II. Damoiselle Rose, au bal égarée

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Puis, avant même que Rose ne puisse vraiment réaliser ce à quoi elle venait d'échapper, il tourna les talons et s'engouffra à nouveau dans la foule, rapidement suivi par ses deux acolytes simiesques.

Seule et tremblante dans la semi-obscurité, Rose sentit ses jambes la lâcher. Deux mains puissantes vinrent cependant enserrer sa taille pour la maintenir sur pied, lui évitant une chute qui se serait sans doute avérée douloureuse – sans compter que l'herbe aurait indéniablement taché sa belle robe claire.

– M... Merci, balbutia-t-elle.

– C'est tout naturel. Je suis toujours partant lorsqu'il s'agit de contrarier Janvier.

La voix de l'inconnu n'avait plus rien de monocorde à présent, laissant filer une pointe d'ironie tandis que son souffle, si proche, effleurait la nuque de Rose. Elle se demanda si le comportement convenable, pour une jeune femme de son rang, consistait à s'évanouir dans les bras de son sauveur, mais son amour-propre l'en empêcha, tout comme le souvenir d'Edelweiss et Chardon, qui ne manqueraient pas de s'inquiéter si elle ne refaisait pas son apparition en temps et en heure.

Se décidant plus ou moins maîtresse d'elle-même, Rose finit par pivoter sur ses talons, sans se dégager de l'étreinte serviable de son sauveur pour autant. Elle découvrit ainsi un visage jeune – peut-être un an ou deux de plus que les vingt ans qu'elle comptait elle-même – à demi dissimulé sous une masse sombre et désordonnée de cheveux bruns. Grand et dégingandé, il dominait Rose d'une bonne tête et demie – quoique la demie soit sans doute plutôt due à sa tignasse qu'à sa taille élancée. Il portait lui aussi une tenue de soirée, mais son nœud papillon était de travers, et il avait délaissé la veste de son costume pour demeurer en simple chemise, aux manches négligemment retroussées.

– Je vous ai vue avant, qui profitiez du jardin, expliqua-t-il en reculant légèrement, visiblement gêné par la proximité du visage de la jeune fille. Mais vous vous êtes esquivées sans me laisser le temps de vous saluer correctement – et de vous informer que ce cher Janvier avait lancé ses troupes sur vos talons. Rose, c'est cela ?

L'interpellée opina du chef, retrouvant sa contenance maintenant qu'il lui paraissait avoir repris l'ascendant – c'était lui qui semblait embarrassé à présent, non plus elle.

– Et vous, me donnerez-vous également un prénom à murmurer ? osa-t-elle déclamer.

– Volontiers. Cela vous permettra d'ailleurs de constater que nous partageons un point commun : nos prénoms font tous deux référence à des plantes. Je m'appelle Olivier.

Il lui offrit une tentative de sourire – un peu timide, que Rose estima charmant, avant de se rappeler qu'elle devait toujours mettre la main sur sa sœur cadette avant que celle-ci ne puisse s'avancer dans l'exécution de quelque plan machiavélique dont elle avait le secret.

– Vous allez me trouver bien ingrate, soupira-t-elle, mais je vais devoir vous laisser. Il faut absolument que je retrouve...

– J'espérais vous demander une danse. Juste une.

Le jeune homme avait prononcé les mots avec précipitation, comme s'il s'agissait de tenter une action désespérée. Sous le regard inquisiteur de Rose, il eut toutefois vite fait de retrouver sa contenance, et porta une main à son visage pour remettre en place des lunettes qui ne se trouvaient pas là, dans un geste un peu nerveux.

– Pardonnez-moi, grommela-t-il de cette même voix lasse dont il avait usé lors de son entrée en scène. Je m'en voudrais de vous détourner de vos obligations.

– Une danse, reprit Rose. Cela me paraît une demande raisonnable étant donné le mauvais pas dont vous m'avez tirée.

Elle lui tendit sa main gantée, et apprécia le contact de celle d'Olivier lorsqu'il s'en saisit, sans précipitation. Rien d'inquiétant ici, contrairement à sa confrontation avec Janvier. Tout ceci ne constituait rien d'autre qu'un gentil manège, que de sincères remerciements. Ou du moins Rose en était-elle persuadée.

