— « Ce n'est pas ce que j'ai voulu sous-entendre », dis-je, désemparé.
— « J'ai bien compris... je plaisante. Pour en revenir à la question : vous qui êtes un pays pacifique, vivant en harmonie avec la nature, vous devez bien comprendre que si la balance penche trop d'un côté, ce n'est pas bon. » Ses paroles m'étonnaient et me rassuraient un peu. Il y avait donc un peu de bon sens chez les individus de leur contrée.
Comme s'il avait lu dans mes pensées, il répondit en plongeant un regard plus sérieux dans le mien :
— « Bien que la plupart de mes compatriotes ne soient pas du tout dans le même état d'esprit que moi. D'ailleurs, tu as eu de la chance que je te trouve, et pas "eux"... » Il tira une drôle de tête, comme s'il imaginait ma découverte par des tierces personnes. Je frissonnai.
Il continua :
— « Comparé à certains de mes semblables, j'aime bien observer et apprendre. » Je l'entendis à peine murmurer dans un souffle doux et triste : « De plus, de mes autres responsabilités... »
Après un silence pensif, il reprit plus enjoué :
— « Je n'ai pas envie de m'avancer sur mes dires, car je n'ai pas de preuve de ce que j'avance. Mais, après tout ce que j'ai vu, je commence à avoir ma petite idée sur ce qui a causé les dégâts dans ces hameaux. Les paysans de ces patelins étaient tous déjà malades et condamnés par la gangrène écarlate depuis un moment... L'eau et les sols étaient pollués, je l'ai constaté sur la fontaine à l'entrée du village. Ce qui est étrange, car la zone morte qui provoque cette maladie est quand même à plusieurs centaines de kilomètres d'ici. De plus il y a quelque chose qui cloche cela ressemble à la gangrène mais la souche semble...différente...comme si cela avait muté.»
Je déglutis bruyamment. Les sages de ma terre m'avaient parlé de cette maladie. Elle était, pour ainsi dire, incurable à l'état actuel. Une fois intoxiqué, c'était une mort lente et douloureuse assurée. Même la magie des plus puissants soigneurs n'avait pas réussi à en venir à bout. Beaucoup de migrants fuyaient les zones frontières par peur de l'attraper. Alors si en plus elle avait changé de forme cela s'annonçais alarmant.
Me regardant droit dans les yeux, Corïbis prit un ton grave :
— « J'ai l'impression qu'on essaye d'accélérer le processus de propagation et d'en profiter pour réaliser des expériences. »
Consterné, je lui demandai : « Tu as une idée de quel type ? » Je me doutais de la réponse, mais je voulais l'entendre de sa bouche.
— « Interdites, bien entendu ! » dit-il d'une voix enthousiaste, avec une lueur d'excitation dans le regard.
Excitation et enthousiasme... ? Pourquoi cela ne m'étonna pas, venant de lui...
— « C'est donc pour cela que tu te balades hors de tes frontières ? »
— « En partie. »
Je sentais que cette réponse ne valait même pas un dixième de l'explication, mais je m'en contentai pour l'instant. Je finirais bien par lui faire cracher la vérité un moment ou un autre. Le bruit d'une charrette au loin interrompit notre conversation. Cela annonçait enfin un peu de civilisation.
Le paysage avait bien changé depuis notre départ. Les zones dévastées avaient laissé place à des prairies et des champs remplis d'épeautre et d'orge perlé qui se balançaient au rythme de la brise. Myre gambadait joyeusement derrière nous, marquant des pauses de temps en temps lorsqu'un chant d'oiseau se faisait entendre. À l'affût, elle revenait au pas de course près de son maître quand elle ne trouvait rien dans son champ de vision.
YOU ARE READING
Whilem
FantasyUn monde où rôdent des créatures oubliées, où une maladie incurable consume lentement les âmes et les corps. Whilem, le royaume central, s'étend comme une ombre, engloutissant tout sur son passage. Dans les murmures des tavernes et les cauchemars de...
Chapitre 4
Start from the beginning
