— Merci, mon chou..., murmure-t-elle, absolument pas découragée.

Elle entreprend alors de me lécher le dos. Ça m'en colle des frissons de répulsion. Merde, c'est... dégueulasse !

Écœuré, je me lève et lui fais face. J'aurais mieux fait de m'abstenir. Le spectacle de cette brune vulgaire, au visage maculé de traces noires de mascara me coupe définitivement toute envie de remettre ça. Je secoue la tête en essayant de prendre un air désolé, histoire de lui faire comprendre que c'était cool, mais qu'on va devoir s'arrêter là.

— Allez, champion... tu vas pas t'arrêter en si bon chemin ? proteste-t-elle.

Comme je ne réponds pas, elle commence à se caresser sous mes yeux... à grand renfort de gémissements exagérés et en me lançant un regard qui se veut sensuel. Je reste figée de stupeur. Comment peut-elle croire que son cirque va réussir à me faire bander ? Cette fille n'a aucun réel intérêt, hormis une paire de seins géants – encore que j'aie dans l'idée qu'ils sont faux. Sérieux, entre mes jambes, il ne se passe rien, pas même le plus petit soubresaut. La seule envie qui me taraude, là, tout de suite, c'est de me rhabiller et fuir à toutes jambes.

Je lui fais un sourire crispé et entreprend discrètement de repérer où sont mes fringues. Mon boxer est au pied du lit et le reste un peu plus loin, près de la porte. Une bonne chose de faite. Dans le même temps, je me rends compte de deux choses : premièrement, il fait encore nuit d'après ce que je peux voir à travers les stores. Constat numéro deux, je me trouve dans une des chambres d'un motel miteux. J'espère au moins qu'ils prennent le soin de changer les draps dans cet établissement, je n'aimerais pas avoir à me débarrasser d'hôtes indésirables.

Putain. C'est juré, j'arrête de boire comme un trou.

— Bon... euh... je crois que je vais y aller.

La fille s'arrête net, sa bouche se tord de colère, et elle me fixe d'un air glacial.

— T'es sérieux, là?

— Ben... ouais.

Je crois que je ne me suis jamais senti aussi mal à l'aise devant une fille – à poil, qui plus est. Bien entendu, je ne me sens absolument pas coupable de lui fausser compagnie, mais clairement, vu le regard qu'elle me lance en ce moment, la dame fait un peu peur.

— OK. C'est toi qui vois, lâche-t-elle sèchement en se rasseyant sur le lit.

Elle attrape un paquet de cigarettes posé sur la table de nuit, en sort une et l'allume pendant que je me hâte de remettre mes vêtements. Je crois que je n'ai jamais été aussi rapide pour me rhabiller, mais j'ai besoin de sortir et respirer de l'air pur. Chose que je vais avoir tout le loisir de faire en attendant le taxi que je vais être dans l'obligation d'appeler. Je ne me souviens pas avoir vu de motel près de la boîte de nuit où je suis sorti, d'autre part, je n'ai aucune idée de l'endroit où je me trouve, ni de la distance avec le Paris.

— Bon, et bien, c'était sympa... euh...

C'est moche, je ne connais même pas le prénom de cette fille.

— ... Ruby, m'en affranchit-t-elle, tout en exhalant un épais nuage de fumée.

Je hoche la tête, incapable de trouver un truc sympa à ajouter. Je déteste me sentir aussi con. Alors je fais appel à toutes mes ressources, afin de lui donner l'impression d'avoir un type poli en face d'elle.

— Je... merci...

— C'est ça, merci. Oublie pas de poser les trois cent cinquante dollars sur la table en partant, conclut-elle sans me jeter un regard.

Ma mâchoire se décroche, je la ramasse avec le peu de dignité qu'il me reste.

— Les... trois cent cinquante... ?

— Tu crois que je bosse pour des cacahuètes, beau blond ? T'as profité de la marchandise, tu passes à la caisse.

Incapable de traiter l'information qu'elle vient de me donner, je sors l'argent demandé, le pose là où elle me l'a indiqué et sors de cette chambre d'un pas raide.

Putain, je me suis tapé une pute !

Bravo Hunter, t'as fait fort. La grande classe, y'a pas à dire.

Une chose est sûre, les conneries ça suffit. Je me suis bien amusé ; maintenant, il faut rentrer. Mais avant ça, il me faut quelques heures de sommeil et surtout une bonne douche. Je sors mon téléphone et le rallume. Je cherche des yeux le nom du bouge dans lequel j'ai passé une bonne partie de la nuit et appelle un taxi. Après avoir donné l'adresse et raccroché, je me mets à rire nerveusement.

Sérieusement ? Je viens de me taper une prostituée ? Si Casey apprend ça, il va se foutre de ma gueule pendant des semaines – que dis-je, des mois. Non, il vaut mieux garder ça pour moi, je ne suis pas sûr d'assumer ce qui vient de se passer.

Machinalement, je baisse les yeux vers l'écran de mon smartphone et remarque que j'ai six appels en absence et un message sur ma boîte vocale. Je connais le numéro qui y est affiché : c'est celui des parents de Casey. Apparemment, ils ont essayé de me joindre. Mais six fois ? C'est énorme ! Merde, c'est quoi ce bordel ? Même si je m'entends bien avec eux, ils ne sont pas du genre à m'appeler, sauf quand ils n'arrivent pas à joindre leur fiston. En vérité, ils ne sont même pas du genre à flipper si Casey oublie de leur passer un coup de fil deux semaines d'affilée. Je n'aime pas ça, et même pas du tout. J'écoute la boîte vocale, vaguement inquiet. Si Casey avait dû voir ses parents, il m'en aurait parlé. Quoi que, vu comme il est sur une autre planète en ce moment, il peut tout simplement avoir zappé...

C'est Jenny, la mère de mon meilleur ami, qui m'a laissé un message. Au son de sa voix tremblante, je me décompose et, alors que mon cerveau traite chacun de ses mots, je sais que je ne vais pas m'en remettre.

« Hunter... il y a eu un accident. Casey... Oh ! Seigneur tout-puissant... Casey nous a quitté. »

Il faut que je rentre. Je raccroche et range d'un geste mécanique mon téléphone dans ma poche. Tant pis pour le taxi. Je me mets à courir. Il faut que je rentre.


A tes souhaitsWhere stories live. Discover now