XV. Damoiselle Rose, en contre-attaque avancée

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– Mais... protesta Chardon lorsqu'elle fut enfin convaincue qu'il s'agissait bien de la vérité que Valerian s'efforçait de lui faire entrer dans le crâne depuis une bonne dizaine de minutes – et qui en paraissait bouleversée. Mais, si tu es vraiment... humain, tu... Clémentin et Marjolaine ne sont pas tes parents. Ils ne peuvent pas...

Elle avait prononcé ces mots d'une traite, consciente de remuer ce qui devait représenter un traumatisme violent et mal cicatrisé pour Valerian. C'était bien la première fois que Rose la voyait se soucier réellement des sentiments du jeune homme.

Le trouble engendré pas la révélation de Valerian ne s'arrêta pas de sitôt, les filles s'efforçant de comprendre la vérité derrière son étrange secret. Gaïa semblait une fois encore se trouver au centre de ces odieuses manigances, mais ses motifs, comme de coutume, demeuraient obscurs. Quel besoin entretenait l'esprit de l'Île de conserver un humain au sein de ses pairs, de dissimuler sa véritable nature derrière sorts et enchantements, et d'aller jusqu'à tromper un couple de parents sur le lien de filiation qu'ils entretenaient avec leur soi-disant fils ?

– Peut-être qu'ils savaient... Clémentin et Marjolaine.

La réplique d'Edelweiss jeta un nouveau froid sur l'assemblée, et d'un commun accord, les jeunes gens décidèrent d'éluder le sujet pour le moment, ne serait-ce que par respect pour Valerian. Tous les regards se rivèrent à nouveau sur Olivier, leur sujet d'expérimentation suivant. Ce dernier n'en menait pas large, encore occupé à assimiler les révélations de Rose. Il semblait complètement assommé, incapable de formuler ne serait-ce que la plus petite protestation. Rose voulut poser une main compatissante sur son bras, mais se ravisa au dernier moment. Sans doute valait-il mieux lui laisser un peu de temps de digérer la nouvelle. Et à dire vrai, elle aussi n'avait rien contre une minute ou deux pour souffler. Les révélations de Gaïa, suivies de celles de Valerian, lui faisaient l'effet d'un piano à queue tombé du quinzième étage sur sa pauvre tête. Elle n'osait même pas imaginer ce qu'il devait en être pour Olivier, et comprenait soudain beaucoup mieux le caractère distant dont avait fait montre Valerian ces derniers mois.

– Je... murmura finalement Olivier, la tête basse. À supposer que tout cela soit vrai – et même avec toute la bonne volonté du monde, c'est dur à avaler –, je crois que je vais aller faire un tour.

Il se remit sur pieds et descendit prudemment l'échelle de corde, sous l'œil inquiet de Rose, qui craignait qu'il ne manque un barreau et se fasse mal en tombant. Heureusement, il n'en fut rien. La jeune femme nota soigneusement la direction dans laquelle disparut Olivier, se promettant de le rejoindre d'ici une dizaine de minutes, puis se reconcentra sur les trois personnes restantes. Un malaise indéniable flottait dans l'air, ternissant l'ambiance joyeuse de ce qui avait été leur cabane d'enfants.

– Ne sois pas désolée, Rose, marmonna Valerian. Je ne vois pas comment tu aurais pu lui annoncer ça moins brutalement. Je crois qu'il n'y a pas de bonne manière d'apprendre une chose pareille.

La rouquine réagit par un simple signe de tête horizontal, qui fit tressauter ses boucles rousses sur ses épaules.

– Je crois qu'il est en mesure de l'accepter, murmura-t-elle. Et toi, comment te sens-tu ?

Valerian haussa les épaules, n'ayant jamais été très doué pour s'épancher sur ses sentiments. Rose, Chardon et Edelweiss prirent sa réaction pour un signe encourageant, et décidèrent d'un commun accord de poursuivre leur débat.

Rose raconta ainsi son entrevue de la veille avec Gaïa, les multiples visages qu'empruntaient cette dernière – la vieille femme cloîtrée dans le grenier, Janvier, la clarinettiste indienne – et termina en révélant la véritable nature de l'ancêtre, ce poids énorme qui faisait d'elle l'esprit de l'Île tout entière. Terra mater.

Pétales de Rose et rameau d'OlivierOnde as histórias ganham vida. Descobre agora