03H27
Les murs sont criblés d’impacts. L’air pue la poudre et le sang frais. Le sol est jonché de débris, de balles vides et de silence tendu.
Millie a le souffle saccadé. Elle appuie sur son oreillette, essuyant de ses doigts couverts de cendres la sueur sur son front.
> — « Chloe ? Chloe, tu me reçois ? »
Pas de réponse. Juste du souffle lointain. Des parasites.
Jin, agenouillé à côté d’elle, vérifie sa lunette thermique. Pas de trace de leur amie. Il serre les mâchoires.
> — « Elle est où, putain… »
Et soudain, Konig s’avance d’un pas lourd. Il vient de descendre d’un toit d’observation, son fusil encore chaud dans le dos. Il n’a pas encore dit un mot, mais Millie le connaît trop bien. Elle le voit à la façon dont il bouge : trop raide, trop précis. Il a peur.
> — « Tu l’as localisée ? » demande-t-il, voix calme, presque trop.
Millie secoue la tête. Elle ne dit rien. Jin s’approche, lui tend une tablette avec une dernière coordonnée thermique captée deux minutes plus tôt. Un signal, court, isolé, dans une structure abandonnée au nord du périmètre.
Konig regarde à peine. Il attrape son casque, resserre les sangles. Et il part. D’un pas décidé. Trop décidé.
> — « Alex. » l’interpelle Millie, se redressant.
Il s’arrête. Juste assez longtemps pour entendre.
> — « Si elle meurt là-dedans, tu me perds aussi. »
Il hoche lentement la tête. Mais il ne peut pas répondre. Sa gorge est nouée. Il tourne les talons et disparaît dans la poussière noire.
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BÂTIMENT ABANDONNÉ – NIVEAU INFÉRIEUR – 03H42
L’obscurité est totale. L’odeur d’humidité se mêle à celle, plus ferreuse, du sang. Le sol est craquant sous les pas. À chaque couloir, chaque porte, chaque angle, Konig est prêt à tirer.
Et puis il l’entend.
Un toussotement.
Une plainte basse.
Une voix qu’il reconnaîtrait entre mille, même noyée dans le chaos.
> — « Chloe… »
Il s’approche, bras tendu, lampe torche tremblante. Elle est là. Adossée à un pilier. Sang sur la tempe, bras luxé, mais vivante.
Chloe relève à peine les yeux.
> — « J’allais t’engueuler pour le retard… »
Il tombe à genoux. Son gilet pare-balles claque contre le sol. Ses gants tremblent quand il effleure ses joues. Elle voit tout. Son masque ne cache pas la panique dans ses yeux. Elle murmure :
> — « Tu pleures ? »
> — « Non. »
Mensonge. Il serre les dents. Il la soulève, doucement. Chaque geste est un cri dans sa tête.
> — « J’ai cru que je t’avais perdue. »
> — « Je suis là. »
> — « Tu comprends pas… Je suis pas fait pour perdre. »
