De Magenta à Prune (41. à 45.)

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41. Magenta

J. avait envie de continuer. Plus de sang. Plus d'expériences. Il prit une fourchette du tiroir de sa cuisine. Il fonça dans la chambre où étaient détenus les cobayes.

Plus de mort.
Il en choisit un et enfonça violement le couvert dans sa chair. Il hurla. Personne n'osait lui venir en aide. Il recommença plusieurs fois. Du sang lui gicla au visage. Le cobaye pleurait. Son visage était tordu de douleur et de peur.

Du sang, du sang, du sang.

Encore plus.

Il la lui planta dans le coup et appuya sur la blessure ainsi formée. Il fut aspergé par le liquide rouge.

Plus de rouge.
Plus de sang.

42. Terracotta

J. sentait son sang bouillonner. Comme avant. Comme toujours.
Il se laissait aller. Peu importe. Il devait tuer cinquante cobayes de cinquante manières différentes. Ce n'était pas si compliqué que ça. Toutes les méthodes étaient les bonnes.
Il attrapa une cobaye, et mit sa main autour de son coup. Il fut légèrement blessé par le collier qu'elle portait. Peu importe.

Il ne ressentait plus la douleur.

Il se sentait invincible.

Il la secoua tout en resserrant son étreinte. Elle tentait de le faire retirer ses mains en le griffant. Pour la calmer, il la frappa violement au visage. Sa tête devint bleutée, ses yeux se fermaient. Seule sa bouche bougeait encore. Elle s'ouvrait, se fermait, comme un poisson, ou comme un clown qui tentait d'imiter grossièrement quelqu'un. Il se calma quand il n'entendit plus le sifflement de sa respiration.

Plus que huit expériences.

43. Zizolin

J. devait se calmer. Il dormit pendant longtemps. Ses rêves étaient d'une noirceur intense. La mort, la vie, la folie, tout cela se mélangeait, comme de la peinture sur une palette.

Rouge. Sa vision était brouillée par le sang, ce sang d'un rouge profond.

J. s'était enfin décidé à enterrer les cadavres. Il y passa toute une après-midi à creuser les trous. Sans même s'en rendre compte, il en creusa un en trop.

Il eut une idée. Il n'avait pas envie de le reboucher alors il alla chercher un cobaye. Il le jeta à l'intérieur du trou béant. Ça serait plus rapide. Il n'aurait même pas besoin de lui creuser sa tombe. Son dernier souffle sera dans le lieu qui le garderait pour l'éternité. Bel endroit pour mourir, après tout.

Il prit des palettées de terre et la jeta sur son visage. Il tenta de se relever, mais J. lui donna un bon coup de pelle sur la tête, de sorte qu'il fut étourdi pendant quelques minutes. Ces quelques minutes lui suffirent pour le recouvrir. Il voyait la terre bouger à l'endroit de ses bras, de sa tête et de ses jambes. Alors, il tassa un peu le tout puis continua. Il fallait que le sol soit bien plat pour ne pas attirer l'intention. Même une fois tout ça fini, il entendait des cris étouffés. Il se mit à pleuvoir.

Tant pis, le cobaye mourrait seul. Il ne serait pas là pour l'accompagner. Dommage.

44. Passe-velours

J. avait toujours aimé le cirque. C'est donc tout naturellement qu'il se résolu à essayer le lancé de couteaux. Ça ne serait pas bien compliqué. Il aurait besoin d'un cobaye accroché à un mur, de quelques couteaux de lancés (qu'il avait déjà récupérés) et d'un peu d'adresse. Il ferait son tour devint les autres cobayes qui seraient son public.
Il n'avait jamais aimé être vu. Il voulait seulement que ce soit leur dernier spectacle.
Alors, il prit un cobaye masculin d'une corpulence normale pour que cela n'influence pas ses lancés et envoya un premier couteau.

Celui-ci se planta très loin de sa cible. Cible qui fermait les yeux à chaque lancé. Quand il ne s'essayait pas à cette pratique, celui-ci se débattait et criait. Après plusieurs jets sans conséquences, un des projectiles lui arriva à la jambe. Il détacha presque son bâillon tant son cri était puissant.

Il remit en place le morceau de tissu et recommença. Il voulait que le cobaye ait peur. Il voulait que le cobaye pense que chaque lancé était son dernier.

Il voulait faire durer le plaisir. Il voulait lire la peur sur son visage. C'était ça le meilleur dans ces expériences. Il examinait les façades qu'il n'avait pas.

Un deuxième jet lui arriva dans le bras. Un autre dans le ventre. Sa tête, trop lourde, penchait. Jusqu'où allait-il tenir ?

Mais il semblait ne pas vouloir atteindre ses limites. A chaque lancé, il bougeait les bras ou les jambes de sorte que les lancés atteignent son corps. Voulait-il mourir ou aimait-il souffrir ? Qu'importe.

Ou alors, il avait comprit. Il avait comprit l'issu de ce test. La mort. J. avait presque envie de le laisser partir pour ça. Mais, s'il était d'accord, pour être testé, autant accomplir sa dernière volonté.

Il lui infligea le coup fatal. Il lança le couteau dans sa tête. Celle-ci retomba lourdement, le projectile trônant sur son front.

Il se retourna vers son public. Certains avaient détournés leur regard. D'autres examinaient les yeux pleins d'effroi.

Il quitta la pièce, laissant le cadavre pour exemple trônant comme le symbole de la mort violente qui les attendait.

45. Prune

J. avait trouvé un livre dans sa bibliothèque. Il ne se souvenait pas d'où il provenait. Il devait l'avoir acheté avant de faire sa première expérience. Il avait acheté tout le matériel nécessaire avant la première expérience.

Ce livre parlait des bombes artisanales. Il datait d'une autre époque, sans doute. Un ouvrage comme celui-ci n'aurait jamais été publié à son époque.

Alors il se confectionna une bombe. Une petite bombe. Rien de bien méchant. Juste de quoi faire exploser quelqu'un. Cela lui prit toute une journée. Il était tellement occupé qu'il en oublia de manger. Ça lui arrivait souvent. Quand son génie se mettait en marche, rien ne pouvait le stopper.

Quand il eut finit, il prit un cobaye, lui installa le paquet sur le dos et le mit dehors, juste devant la maison. Puis il s'installa à sa fenêtre et appuya sur le bouton qui commandait sa bombe.

Un compteur donnait le reste du temps qui lui restait à vivre au cobaye. C'était un petit gadget qu'il avait rajouté. Cela donnait une allure dramatique à l'action.

Une minute. Cinquante-neuf secondes. Cinquante-huit secondes.

Aux premières secondes, le cobaye ne parut pas comprendre. Puis, son instinct lui dicta de faire quelques choses. Il tenta d'attraper le paquet sur son dos, mais J. lui dit que s'il y touchait, il exploserait. Alors il s'assit et se mit à pleurer. Il était dépité. Il le supplia une dernière fois.

Une dernière fois avant d'exploser.

Par reflexe, J. détourna son regard. C'était ainsi. Le corps est fait pour se protéger des attaques extérieures.

Quel avait été le dernier reflexe de l'homme ? Respirer un bon coup avant de se laisser emporter par la Mort.

Cinquante nuances de rouge [ANCIENNE VERSION]Where stories live. Discover now