XVI. Damoiselle Rose, b(a)isouillant dans les bois

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– Merci, murmura-t-elle.

Son sauveur lui répondit par un léger sourire, qui étira ses lèvres en cette expression que la rouquine aimait tant admirer sur ses traits. Elle se détendit, et se laissa aller à penser qu'elle aurait pu passer l'éternité dans ces bras-là, même si cette éternité devait se révéler passablement humide – rivière oblige – et fournie en alligators et autres bestioles peu ragoûtantes. Elle appréciait de se trouver là, avec lui, proche de lui. Au loin, les voix de Chardon, Valerian et Edelweiss s'éteignaient peu à peu, à mesure que leur poursuite de la pirogue fuyarde les entraînait plus loin.

Rose étouffa un rire, s'efforçant de refouler la vague de bonheur que la submergeait malgré elle. Elle détacha l'une de ses mains de la nuque d'Olivier, pour s'en aller taquiner ses mèches brunes du bout des doigts, écartant doucement celles qui masquaient son regard. Comme s'il avait pressenti la tournure que prendraient les évènements, le jeune homme resserra sa prise sur sa taille, réduisant d'autant le mince espace qui subsistait entre eux. Rose ne se laissa cependant pas immédiatement engloutir par ses pulsions, continuant à écarter les mèches rebelles, avant de descendre gentiment, ses doigts suivant la ligne de la mâchoire de son compagnon, caressant ses lèvres fines du bout de l'index, appréciant le souffle léger qu'elle sentait sur le dos de sa main. Ils étaient seuls. Seuls tous les deux, abandonnés au milieu de nulle part, s'appréciant trop pour résister à la tentation.

– Comptez-vous me torturer, Rose ?

La jeune femme approcha son visage du sien, sensuelle.

– Peut-être bien, lui susurra-t-elle à l'oreille, en profitant pour en mordiller le lobe, avant d'oser parsemer de baisers la ligne de sa mâchoire.

– Je dois avouer être tenté de vous laisser faire, laissa échapper Olivier dans un soupir, tandis que l'une de ses mains abandonnait la taille de Rose pour remonter le long de son dos, plaquant plus encore le chemisier détrempé de la jeune femme contre sa peau brûlante.

Rose sourit, s'écarta un peu afin de pouvoir plonger ses yeux droit dans ses prunelles si chaleureuses. Elle sentait son cœur battre la chamade dans sa poitrine, comme dans une représentation rythmique du Boléro de Ravel.

– Olivier... chuchota-t-elle.

– Rose ? sourit-il, répétant leur manège de la veille, dans la voiture.

– Je vais vous embrasser maintenant. Vraiment.

Elle voulut s'avancer doucement, mais il la prit de vitesse, rivant ses lèvres aux siennes dans un baiser passionné. Une seconde durant, ils demeurèrent tous deux immobiles, trop émerveillés pour briser la magie de l'instant – et attendant sans doute de voir si aucune calamité ne leur tombait sur la tête pour interrompre ce moment-là comme cela avait été le cas les fois précédentes. Le miracle eut lieu : le silence demeura. Rose ferma les yeux et se laissa fondre au sein des bras d'Olivier.

Elle pressa plus encore ses lèvres contre les siennes, crispa sa main sur sa nuque tandis qu'il la maintenait toujours serrée contre lui, et se laissa aller à profiter du baiser. Celui-ci débordait d'un désir trop ardemment contenu, mais n'avait rien à voir avec la violence de celui qui avait uni Rose et Aguaje. C'était un baiser doux et alangui, quoique pas chaste pour un sou.

Ce fut Olivier qui rompit le baiser, pour mieux serrer la jeune femme dans ses bras. Il semblait ému, décontenancé et submergé d'émotions à la fois.

– Depuis le début, Rose, murmura-t-il. Depuis que je t'ai vue, ce courage, cette passion qui brûlait dans tes yeux m'ont brûlé d'un feu ardent. Tu portes si bien ton nom ! Tes épines ne cessent de m'écorcher, mais je ne peux me détourner de toi... de ta beauté, de ta force.

Pétales de Rose et rameau d'OlivierWhere stories live. Discover now