Chapitre 2

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ZED

Printemps

La sonnerie stridente du réveil met immédiatement fin à ma nuit de sommeil ; un coup d'oeil à mon portable m'indique qu'il est six heures du matin. Depuis peu, j'ai pris l'habitude de courir avant d'aller en cours. En général, je fais le tour du pâté de maisons et, si j'ai le temps, traverse le petit parc près de chez moi. J'aime le calme qui règne à cette heure de la journée. Seuls les plus courageux sont de sortie et le silence ambiant me permet de me vider la tête et de réfléchir un peu.
J'enfile un jogging et un tee-shirt blanc, je noue une veste autour de ma taille et chausse une paire de baskets. Le temps de me brosser les dents, je m'observe dans le miroir de la salle de bain. J'ai des cernes violacés sous les yeux, signe de la cuite d'il y a une semaine dont je ne me suis toujours pas remis, et une entaille profonde sur le haut de la pommette gauche, souvenir d'une bagarre que je n'ai pas provoquée. En passant le bout de mon index dessus, j'aperçois quelques cicatrices sur mes phalanges rougies. Je ne suis pas un garçon bagarreur mais je sais me défendre quand il le faut, même si j'essaye au maximum d'éviter les conflits.
Avant-hier, avec quelques potes on est tombés sur un groupe de dealers de mauvais poil. J'ai su par la suite qu'ils s'étaient fait arnaquer et je suppose que croiser des gars de la même université que ceux qui leur ont joué un sale tour n'a pas dû les enchanter. La soirée s'est conclue par une rafale de coups de poing et un joli bain de sang. D'où les cicatrices, et encore, je trouve que je m'en suis tiré à bon compte comparé à d'autres. Je me demande soudain ce que Tessa penserait de tout ça. Je ne l'ai pas revue depuis une éternité ; elle me manque. Puis l'image d'Hardin me revient à l'esprit et ma vision se brouille.
J'ai besoin de courir.

***

Lorsque je reviens à l'appartement, je suis crevé. Le manque de sommeil commence vraiment à se faire sentir et même la douche froide ne suffit pas à me revigorer totalement. J'enfile des vêtements propres, glisse mon ordinateur dans mon sac à dos et m'empare d'une pomme et d'une bouteille d'eau dans le frigo avant de sortir. Le mois d'avril est déjà bien entamé ; j'inspire un grand coup, laissant l'air frais pénétrer dans mes poumons, m'installe dans ma voiture et m'engage dans l'allée verdoyante. Il ne me faut qu'une dizaine de minutes avant d'arriver à l'université et cinq de plus pour rejoindre des potes qui attendent devant la salle de cours.
- Joli minois Zed, me lance un gars qui porte un nom qui lui va bien.
- Merci du compliment, Dick.
On se jauge un instant du regard, puis il détourne les yeux, préférant reporter son attention sur Mia, une nouvelle fraichement arrivée. Je crois qu'elle débarque du Canada mais je n'en suis pas sûr. Je ne me suis pas vraiment intéressé à elle, ni à aucune autre fille d'ailleurs, et ce depuis plusieurs mois déjà. Il m'arrive d'en trouver certaines jolies, d'autres juste bonnes mais je les oublie vite. Et puis il est vrai aussi que dans les soirées que j'ai l'habitude de fréquenter, on a vite fait le tour des filles bien. Les meilleures d'entre-elles sont prises et celles qui valent vraiment le coup ne participent tout simplement pas à ce genre de rassemblements. Il ne reste plus que les droguées et les nympho, pas tout-à-fait mon style. J'exagère à peine, croyez-moi.
Après l'histoire avec Samantha, je m'étais juré de ne plus me mettre en couple, de m'amuser autant que possible et de ne surtout plus tomber amoureux, pas une seconde fois. Ça fait trop mal quand ça s'arrête, surtout quand on apprend que sa copine a couché avec l'un de ses meilleurs potes.
Je secoue la tête pour me libérer des mauvais souvenirs et cligne des yeux plusieurs fois en me rendant compte que je fixe depuis tout à l'heure un point au sol. Tout le monde est déjà rentré, le cours ne va pas tarder à commencer. Juste avant de franchir la porte de la salle, mon portable vibre dans la poche de mon jean. Je suis surpris de voir le prénom de Tessa apparaître sur l'écran.

Ça te dit qu'on se voie ?

Ces sept mots suffisent à me faire sourire. Je m'étais promis de ne plus jamais rien ressentir pour une nana, et puis Tessa est arrivée. Depuis Samantha, aucune fille ne m'avait autant attiré que Tessa. Et je ne parle pas que du physique. Les rares fois où j'ai pu l'avoir pour moi tout seul, je ne voyais pas le temps passer. J'adorais nos ballades, nos sorties, nos discussions. Elle parvenait toujours à me rendre heureux, d'une façon ou d'une autre, parfois même sans s'en rendre compte.
Mais alors qu'une vague d'ondes positives m'envahit, je me rappelle avec amertume que les seules fois où Tessa se souvient réellement de moi sont lorsque Hardin lui fait du mal, qu'il fait une connerie ou qu'il la quitte. Ou les trois à la fois.
Je réalise alors avec tristesse qu'elle doit probablement ignorer que dans ces moments-là, c'est elle qui me souffrir.

***

A la fin de le semaine, je n'ai toujours pas répondu à Tessa. D'un côté, je rêve de la voir. Elle me manque beaucoup, surtout depuis qu'elle a changé d'université et qu'elle fait ce stage dans une maison d'édition. D'un autre, j'en ai marre d'être un pantin, un vulgaire jouet avec lequel on s'amuse quand ça ne va pas et qu'on jette ensuite.
Un nouveau texto de Tessa m'aide à me décider.

J'ai vraiment besoin de te voir.
C'est important.

La seconde d'après, je suis dans ma voiture.

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