Olivier l'emmena vers la piste, mais changea de direction au moment où ils allaient pénétrer dans la masse mouvante des danseurs, pour l'entraîner à nouveau vers l'obscurité.

– Où m'emmenez-vous ? murmura-t-elle en réprimant un sourire.

– Voici une impatience toute féminine... Attendez un peu.

Rose progressait à petits pas derrière lui, savourant le contact ténu de leurs doigts entrecroisés. Ils contournèrent la scène où se produisaient les musiciens, pour trouver refuge sous les longues tiges pendantes d'un saule pleureur, lesquelles taquinaient le croissant de lune dans la petite mare attenante.

Rose sentit son cœur se serrer lorsqu'Olivier écarta le feuillage pour lui frayer un passage, mais résolut de se taire et ravala les quelques larmes cruelles qui lui piquaient les yeux. Si sa soirée se trouvait irrémédiablement gâchée par la chasse à l'Edelweiss – ainsi que la nommait Chardon – elle entendait profiter de ces instants volés. Elle laissa Olivier se placer face à elle, esquisser une menue révérence et s'emparer à nouveau de sa taille.

– Rien qu'une danse, lui rappela-t-elle d'un air faussement sévère.

– Une seule, et je considérerai votre dette payée. Mais je demeurerai à votre service si vous en souhaitez une seconde.

Le visage d'Olivier adoptait des expressions plus énigmatiques dans la pénombre, et sa voix égale empêchait Rose de lire en lui aussi bien qu'elle l'aurait souhaité. Elle se fia donc à ses sensations, appréciant le contact de leurs deux corps malgré la chaleur de cette nuit d'été, le laissant la guider dans une lente ritournelle. Elle ne tarda pas à remarquer que le jeune homme n'avait rien d'un bon danseur. Il manqua de lui écraser le pied une première fois, et se confondit en excuses à la deuxième. Rose ne répondit que par un éclat de rire.

– La pénombre devait dissimuler mes talents médiocres en la matière, mais je crains que cet artifice ne soit pas suffisant pour parer à ma maladresse, pesta-t-il doucement à l'oreille de sa cavalière.

– Je suis certaine que vous possédez d'autres qualités, lui chuchota Rose en réponse.

– Certes. Je construis de merveilleuses structures en allumettes et n'ai pas mon pareil pour assaisonner le canard à l'orange. Mais en règle général, cela n'impressionne guère la gent féminine.

Il lui offrit un nouveau sourire en coin, qui fit valser le cœur de la jeune fille dans sa poitrine, tant et si bien qu'elle craignit un moment qu'il ne s'en aperçoive, tellement ils se tenaient proches l'un de l'autre. Puis la musique cessa, et avec elle la magie de l'instant. Rappelée à ses obligations, Rose brisa leur étreinte, à regret, et recula de quelques pas.

– Merci encore, murmura-t-elle. Grâce à vous, cette soirée si mal commencée s'achève sur une note exquise.

Olivier haussa un sourcil moqueur, sans doute pour dissimuler son trouble. Il laissa ses doigts se perdre le long de l'une des boucles rousses de Rose, mais ne chercha pas à la retenir, fidèle à sa promesse. La jeune femme s'enfuit sans se retourner, abandonnant son sauveur dans les ombres du saule.

***

Genèse 2.0

Susi dit : Il est tout trouvé le scénar : la fille, ben elle s'inscrit au fan club de Francis Lalanne pour quand même vivre sa passion, tu vois, pis là elle rencontre le président du fan club, et il est juste trop beau et tout et c'est le coup de foudre. Sauf que la méchante cousine, ben elle lui montre l'intégrale des disques de Francis Lalanne, et du coup, ben le Président il décide de sortir avec elle quoi

Susi dit : Et là, c'est dur tu vois

Spes dit : Déjà faudrait deux filles ou deux mecs, pour l'hésitation tu sais

Spes dit : J'ai quatre meuf, laquelle je choisis ? :P

Susi dit : Un mec, cinq filles, mieux !

Susi dit : Ou le contraire... une fille, cinq mecs ! Ça me plaît plus !

Pétales de Rose et rameau d'OlivierWhere stories live. Discover now