Ils n'ont même pas eu le temps de s'échanger trois mots que deux autres personnes se dirigeaient déjà, bras dessus dessous, vers la villa.
Roxane a directement reconnu Émile et Eglantine, et la jeune femme n'a pu retenir une exclamation en demandant si ces deux-là formaient un couple.
Bizarrement, le blondinet s'était posé exactement la même question au même moment.
Lorsqu'il est allé ouvrir aux deux nouveaux arrivants, une atmosphère de souvenirs est apparue.
Il leur a proposés de prendre place autour de la table de la salle à manger, comme dit dans le courriel.
Durant quelques instants, ils se sont souris, comme des inconnus et n'ont fait que parler de la pluie et du bon temps.
Heureusement, Sulivan a fait son apparition quelques minutes plus tard, seulement. Il portait un costume très propre et très classe, et était tout aussi souriant qu'il ne l'était quelques années plus tôt.

L'hôte de maison a gentiment proposé au dernier venu de s'installer à leurs côtés.
Durant un long moment, un énorme calme a plané au-dessus de ces cinq têtes que les années avaient changées.

   -Elle a répondu positivement à ton invitation, Tabitha?, a curieusement demandé Eglantine à l'égard de Carl.

Ce dernier a automatiquement baissé les yeux, à l'entente du prénom de cette fille qui avait été son amie durant quelques années.
Ils l'ont évidemment regardé avec de grands interrogatifs, ne comprenant pas la raison pour laquelle le garçon si dur qu'il était avait réagi de cette manière.

   -Tabitha ne viendra pas et c'est à ce propos que j'ai essayé de vous rassembler, s'est-il difficilement expliqué.

Personne n'a parlé. Puis, Émile a posé sa main décorée d'une bague sur le dos du trentenaire blond, comme pour l'encourager à s'exprimer.
Emile semblait avoir pris énormément de confiance en lui. Tout le monde se souvenait de lui comme étant un adolescent érudit, préférant cacher toutes ses connaissances au Monde et réfléchissant beaucoup avant de n'oser dire quoi que ce soit.

Carl n'est pas parvenu à ouvrir la bouche pendant trois secondes, préférant les regarder chacun à leur tour pour prendre un peu de courage, se sentir accompagné.

   -Tabitha s'est suicidée il y a un mois et demi, a-t-il recommencé avec courage. Je suis allé à son enterrement car je l'ai appris par son cousin que j'affectionnais. Il y a une semaine, en retrouvant le carnet d'hommage de son enterrement, j'ai repensé à cette après-midi de quatre-vingt-neuf. Je me suis alors dit que ça serait une bonne idée de vous revoir pour savoir comment les choses avaient évolué pour chacun de vous.

Personne n'a réagi au petit monologue que Carl avait pris le temps de faire, et ce sans même verser une larme. Ce dernier pensait que les autres s'étaient tous arrêtés d'écouter après les premiers mots. Oui, Tabitha s'était suicidée et ça lui avait fait le même effet qu'eux, amplifié deux fois.

   -Oh mon dieu!, s'est exclamé Roxane. Putain, j'en reviens pas! Je l'avais revue en début d'année et elle semblait épanouie.

   -Ça a toujours été bonne actrice. Elle vivait avec un jeune homme très bien mais ce dernier était soldat et a été tué en septembre. Ensuite, son père est décédé de vieillesse. Ne supportant pas cela, elle a préféré mettre fin à ses jours, alors qu'elle était enceinte de sept mois.

Le visage de la jeune femme qui avait réagi la première était devenu livide. Elle avait l'air surprise, étonnée et extrêmement triste face à cette histoire.
Carl a remarqué du coin de l'oeil qu'Emile avait rapidement confectionné le signe de croix, comme pour dire adieu à la jeune femme. Carl en a été étonné et s'est retenu pour ne pas regarder plus longtemps, se rappelant que sa mère était elle-même très croyante et avait tendance à faire le même genre de choses.

Tour de tableWhere stories live. Discover now