Rencontre - Partie I

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-Era était simplement bonne à marier et à enfanter, résuma Myriam, l'air sombre.

-Oui, souffla Iris.

-Quel gâchis ! Élevée ici, elle aurait fait une guerrière redoutable, elle est agile et rapide, intelligente et brave.

-Tu la respectes, comprit Iris.

Iris était étonnée qu'une femme comme Myriam Devon complimente autant une Ivoirienne, comme ils aimaient les appeler.

-Cela va même au-delà du respect, répondit la Rubis. Et si toi et ton copain êtes encore en vie, Dolora, c'est seulement à cause de l'amour que nous lui portons tous ici, sache-le.

Oui, elle s'en était doutée. Era, malgré les mensonges autour de son identité, était encore sur toutes les lèvres en Nation d'Émeraude.

Myriam fit un bref de tête, signifiant que le cours était terminé. Les deux femmes posèrent leur épée et se dirigèrent vers le campement.

-Penses-tu qu'elle soit toujours en vie ? demanda finalement Myriam. Nous n'avons plus eu aucune nouvelle à Narda, nous sommes aveugles.

Iris avait eu beaucoup de temps pour réfléchir à la question.

-Je pense qu'elle est toujours en vie. À mon avis, Azel, Galaad et Ayaan l'aiment trop pour la faire mourir, aussi entêtée qu'elle soit. Ces trois hommes sont sa meilleure chance de survie.

-Aimer partout où elle va, souffla Myriam.

-Cela ne m'étonne pas d'elle.

La présence d'Era lui manquait énormément.

-Elle ne te pardonnera pas ta trahison, fit Myriam.

Elle n'était pas la première à lui dire, et certainement pas la dernière.

-Je sais.

-Est-ce pour cela que vous avez aidé le Roi Seth Sarkis ?

Cela faisait des semaines que le Roi Émeraude avait quitté le campement, laissant les reines du pays à son frère. Iris ne l'aurait jamais cru capable d'abandonner son peuple déjà en pleine guerre pour sauver Era. Il l'aimait, c'était plus que certain. Elle espérait pour lui qu'Era l'aimait tout autant. Mais rien n'était moins sûr avec son amie. Iris était persuadée qu'une partie d'elle était amoureuse d'Ayaan. Seul le temps dira jusqu'à quel point.

-Pour elle, et pour ma conscience, répondit la descendante des Dolora.

Elle frissonna en repensant aux sons des avions de guerre de la Tour qui fusaient vers Amidror. Elle se força à bloquer les images qui se formaient dans son esprit.

Myriam haussa un sourcil moqueur.

-Ainsi les Ivoiriens ont une conscience.

-Étonnant, n'est-ce pas ?

Elles arrivèrent presque au campement, avant de la quitter, la Rubis se tourna vers elle.

-Ton ami, Razane, tu ferais mieux de lui dire de s'y mettre vraiment, à son entrainement, au lieu d'écrire dans son maudit bouquin. Sinon, il ne vivra pas longtemps. Il est presque aussi délicat qu'Era.

Morgan n'était pas un guerrier, mais un poète. Iris savait qu'il était inutile de lui dire tout ça. Il s'en fichait éperdument. Mais elle hocha tout de même la tête à l'attention de la combattante.

-Era n'est pas délicate, dit-elle simplement, habituée à défendre son amie.

Myriam resta silencieuse quelques secondes.

-C'est vrai. Elle est faite de la même étoffe que les astres au-dessus de nos têtes. Elle a le cœur et l'esprit d'une guerrière, mais elle reste mortelle, et bien plus faible que la plupart d'entre nous. (Myriam la regarda de haut en bas.) Il se pourrait bien qu'un jour, tu sois amenée à donner ta vie pour elle, tu le sais, Dolora, n'est-ce pas ?

-Oui.

-Je n'aime pas votre peuple, je ne t'aime pas non plus. Mais tu es taillée comme une guerrière, de celles qui naissent En Bas, alors protège ton amie, si ce que tu dis est vrai et que tu l'aimes tant.

Avant qu'Iris ait pu répondre, Myriam lui avait déjà tourné le dos tandis qu'une autre femme venait à sa rencontre. Myriam la salua d'un bref hochement de tête.

La femme, qu'Iris avait déjà pu apercevoir dans le campement, s'appelait Violette. Elle avait de longs cheveux blancs, une peau plus pâle que les autres Émeraudes et des yeux d'un brun chaud. Elle souriait toujours, aimée de tous, on la disait venue tout droit de la Tour. Une femme née En Bas qui avait réussi à s'infiltrer parmi les Souffleurs de Rêve de la Tour et qui en était revenue. Elle ne l'avait que brièvement vu de loin, mais tout le monde parlait d'elle. Chacun chuchotait sur son passage. Elle ne saurait dire vraiment qu'elle était son rôle dans la hiérarchie Émeraude, mais il était certain qu'elle possédait un certain pouvoir.

Iris la jaugeait en silence, alors qu'elle venait tranquillement à sa rencontre. La femme, marquée comme aucune femme ne l'aurait jamais été dans la Tour, lui rappelait étrangement quelqu'un. Son visage qu'elle n'avait jamais vu d'aussi prêt était harmonieux, beaucoup trop beau pour une femme d'En Bas. Puis le regard d'iris se porta sur son nez droit, ses sourcils bien dessinés, ses pommettes...

Se pourrait-il que...

Iris se figea, tandis que la femme arrivait à elle.

-Iris, je suis heureuse de te revoir, dit-elle d'une voix chantante.

Elle la détailla calmement, un sourire doux aux lèvres.

-La dernière fois que je t'ai vu, tu n'avais que 10 ans, continua-t-elle.

Tout fit soudain sens dans son esprit. Ses yeux, dont Era lui avait tant parlé, ses mêmes pommettes finement ciselées, ce même regard brillant. Elle l'avait en effet rencontrée, sa mémoire lui faisait défaut, mais le physique de Violette lui rappelait...

-Maria, souffla Iris. Maria Eléazar.

Le sourire de la femme s'agrandit.

-Tu es devenue une femme forte et douée, si ce que Myriam dit de toi est vrai.

Comme Iris, elle portait une tenue de combat dans les tons kaki et bruns, à la mode Émeraude. Iris se demandait si tout comme les autres, Maria cachait des dagues cachées un peu partout sur son corps. Après tout, cela faisait plus de 8 ans qu'elle se terrait ici.

-Mais comment... Era...

-Era est au courant, lui expliqua Maria. Comme toi, elle m'a rapidement reconnue.

Les deux femmes se ressemblaient, mais seul quelqu'un ayant bien connu Era aurait pu voir les ressemblances dans le visage marqué de Maria.

-Era te ressemble beaucoup. Comment, questionna Iris... tu devrais être morte.

Maria lui expliqua alors rapidement comment Azel l'avait fait évader pour la protéger, et comment Siora Sarkis lui avait offert sa protection.

-Mais il n'y a ici qu'une partie de la vérité, fit mystérieusement Maria.

Elle prit la main de la jeune femme dans la sienne.

-Il y a trop longtemps que je garde tout ça pour moi. Et tu dois savoir, par les Créateurs, oui, il faut que tu saches, Iris Dolora. 

La Tour d'Ivoire - Tome 4Where stories live. Discover now