Néanmoins, je suis actrice, et je dois avouer que ce métier me convient parfaitement. En dehors des avantages évidents, jouer la comédie est excitant : se glisser dans la peau d'une autre, même l'espace de quelques heures, se révèle salvateur, comme un exutoire, et surtout, une véritable passion !

— Bon, du coup, on est en train de revoir le scénario, je vous le transmets dès qu'il est prêt, j'ai hâte de voir ce que ça va donner, mais je sens que les fans vont adorer nous détester ! On tourne les trois derniers épisodes de la saison dès la semaine prochaine, et le final sera diffusé dans trois mois. En attendant, vous deux, eh bien, continuez à faire le buzz. Sortez, faites-vous voir, jouez la bonne entente dans tous les cas, et les fans continueront à vous adorer ! Vous pouvez partir ! conclut le producteur d'un air satisfait.

Brian agite ses papiers devant nos yeux, histoire de bien nous faire comprendre de déguerpir. Je reste un instant sans réaction, avant de suivre Cameron vers le plateau.

— Il faut qu'on parle de ça, me dit-il tout bas.

— On verra ça plus tard !

Je rentre le soir plutôt anxieuse, mes mains tremblent légèrement lorsque je décroche mon téléphone, et je finis par triturer une mèche de cheveux avec laquelle je joue. Autant crever l'abcès de suite. La sonnerie résonne trois fois avant que mon petit ami décroche.

— Eden.

Son manque d'enthousiasme éteint le peu de courage que je possède. Alex était encore avec moi hier et a dû rentrer à Seattle ce matin.

— Tu as fait bon voyage ?

Je tente une conversation lambda pour tâter le terrain.

— Tu te fous de moi Eden ? J'arrive à peine chez moi et je découvre que toute la presse parle de votre « couple secret ». Alors qu'on était encore ensemble cette nuit !

— Redescends Alex, il n'y a rien entre Cameron et moi. Tu sais comme c'est facile d'inventer ce genre de conneries !

Ma voix gronde, s'intensifie, et me murmure que la dispute ne va pas tarder.

— Les photos sont plutôt convaincantes !

— Eh bien, les photos ont tort !

Selon moi, la confiance est la clé absolue dans un couple. Alors, j'avoue avoir du mal à comprendre pourquoi il ne me croit pas...

Je l'entends soupirer.

— Désolée Eden, ici, toute la presse en parle. C'est un peu... too much pour moi.

Les larmes me montent aux yeux, ma colère retombe comme un soufflet. Je ne sais pas quoi penser de ses réactions. Je me sens perdue, et déconnectée de notre couple. J'aimerais tant qu'il soit face à moi, qu'il me rassure et me serre dans ses bras protecteurs.

— Je veux que tu me rejoignes à Seattle...

— Je pourrais peut-être venir vendredi ?

— Définitivement, j'entends.

Je ricane par reflexe, mais il soupire une nouvelle fois, d'agacement.

— Alex, j'ai un contrat de deux ans, et tu le sais parfaitement.

Je suis à la fois sidérée et passablement énervée qu'il en arrive à de pareilles extrémités. Je me lève du canapé dans lequel j'étais confortablement installée, et commence à faire les cents pas dans la pièce.

— Fais-toi virer.

Il dit ça avec un tel aplomb que j'en ouvre la bouche, pour la refermer aussitôt.

— Tu auras d'autres opportunités, Eden ! poursuit-il. Enfin, toi et Cameron, vous êtes comme chien et chat ! Et puis merde ! Je ne veux pas le voir avec toi !

Ales a tort, je n'ai pas envie de quitter la série, je l'aime, j'aime l'ambiance, j'aime mes collègues – sauf un bien entendu – et plus que tout, j'aime ma vie à Vancouver ! Pour être tout à fait honnête, je connais aussi l'enjeu pour Cameron, et son histoire, puisqu'elle est également celle d'Hailey. Je me refuse à tout bousiller.

— C'est évidemment hors de question.

— La réponse a été rapide, et démontre à quel point mon avis t'importe !

— C'est mon boulot, ma passion !

— Et on voit où il nous mène. Je pense qu'on a besoin de prendre un peu de recul, Eden.

Mon cœur loupe un battement, je ne suis pas sûre de comprendre, ou plutôt, je ne veux pas comprendre.

— Qu'est-ce que tu racontes ? On ne va pas...

Mais Alex me coupe, impitoyable.

— Ça nous fera du bien à tous les deux, de faire une pause de quelques jours.

Ses mots sont comme du papier de verre. Tranchants, désagréables et... très irritants. Soudain, le ton de sa voix se métamorphose.

— Je suis désolée Ed, je t'aime, tu le sais. Mais ça me contrarie vraiment.

Sauf que ce n'est pas de ma faute...

Je tente de calmer le jeu.

— On a besoin d'une bonne nuit de sommeil. Je t'appelle demain ?

— D'accord. Bonne nuit, lâche-t-il du bout des lèvres, avant de raccrocher.

Je décide d'ignorer le petit pincement au cœur qui me comprime la poitrine et me convaincs que tout ira mieux demain. Après tout, ce n'est pas une petite photo à la con qui va ruiner mon couple !

Je jette un œil à l'horloge du salon, dont le tic tac lancinant m'horripile. Elle indique plus de 23 h et Hailey n'est toujours pas rentrée, alors qu'elle a cours demain. Je sens un sourire spontané pointer le bout de son nez. Il faut que j'arrête de la materner, la pauvre, entre moi et son frère, Hailey est surprotégée ! Je grimace en songeant à Cameron. Elle est l'amie parfaite, à un point négatif près : son frère, bien que j'envie presque leur lien, sacré, inaliénable. C'est le seul indice pour moi qui prouve que Cameron est un être humain, avant d'être un parfait connard !

J'attache mes cheveux, puis enfile mon top blanc et mon short pour dormir. À partir de maintenant, fini les conneries, me dis-je en baillant. La sonnette d'entrée retentit alors que je me brosse dents. Je me rince précipitamment la bouche, puis cours jusqu'à l'entrée. Hailey est étourdie et rêveuse, elle doit avoir oublié ses clés, comme à son habitude. J'ouvre alors la porte avec un grand sourire.... que je perds dans l'instant en découvrant Cameron. Ce crétin marque un temps d'arrêt et parcourt mon corps de son regard acéré. Je baisse moi-même la tête et j'imagine aussitôt ce qu'il doit penser. Je porte un top sexy qui se révèle être transparent aux endroits... inopportuns, et mon short est si court qu'il laisse deviner... tout un tas de choses. Est-ce qu'il me trouve sexy ? Je soupire devant cette question sortie de nulle part tandis qu'il me toise de haut en bas comme un prédateur, sans jamais revenir vers mes yeux.

À bout de patience, je choisis l'humour pour désamorcer cette tension devenue inconfortable et le frappe sur la poitrine :

— C'est ici que ça se passe ! lançé-je en lui montrant mes deux yeux. Tu es désespérant !

Je fais demi-tour et repars vers la cuisine, avant de plaquer mes deux mains sur mon postérieur comme si son regard pouvait me brûler.

— Hailey n'est pas là !

— Ce n'est pas elle que je viens voir, répond-il avant de se reprendre. Comment ça, Hailey n'est pas là ? Où est ce qu'elle est ?

Je sens mes yeux rouler dans leurs orbites, comme dans un cartoon.

— Laisse là respirer Williams !

Cameron la traite encore comme si c'était une adolescente qui découchait, et en un sens, Hailey réagit un peu de la sorte aussi. Je me tais avant d'en lâcher plus, son frère ne sait rien à propos de la relation entre Lane et Hailey, et ce n'est sûrement pas moi qui vais vendre la mèche, même si je trouve cette cachoterie complètement puérile !

— Tu ... tu ne veux pas t'habiller ? Sérieusement ! me demande-t-il en indiquant ma tenue de la main d'un air exaspéré.




Le rôle de ma vie...Where stories live. Discover now