Chapitre 1 Je n'ai rien. Juste moi, et ma réflexion

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   Je m'avance silencieusement, approchant à pas de loup de ma proie. Le cerf se dresse majestueusement devant moi, paisible. Il ne se doute pas une seule seconde que bientôt, la vie le quittera. Je suis trop silencieuse pour ça.

   Il penche la tête, après avoir regardé à droite et à gauche, pour s'assurer qu'aucun prédateur ne le chasse, et boit. Je m'avance encore, me jugeant pas encore assez proche. Je glisse sur le sol de la forêt, effleurant les feuilles mortes qui jonchent le parterre.

   Ça fait des années que je chasse pour ne pas mourir de faim. Je n'ai pas d'autre choix, puisque je suis seule, livrée à moi-même. Si je veux survivre ici, près de Winterfell, je dois savoir me débrouiller. Car contrairement à tous ces rois, reines, princes et princesses, à tous ces hommes et femmes qui ont chaque jour un poulet de 4kg pour eux tout seul, je n'ai rien. Juste mon arc et mon carquois, mes flèches, et ma réflexion. Et c'est tout ce qui compte.

Parfois, je me sens seule, dans ces bois, loin de la civilisation, loin de tout. J'aimerais quelquefois avoir une présence auprès de moi, quelqu'un qui m'aide à me nourrir, me protège quand je me fais agresser, qui me conseille et me réconforte quand ça ne va pas. Mais je me dis aussi que ce n'est pas plus mal comme ça...

Quand un humain est en groupe, il se croit supérieur aux autres, et bien souvent, fait souffrir quelqu'un. Je n'ai pas besoin de ça. Alors je me contente de Mystic, mon loup géant.

Je l'ai rencontré il y a seulement 3 ans, alors que je cherchais un abri pour la nuit. Il y avait une tempête énorme, la neige tombait à gros flocons. Je ne voyais pas à 2 mètres devant moi. Mais j'avançais, en quête d'un abri, glacée. Mes vêtements étaient trempés.

Plus le temps passait, plus la tempête se faisait forte, et j'ai été contrainte de m'arrêter, pour ne pas me perdre, même si je l'étais déjà sûrement depuis longtemps. Je m'étais assise au pied d'un arbre, recroquevillée sur moi-même, tremblante.

   Lorsque je m'étais réveillée le lendemain, j'avais sentis quelque chose de chaud et doux contre moi. J'avais alors ouvert les yeux et avais découvert avec étonnement une louve, aussi blanche que la neige. Elle ne dormait pas, se contentant de me fixer. Son regard... Je m'en rappèlerais toujours. C'était un regard vert émeraude, brillant, plein d'intelligence. Nos regards se sont croisés et il s'est passé quelque chose. C'est comme si un lien de confiance s'était établi.

  Elle s'est levée et a commencé à partir. Je croyais qu'elle allait m'abandonner, comme l'avait fait ma famille, mais ça n'a pas été le cas. Elle s'est retournée et m'a attendue. Alors je me suis levée à mon tour, et je l'ai suivie.

  Elle m'a conduit jusqu'à sa tanière, et lorsqu'on s'est approchés de l'endroit, j'ai entendu de petits gémissements. Et quand je l'ai ai vus, un sourire s'est dessiné sur mon visage. Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas souris. Mais j'étais heureuse. Cette louve m'avait acceptée dans sa famille, avec ses deux louveteaux. L'un noir comme l'ébène, l'autre blanc comme la neige.

  J'étais restée avec ces loups géants, je les avais vus grandir, j'avais chassé avec leur mère pour eux, puis je les avais vus chasser pour la première fois. C'était devenu ma seconde famille, même si ce n'était que des animaux. Après tout, eux, ne me faisaient pas souffrir et m'acceptaient comme j'étais. J'avais déjà fait ces rêves, ou devrai-je plutôt appeler cela des cauchemars, et Grace, la mère des loups, m'avait toujours réconfortée. De même pour Mystic et sa sœur, Cora, même si elle aimait moins les câlins.

  Et puis, du jour au lendemain, tout avait basculé. J'étais à la chasse avec Grace et ses petits, quand ils avaient débarqué. Une bande de garçons, un peu plus âgés que moi, heureux de vivre, un peu trop même. C'est ce qui avait causé le malheur qui nous avait frappés.

  Ça faisait quelques jours que je faisais ce rêve, ce rêve où Grâce nous protégeait contre des garçons, ce rêve où elle mourrait devant nous, sans qu'on ait le temps de l'aider. Et voilà qu'il s'était réalisé. Et je n'avais rien pu faire.

  Je m'étais enfuie avec Mystic et Cora, abandonnant Grâce. Depuis ce jour là, je haïssais mon don plus qu'avant. Et pire que ça, je me haïssais.

   Mes deux loups m'accompagnaient partout, on ne se lâchait pas d'une semelle, quoi qu'on fasse. Cette épreuve nous avait rapprochés tous les trois.

  Ainsi, ils étaient là quand je chassais. Je tourne la tête pour les voir accroupis un peu plus loin, fixant le cerf, qui ne se doute de rien. Je reporte alors mon attention sur ce dernier.

Je suis assez proche maintenant. Je prends alors une flèche dans mon carquois et lève mon arc. Lorsque la flèche glisse contre la bande de l'arc, un petit frottement se fait entendre.

Le cerf redresse subitement la tête. Je grimace. Il a dû entendre. Je ferme un œil, inspire, vise, bloque ma respiration, et tire. La flèche vient se planter dans sa tête, le tuant d'un coup. Cette fois, je n'aurais pas besoin d'achever l'animal.

   Alors que je me levais pour aller récupérer ma proie, mes loups à mes côtés, la tête me tourne subitement. Oh non, pas maintenant... Je commence à trembler et à voir flou. Puis je suis prise de convulsions, et ensuite, trou noir. Enfin, du moins, jusqu'à ce que ma vision m'apparaisse...

Nightmares | GOTWhere stories live. Discover now