Prologue

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Pdv: Plume

« Ma peau devenait souvent violette sous les coups de papa ; chaque fois que ses mains entraient en collision avec moi, c'était pour redessiner ma peau en plusieurs teintes. Et je crois bien que ces marques représenteront son unique héritage. »

— Plume, tu m'entends, merde ?!

La voix stridente de mon frère mettait fin à la mélodie poétique qui résonnait en moi et me soufflait de jolis mots pour exprimer mes maux.

Mes doigts tachés d'encre barraient le mot *héritage*, trop lourd et heurtant, alors que c'est moi qui l'avais écrit.

Ma détresse remplaçait ce mot par cette phrase bien plus écorchante, mais plus significative. Au moins, je soulignais que je ne voulais pas être son jouet préféré, sur lequel il se défoulait simplement :

*Je ne supporte pas d'être le patrimoine de la violence de mon père.*

— Putain, détache-toi de ce carnet de merde ! Tu m'entends, ou quoi ?

Mes yeux, sûrement brouillés par des larmes indésirables, se tournaient vers le portrait craché de mon géniteur. Ses sourcils froncés par un quelconque énervement me terrifiaient. Chaque jour, je voyais la ressemblance avec lui devenir plus insoutenable.

— Sèche-moi ces larmes, putain, cette rentrée tu la feras. T'entends ?

Le ton acerbe qu'il employait exhibait son dégoût à mon égard, honteux d'avoir une sœur qui pleurait dès que ses émotions devenaient trop denses.

J'essayais tant bien que mal de réprimer mes sanglots, essuyant rapidement mes larmes, détournant le regard de mon réprobateur.

Mais l'infinité de ces gouttes faisait qu'elles reviendraient, jusqu'à ce que ma peine décide de faire une légère pause.

Et ces derniers temps, je vivais un véritable marathon.

Une course contre la montre, où l'aiguille était réglée par mon père, qui transformait le temps en véritable enfer. Cinq minutes passées sous ses coups rendaient l'éternité tangible, et la fin bien trop lointaine.

— Tu iras dans cette académie, que tu le veuilles ou non. Arrête d'écrire des mots sur ce carnet qui te font pleurer comme une conne et apprends à être, pour une fois... comme moi. Moi, je ne pleure pas pour rien.

Je ne savais pas être comme lui.

J'aurais aimé ressentir cette vérité, vouloir lui ressembler, mais j'échouais toujours.

Mes sentiments emprisonnaient mon progrès, si désiré par mon père. Alors pleurer devenait, malgré moi, l'échappatoire de ma tristesse. Les fibres de mon être refusaient de se conformer à ce que je n'étais pas.

Mon cœur ne voulait pas se rétrécir et céder à ce que le monde désirait pour moi. Il se brisait jour et nuit, mais jamais il ne s'éteignait sous l'affliction. Au contraire, les morceaux s'éparpillaient, écorchant mon âme meurtrie, mais ne disparaissaient... jamais.

— Promets-moi d'essayer au moins. Je dis ça pour ton bien, Plume. Il faut que tu changes, surtout que la rentrée approche.

*Il faut que je change.*

La lueur de haine dans le fond de ses yeux face à ma peine trahissait le ton calme qu'il adoptait.

Je voulais changer... mais essayer ne faisait qu'aggraver la fissure de mon fort intérieur, déjà en ruine.

Mon hypersensibilité ne se volatilisait pas ; elle détruisait tout sur son passage.

Malgré ça, l'espoir m'incitait à hocher la tête, promettant l'impossible.

Mafia academyWhere stories live. Discover now