2.1 : Vie au Ranch

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La jeune femme laissa le chagrin l'envahir. Certains jours, elle se sentait si seule. Elle avait été mariée. Deux mois !

Après cela, son mari s'était mystérieusement volatilisé. Personne ne l'avait jamais revu. Elle se souvenait de la tristesse et de la honte qu'elle avait ressenties à ce moment-là. En ville, on lui jetait des regards apitoyés. On chuchotait sur son passage.

Ses frères l'avaient soutenue. Ils hurlaient à tout-va qu'ils pendraient ce vaurien s'ils arrivaient à mettre la main sur lui. Mais ils n'avaient que seize et treize ans.

Cassie avait fait face. Comme après la mort de ses parents. Elle s'était endurcie et avait persévéré, s'isolant un peu plus avec le temps.

Depuis quelques mois, elle ne se rendait pratiquement plus en ville, et subvenait à ses besoins par ses propres moyens. Elle chassait pour se nourrir et cultivait un minuscule potager.

Les quelques cochons qui pataugeaient dans la boue, à l'écart du logis, lui permettaient d'empocher de l'argent régulièrement. Elle en vendait un ou deux chaque saison, et rangeait précieusement l'argent dans une boîte sculptée qui avait appartenu à sa mère.

Il y avait aussi les poules qui lui donnaient des œufs quotidiennement.

Elle enfila ses bottes, décrocha le manteau pendu sur la patère et sortit dans le petit matin.

C'était le printemps, mais le soleil ne parvenait pas encore à réchauffer la terre qui avait cruellement souffert de l'hiver.

Dans la cour, la jeune femme évita les ornières creusées par le passage du temps.

Elle entra dans la grange et récupéra le seau où elle déposait les restes de repas, les épluchures et autres nourritures qui servaient à nourrir les animaux.

Elle le transporta jusqu'à l'enclos des cochons, qui s'agitèrent dès qu'ils la virent. Ils émirent des grognements impatients, et la jeune femme dut en bousculer plusieurs pour accéder à la mangeoire.

Elle versa le contenu du seau et s'écarta rapidement. Quand ils étaient affamés, ces bestioles se transformaient en monstres et n'hésitaient pas à mordre.

Elle les surveilla un instant, puis s'éclipsa de l'enclos. Après avoir soigneusement fermé le loquet, elle tourna les talons pour s'éloigner de l'habitation. Elle chemina sur la pente qui menait à la forêt. Cette même forêt qui dissimulait le canyon où elle avait découvert l'étranger.

Ses pensées tournées vers lui, Cassie se demanda s'il allait survivre. Rien n'était moins sûr, vu son état. Pourtant, il s'avérait costaud et paraissait en avoir vu d'autres. Elle avait remarqué toutes les cicatrices qui jalonnaient son corps. Les minces lignes certainement dues à des couteaux. Elle avait passé les doigts sur les points rugueux mal cicatrisés. Combien de fois s'était-il fait tirer dessus ? Il y avait également les marques de fouet. Son dos en était constellé.

La jeune femme se dit que s'il avait survécu à tout cela, il serait peut-être assez robuste pour survivre à ses dernières blessures.

Elle l'espérait en tout cas. Elle ne souhaitait à personne de mourir ainsi, seul, au milieu de nulle part. Même à un inconnu.

Dans la forêt, elle déterra quelques racines et ramassa des glands et les pommes à moitié pourries qui étaient tombées d'un pommier au début de l'hiver.

Sa récolte sous le bras, elle rebroussa chemin d'un pas tranquille.

Elle leva le nez vers le ciel et huma l'air matinal. Le soleil avait du mal à percer à travers les nuages et la fraîcheur s'était installée. Il ne devait pas faire plus de cinq ou six degrés, et les rafales qui commençaient à déferler annonçaient une journée pluvieuse en perspective.

Cassie se dirigea à grandes enjambées vers son modeste potager, où elle récolta quelques légumes : betteraves, carottes, navets.

Les mains couvertes de terre, elle en profita pour désherber un peu et gratter la terre qui avait formé une fine croûte à cause du gel.

Elle revint dans la grange pour donner du foin et une pomme à sa jument, qui patientait sagement dans son box. Elle se promit de la promener dans la journée si le ciel ne devenait pas trop menaçant.

Elle sursauta au son d'un hennissement énervé derrière elle.

Elle caressa le cheval de l'inconnu.

— Tu n'as pas l'habitude de rester enfermé, hein toi.

La jeune femme s'amusa de le voir fourrer un nez empressé dans le seau rempli de victuailles.

Elle écarta le récipient et approcha une pomme de sa bouche. Il la goba sur-le-champ.

Elle enleva la couverture qu'elle avait étalée sur son dos la veille, et attrapa une brosse pour l'étriller. L'animal s'ébroua et racla un sabot sur le sol.

Hors-la-loi, tome 1 : Vaughn [AUTO-PUBLIÉ, 10% de lecture gratuite ici]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant