La liberté Rêvée

La magie d'un écran

        Mes mains sont pleines de pots de pop-corn et autres choses. Je retire mes lunettes puis les tend à Eugène alors que j'adresse un sourire à la caissière. Il paye avec l'argent que je lui ai donné. Mon sourire est large. Je suis sur un nuage alors que je regarde la liste des films sur le mur. C'est la première fois que je mets les pieds ici. En général, je vois les films en dvd ou par chance grâce à des connaissances, on me les envoie directement avant la sortie sur les écrans. C'est rare, mais parfois j'arrive à en obtenir. Je sautille alors que je vois celui que j'attendais avec impatience. Je lui pointe de mon doigt libre et il lève les yeux au ciel.

La foule est vaste mais on se fraye facilement un chemin, je dévore les friandises en regardant tout autour de moi. Les rangées de personnes devant chaque salle. Les enfants qui sautent d'un pied sur l'autre en trépignant d'impatience à découvrir le film. Je souris. A l'intérieur, je suis comme eux, une petite fille qui découvre pour la première fois quelque chose. Un peu comme le Caméléon dans la série. Oui, elle n'est pas de mon époque mais en 16 ans d'enfermement et sans amis, j'ai eu le temps de m'en trouver d'autres et ils s'appellent respectivement télévision et livres !

Eugène s'éloigne pour acheter nos places. Je m'installe sur un tabouret et je fixe les New-yorkais. Je rigole toute seule puis prend mon portable et fait quelques photos. Cette journée restera unique pour moi alors autant en profiter à fond et garder le plus de souvenirs !

—Salle 8 !

Il me tend mon billet et mes yeux se remplissent de larmes. Il m'observe avec incompréhension et je murmure avec timidité :

—C'est la première fois que je viens dans un cinéma...

Il écarquille les yeux puis m'adresse un large sourire avant de me tendre sa main.

—Alors autant en profiter un maximum, belle demoiselle !

Je rougis et glisse ma main dans la sienne. Il doit deviner que je tremble d'excitation car je sens une brève pression de son pouce. Mon regard se pose sur le sien puis j'avance en tenant contre ma poitrine les pots de gourmandises.

Je ne lâche pas l'écran des yeux. C'est si impressionnant, les sons sont amplifiés. Je sursaute quand l'image se rapproche de moi et j'entends rire. J'ai oublié que je porte des lunettes 3D et que ceci n'est pas réel. J'écoute le film, je ris par moment, pleure à d'autre. Je ne cache pas mes émotions, j'ai si souvent vu de films seule que ce n'est pas une honte pour moi. Pourtant, je sens par moment la main de mon guide se poser sur mon bras, comme pour me réconforter. Nos yeux s'accrochent plusieurs fois puis je détourne la tête, mon cœur bat rapidement. Je réalise que sa présence me revigore, pour la première fois, je regarde un film avec quelqu'un. Il me pique des pop-corn et je rigole. Mais on me jette des choses et je comprends que je me suis surement esclaffée un peu trop fort. Je rosis et Eugène me caresse la joue. J'esquisse un mince sourire puis reporte mon attention sur l'écran, ma main toujours dans celle d'Eugène.

Je saute sur place en quittant la salle. Je n'arrête pas de parler du film, des effets en 3 dimensions. Il ne dit rien mais me regarde et sourit. Je me calme et remets ma paire de lunettes.

—Tu veux aller faire quoi maintenant ?

—Je ne sais pas, mais j'ai un peu faim.

—Après tout le pop-corn que tu as mangé, se moque-t-il, en riant.

Je n'ose pas lui dire que j'avais l'estomac vide depuis la veille car mon agente m'a annoncé la pire nouvelle sur cette terre alors je boude. Il s'approche et secoue la tête en posant sa main sur son crâne.

—Je croyais que tu devais faire attention à ta ligne.

—Je n'ai pas envie aujourd'hui, avoué-je, en sentant les larmes me venir au coin des yeux.

Non, je ne peux pas repenser à ce que me réserve la vie une fois que cette journée sera terminée. Eugène m'étudie quelques instants et se gratte la mâchoire.

—Je connais un endroit qui va te plaire alors.

Je lève des yeux surpris sur lui et concède d'un signe de tête.