Chapitre 35

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J'observe la même pierre depuis déjà plus d'une heure. Le jour commence lentement à se lever et j'ai préféré m'éloigner de quelques mètres du camp de fortune. Je me résigne à attraper cette pierre. Je la lève au-dessus de ma tête et m'apprête à l'écraser sur mon bracelet en priant pour ne pas rater mon coup. Je suis à quelques centimètres de me casser la main. J'abats alors la pierre sans pourtant réussir à y mettre toute ma force. Je ferme les yeux quand elle frappe le bracelet. J'ouvre lentement un œil puis l'autre pour constater que mon effort n'a eu aucun résultat. Je me remets en position pour réitérer l'expérience.

— Mais elle est complètement folle.

Un bras attrape le mien avant que je ne puisse écraser la pierre contre le métal à nouveau. La poigne se resserre. Je me retourne violemment pour découvrir Ezra en train de me dévisager. Sa main meurtrit mon poignet, je laisse tomber la pierre dans un bruit mat. Il décide enfin de me lâcher.

— Qu'est-ce que tu pensais faire avec ça ?

Il désigne la pierre d'un mouvement du menton. Je me relève pour qu'il ne me domine pas de sa taille.

— Donne-moi un couteau.

— Et pourquoi je ferais ça ?

— Parce que tu veux rentrer chez toi.

— Est-ce que c'est une métaphore que je ne comprends pas ? Tu comptes me trancher la gorge ?

— Quoi ?! j'écarquille les yeux. Aussi tentante que soit cette proposition, non. Je cherche juste à retirer ce bracelet.

— Ouais... il émet une petite pause. Alors je ne pense pas que ce soit pertinent, ni de te donner un couteau, ni que tu retrouves tes aptitudes. Donc c'est non.

— Qu'est-ce qui a changé entre hier et aujourd'hui ?

— J'ai discuté avec Éros.

Je lui offre une mine contrariée qui ne le fait pas réagir.

— Très bien, mais je retiendrais ton manque de discernement quand je te volerais tes armes en pleine nuit. Ne dors pas sur tes deux oreilles.

Il me regarde de haut en bas en fronçant les sourcils évaluant mon gabarit.

— C'est que tu ferais presque peur.

Éros siffle au loin et indique d'un geste à Ezra qu'il est temps de bouger. Anna-Livia est déjà collée au prince. Ezra m'invite d'un geste de la main à passer devant lui. Je surprends le regard que porte Éros sur nous, il fronce les sourcils, observe l'assassin et revient vers moi. Quand son regard croise le mien, il se détourne.



C'est amusant de voir à quel point ils m'ignorent tous. Anna rit à chaque phrase que prononce le prince en posant sa main sur son avant-bras, son biceps ou son épaule. Je ne peux que ruminer en silence. Pour me distraire, je tente vainement de faire apparaître n'importe quoi avec mes aptitudes. J'essaie de ressentir les frissons du pouvoir parcourir mes veines. Un vent vient me balayer les cheveux et l'espoir que ça vienne de moi m'étreint. Je stoppe tout ce que je faisais et le vent continue de me lécher le visage. Je baisse les bras avec défaitisme... Je poursuis tout de même mes efforts. Je place ma main gauche devant moi en essayant de faire apparaître une flamme qui ne vient pas. Je serre le poing après plusieurs minutes à m'acharner. J'en ai assez de ne pas réussir à utiliser mes aptitudes donc je passe aux dons faes. Je ne m'aventure pas dans la création d'un portail parce que je n'ai aucune envie de retomber dans le lac. Je me focalise sur un arbre devant nous, j'essaie de créer une illusion le faisant fleurir. Je l'observe. Il craque une fois. Puis une autre. Je me dis que c'est gagné, un petit sourire triomphant s'épanouit sur mon visage, mais au lieu de créer de jeunes pousses, il craque encore une fois et s'effondre. Le groupe se stoppe net et je me mords à l'intérieur des joues. Anna-Livia sursaute quand l'arbre touche le sol dans un bruit sourd et se colle au prince pour qu'il la protège.

Le Joyau de Nostraria, tome 3 : la naissance d'une légendeTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang