son visage ; et il soupira quand un courant d'air frais caressa sa nuque.

Il ne croisa qu'une voiture, un père de famille aux yeux creusés, qui lui adressa un signe de tête poli et disparut à l'horizon. Personne n'occupait les jardins, aucun cri d'enfant qui ne vienne troubler le silence et la quiétude de l'aube.

Il marcha tranquillement jusqu'au restaurant où il travaillait. Tous les étés depuis trois ans, il venait aider un ami en cuisine. Il aimait se confronter à cette ambiance sulfureuse, à cette agitation perpétuelle, aux cris, aux ordres qui fusaient dans toute la salle, puis voir, enfin, à travers le hublot de la porte, la salle grouillante d'activité et de joie.
Alors, à cet instant-là, il se sentait en paix, avec la sensation paisible d'avoir accompli.

Il arriva au restaurant. Il était situé en bord de mer, frappé du soir au matin par les vapeurs d'iode et de sel, si bien que la façade nord —celle qui s'exposait face à l'océan— était rongée par les embruns. Il trouva la clé sous le pot de fleur, alluma une à une toutes les lampes, jeta un regard satisfait sur la salle qui bientôt serait pleine ; puis s'habilla de la blouse réglementaire.

Il avait fini d'éplucher les légumes quand il fut rejoint par son ami. Ils préparèrent les desserts en discutant, pendant que le soleil se levait et que les serveurs arrivaient pour les saluer. Avant dix heures, tout était prêt. Le rush serait après, pour le service de midi.

Il sortit à l'arrière, et rejoignit une serveuse au teint basané. Il regarda la courbe de l'eau, les rouleaux d'atomes et de ions qui se balançaient en un rythme infini, et pensa que c'était beau, comme chaque fois qu'il venait là.

Quelques minutes plus tard, alors qu'il était rentré dans la tiédeur et l'agitation, un adolescent avec un livre plastifié passa sur la plage.

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