Sa jupe.

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Et comme tous les soirs, elle sortait exténuée de son travail.
Et comme tous les soirs, elle ne souriait pas en voyant son bus partir sans elle.
Et comme tous les soirs, elle s'asseyait sur le banc un air maussade et las accroché à son doux visage.
Et comme tous les soirs, elle ignorait les regards malsains des hommes.
Et comme tous les soirs, elle ignorait les regards méprisants des femmes.
Mais comme aucun autre soir, elle s'inquiétait en sentant une présence derrière elle.
Mais comme aucun autre soir, elle se demandait pourquoi cet homme la suivait.
Mais comme aucun autre soir, elle avait peur de la carrure du monstre pervers à ses côtés.
Mais comme aucun autre soir, elle pleurait.
Mais comme aucun autre soir, elle en avait assez.

Alors oui, elle criait. Elle criait de toutes ses forces, jusqu'à n'en plus pouvoir, jusqu'à ce que ses poumons lui ordonnent d'arrêter. Puis oui, elle se stoppait net, et se retournait vers l'homme. Et oui, elle lui disait de la tuer immédiatement en se jetant dans ses bras. Et oui le plus marquant c'était l'homme, qui n'avait pas bougé ne comprenant pas la situation.
Sortie de sa transe, elle s'excusait confuse. Et elle devenait rouge quand l'homme lui disait qu'il était son nouveau voisin de palier. Et elle partait en courant, lorsque que l'homme lui disait de faire plus attention la prochaine fois.

À peine rentrée, elle se mettait à pleurer de nouveau, ce qui était très rare. D'habitude intouchable, elle se révélait fragile, là, dans son pauvre appartement. À pleurer simplement pour une confusion. Elle se maudissait. Elle se disait qu'elle aurait pu réfléchir. C'était vrai, elle était habillée en jupe courte mais cela ne voulait pas dire qu'elle allait se faire agresser, si ? Et c'était vrai, l'homme était très proche mais cela ne voulait pas dire qu'il avait de mauvaises intentions, si ?

Qu'est-ce qu'elle se trouvait bête à avoir peur au moindre geste inhabituel, une froussade coincée dans sa routine, voilà ce qu'elle était.

Peut-être qu'elle avait raison d'avoir peur ? Après tout, sa jupe était courte, c'était normal qu'elle donne une image de femme ouverte. On ne pouvait pas en vouloir aux hommes de mal interpréter les signes, c'était de sa faute. Elle aurait dû réfléchir avant de mettre cette jupe, elle était courte, trop courte. Et puis quelle idée elle avait eu de mettre un chemisier serré qui laissait entrevoir sa forte poitrine. On voyait qu'elle avait de belles formes, et quand on a de belles formes, il faut les cacher. Alors elle aurait dû les cacher comme tous les jours. Et puis si les hommes la regardaient avec un air pervers, c'était de sa faute, elle l'avait provoqué en s'habillant de cette façon. Et si elle s'était faite agresser, elle n'aurait rien dit, parce que c'était elle qui l'avait cherché, elle était la seule à blâmer.
Et les regards de ces femmes ? Celles qui lui disaient que cette jupe la grossissait, elles devaient sans doute avoir raison. Après tout, un avis inconnu est un avis objectif, non ?
Non seulement, sa jupe était trop courte mais en plus, elle gênait les passants car elle la grossissait.
Les hommes et les femmes avaient raison de lui jeter ces regards.
Elle était gentille, elle ne voulait pas gêner les inconnus dans la rue, aussi, le lendemain elle mettrait un pantalon et un haut qui ne montrerait pas trop ses formes.

Les inconnus ont toujours raison, toujours.

Bonsoir toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant