Espoir, quand tu nous tiens

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"Beaucoup diront que c'est stupide de s'accrocher à quelque chose qui nous fait du mal. Moi je dirais que c'est stupide d'abandonner quelque chose qu'on a toujours voulu."

Lundi

-Bonjour, souffle Béatrice, avant de tourner sur elle-même et de s'asseoir pour enfin croiser ses jambes.

Saylor se contente de cligner des yeux, incapable d'ouvrir la bouche.

L'impatience bouillonne en elle.

Une bonne heure est passée durant laquelle elle n'a pas détaché une seule seconde son regard de la fille aux cheveux rouges et aux jolies couleurs.

Béatrice porte toujours son sourire énigmatique et détient désormais autre chose d'intriguant.

Un livre.

Aux pages légèrement jaunies par le temps et à la couverture abîmée par l'écume du vent.

Saylor n'a jamais eu l'occasion d'en toucher un ni d'en lire.

Même si elle a perdu ses capacités de lecture du passé, elle aurait appris.

C'est ce qu'elle se murmure au coin du cerveau, témoignant son envie grandissante d'en  tourner les pages.

C'est un magnifique livre, vêtu d'argent et de rose, où rien n'est inscrit à part quelques petits mots tout en bas, à gauche.

Espoir, quand tu nous tiens - Béatrice Laforcs

- Il est de moi, précise Béatrice avant de poursuivre sur un : tu veux que je t'en lise un extrait ?

Saylor hoche la tête brusquement, sous le regard amusé de la fille aux cheveux rouges.

Elle a l'impression qu'elle va connaître quelque chose de privilégié et cela lui plaît.

- " Cette après midi là, le soleil se chamaillait avec les nuages qui s'éparpillaient peu à peu avant de former un de ces doux vents que Tabatha aimait tant. Celle ci se promenait, écoutant sa musique qui couvrait assez misérablement le son du vieux clocher, et elle fixait ses pieds. Elle pensait à son oncle parti trop tôt. Perdue dans ses souvenirs, Tabatha se rendit compte bien trop tard qu'elle s'était perdue, mais décida tout de même de continuer son chemin, assoiffée d'aventure et dotée d'un pressentiment curieux qu'on l'attendait quelque part, loin de ses problèmes. Elle déboucha bien vite sur cette ruelle toute grise, parsemée de lampadaires, où deux bancs vides s'exaspéraient du froid qui les rongeait. Mais, à y voir plus clair, ils ne semblaient pas si vides. Tout au bout d'un banc, une fille aux cheveux bleus nuit était endormie. Cela parut comme une évidence au yeux de Tabatha : c'est ici qu'elle devait être, là où seule se recueillait la lumière des lampadaires et la tristesse des gens seuls. Chez elle, il y avait trop de violence, trop de bouteilles d'alcool vides et de vêtements déchirés. S'asseyant près de la fille aux cheveux bleus nuit, Tabatha n'avait aucune idée de l'importance qu'allait représenter ce choix."

Béatrice finit sa lecture puis, sans attendre une quelconque réaction,  glisse son livre sous son chemisier et s'en va, accompagnée du regard insistant de la petite Saylor.

Son oncle, l'oncle de Tabatha ?

Son père, le père de Tabatha...

Elle est perdue. La fille aux cheveux bleus nuit, c'est elle. Mais, comment peut-on accorder une telle importance à son âme égoïste ?

A demain, hier.Where stories live. Discover now