J'ouvre de grands yeux.

— Le quoi ?

— Le tournoi interespèces.

Me voyant continuer à papillonner des yeux dans mon incompréhension, elle s'agace.

— Le tournoi interespèces. Le plus gros événement de la seconde moitié de la seconde. Enfin ! Il y avait tout un pataquès à ce sujet dans la brochure de présentation de l'institut !

Je lui adresse un sourire contrit.

— Je crois t'avoir déjà dit que je me suis contenté de regarder les images.

Et là, miracle, les lèvres de ma jumelle se mettent à frémir, comme si elle s'apprêtait à son tour à sourire. Mais elle se reprend bien vite et reprend son air fâché.

— Le tournoi interespèces a lieu chaque année au mois de juin. Tous les élèves de première année y participent par groupes composés de différentes espèces. Il y a une série d'épreuves à affronter. Remporter ce tournoi est très prestigieux.

Morgane adore la compétition. Cela ne me surprend donc pas que ce tournoi la mette dans tous ses états.

— D'accord, je lui réponds. Je m'entraînerai donc pour ce tournoi. Mais pas ce matin, je suis trop fatigué. On peut remettre ça à la rentrée ?

— Non.

C'est le genre de "non" qui ne prête à aucune discussion. Je me retrouve donc à m'habiller d'un jogging et d'un gros pull tandis que ma jumelle a juste daigné se retourner, seule concession faite à mon intimité.

— Tu as bien mis des vêtements troués, n'est-ce pas ? veut-elle s'assurer.

J'enfile mes chaussettes.

— Oui oui.

L'une des premières choses que Maman a faites, lorsque je suis rentré à la maison un peu avant Noël, a été de faire des tas de trous discrets dans plein de mes hauts, maintenant que j'avais enfin des ailes à en faire sortir. Elle n'a pas eu besoin d'en faire dans mon uniforme, puisque le tailleur s'en était déjà chargé par erreur.

"Mon petit garçon qui devient grand", a-t-il dit toute émue, en essuyant une larme.

Dehors, il pleuviote, ce qui ne fait rien pour arranger mon humeur.

Morgane se contente de hausser les épaules et d'enfiler les lunettes que je lui ai offertes. Au moins, elle ne les a pas jetées dans une poubelle. Peut-être est-elle finalement en train de me pardonner petit à petit.

— Il faut être prêt à voler sous tous les temps. J'ai déjà disputé une course sous un orage. Ça ne m'a pas empêché de gagner.

Je réprime un grognement.

— Je m'en souviens.

J'ai assisté à cette course, comme à pratiquement toutes les autres. Et je peux vous assurer que les gradins n'étaient pas plus couverts que la piste. Morgane a reçu une médaille et moi un rhume. J'ai passé trois jours au lit.

Je frissonne tandis que nous avançons vers les bois tout proches. Il ne fait vraiment pas très chaud. En plus, le jour n'a même pas fini de se lever. Le village est encore désert, ce qui n'est pas très étonnant, un matin de 25 décembre. Tout le monde doit encore dormir à poings fermés. Sauf moi, traîné de force dans la forêt sombre et humide par une fée hystérique qui m'en veut.

Nous nous arrêtons dans la clairière la plus proche. Je la connais bien pour avoir joué ici pendant des heures, lorsque j'étais enfant. A l'époque, j'étais cantonné au sol pendant que les autres volaient au-dessus de moi. Ce que je les enviais ! A présent, mon tour est enfin venu. Oui, c'est une bonne nouvelle. Je devrais me concentrer sur cela, plutôt que de ne penser qu'à mon oreiller bien douillet et à mon lit chaud que je voudrais n'avoir jamais quitté.

Le lycée des Surnaturels (tome 2)Where stories live. Discover now