Les Âmes maudites, livre I (Terminée)

Chapitre 47: Alicia.

Nous écrivons toutes les combinaisons possibles, sur la terre et la poussière du sol. Je pense que nous avons les bonnes dates, ce sont les plus importantes du monde de la sorcellerie. Justin les essaient toutes, au bout de la dernière, la cage se relève. Des sourires se dessinent sur nos visages amincis et cernés par la fatigue. Nous reprenons notre marche, en prenant le chemin de gauche.

Environ une heure plus tard, nous nous trouvons face à un ravin. Au moment ou nous voulons rebrousser chemin, un mur se forme derrière nous. Nous n'avons plus le choix, nous allons devoir sauter. Il y a au moins trois mètres entre nous et la terre de l'autre côté, et une cinquantaine de mètres en profondeur. Justin se propose de sauter en premier; la cheville foulée va l'handicaper. Il respire profondément, puis se met à courir; il atterrit sur ses jambes. Je décide ensuite de me lancer, je cours le plus vite possible, je me sens voler lorsque je suis au dessus de l'immense trou béant. Mes pieds touchent le sol, mais mon corps​ repart en arrière; j'entends Jade hurler. Justin se précipite vers moi, puis m'attrape par le t-shirt. Il me tire ensuite vers lui, je m'autorise enfin à respirer.

Rose, Emelynne et Suzie viennent de sauter, non sans difficultés. Il ne reste plus que Jade à passer. Son visage montre qu'elle est paniquée, elle n'ose pas y aller. J'essaie de l'encourager du mieux que je peux, elle ne m'écoute pas. Elle se décide enfin, ses cheveux roux bouclés s'envolant derrière elle. Lorsque je la vois dans les airs, je sais qu'elle ne va pas y arriver. Elle se raccroche à la terre avec ses mains, et Justin lui les prends pour l'aider. Je ne peux rien faire pour elle, je ne peux pas la toucher. Cette sensation d'impuissance me brise le coeur. Jade est en sueur, les yeux exorbités par la panique. Je lui crie qu'elle va y arriver, je la vois essayer de remonter, en vain.

Rose et Emelynne veulent l'aider, elles n'y arrivent pas. Je vois les mains de Justin glisser, il a de plus en plus de mal à la tenir. Je n'en peux plus, je sais que je vais nous brûler toutes les deux, mais sinon, je la laisse mourir. Je la préviens que je vais l'aider, elle panique encore plus à l'idée d'être brûlée. Je lui attrape le poignet, nous hurlons en même temps, des gouttes de sueur perle sur mon front. La brûlure est intenable, mais je résiste en pensant à la douleur de la perdre, je ne peux pas me le permettre. Nous la hissons sur la terre ferme, ensemble; je lui lâche la main le plus vite possible. Nous nous reposons quelques instants, puis repartons, en quête de ces colliers tant convoités.

Vers dix-neuf heures, nous mangeons un repas léger, une pomme et un morceau de pain. Nous n'avons toujours pas d'eau, je n'en peux plus, je me sens vraiment déshydratée; ma gorge est sèche, elle me brûle. Après avoir mangé, nous nous enroulons dans des couvertures, puis nous endormons immédiatement, épuisés par cette dure journée.

J'ai très mal dormi cette nuit, je me suis réveillée à plusieurs reprises; j'avais peur qu'une créature nous trouve. Nous mangeons, puis nous lavons rapidement. J'ai l'impression que nous sommes près du but, mon intuition se confirme après quelques minutes de marche. Nous venons d'arriver devans une grande allée enflammée, au bout, il y a une porte en verre. Derrière cette porte, je peux observer deux colliers. Une chaine argentée. Un pendentif avec une flamme, un pendentif avec une goutte d'eau. Les colliers. Les voir est comme un électrochoc.

La seule possibilité pour nous d'arriver aux colliers est de passer dans les flammes. Justin est sûre que l'on doit pouvoir faire autrement. Nous observons autour de nous, cherchant un indice. Je cherche des symboles qui pourrait nous aider, des leviers, des passages souterrains, je ne trouve rien. Je m'éloigne un peu de l'allée, la solution se trouve peut-être plus loin.

-J'ai trouvé quelque chose, s'écria Justin.

Je cours dans sa direction, il est à l'autre bout de l'endroit où je suis. J'arrive toute essoufflée, Justin me sourit. Il me montre une gravure profonde, assez épaisse. Elle représente une flamme dans une goutte d'eau.

-Je vais faire le contour de la flamme, et toi la goutte. Il faut faire attention de ne pas se brûle, me dit-il.

Je hoche la tête. Je passe mon doigt dans la gravure, au moment ou nous avons finis, le crépitement des flammes cesse. Nous nous regardons, un immense sourire aux lèvres. Nous nous précipitons vers l'allée, puis poussons la porte de verre. Je suis émerveillée, je ne sais pas quoi faire. Je me dirige lentement vers un des colliers, comme si j'étais dans un autre monde.

Je prends dans mes mains la chaine, avec au bout, le pendentif, une petite flamme dansant à l'intérieur du verre transparent. Je l'accroche autour de mon cou, une douce chaleur m'enveloppe. Je me jette dans les bras de Justin, des larmes de bonheur coulent sur mon visage. Je touche sa peau, son visage, ses mains, sa nuque. Je mets ma main dans ses cheveux, je sens son souffle sur mon cou. J'ai envie de l'embrasser, mais je sais que les autres nous observe. Mon coeur bat la chamade, j'ai dut mal à respirer tellement je suis heureuse. Je ne veux plus me détacher de lui, je suis bien dans ses bras. Nous finissons par rompre notre étreinte, nous nous tenons la main, mes doigts entrelacés avec les siens.