Mambo Rouge - T01

Chapitre 03

— J'espère que tu es prête, Azaëlle, me dit Mère en me lançant un regard en coin alors qu'on remontait les couloirs menant vers la grande salle. Tu as préparé tout ce que je t'ai demandé ?

Je hochai la tête sans répondre. Une semaine et demie que je bossais comme une acharnée pour satisfaire sa curiosité. Une semaine que je me tapais des nuits courtes et des journées longues. Tout ça pour que j'assure une bonne partie de la réunion, devant tous ces hauts dirigeants aussi effrayants les uns que les autres. Incluant mon amant.

Je soupirai, lassée.

— Lève la tête et marche droite, jeune fille, me réprimanda Mère en me donnant un coup de canne sous le menton pour que je me replace comme il faut. Tu es la future Mambo, tu te dois de toujours garder le dos droit, même quand ça va mal. Et tu as aucune raison d'aller mal.

Je fronçai les sourcils en me frottant le menton. Putain, son coup de bâton, je l'avais senti vibrer dans tout mon corps ! Et je n'avais même pas le droit de me plaindre, au risque de m'en bouffer un deuxième plus fort.

En entrant dans la salle, je précédais Mère. Le son de sa matraque résonnait sur le sol de pierre froid. Son attention se posa aussitôt sur le Chef de Clans. Elle ne put retenir un son méprisant, trahissant son mécontentement. Et là encore, venait jouer l'esprit de contradiction de la Mambo.

Si Kaÿan était arrivé en retard, ou même ne s'était pas du tout pointé, elle se serait plainte de son effronterie. À présent qu'il était le premier arrivé à sa convocation, elle le trouvait insolent. Comment dire qu'elle n'était jamais satisfaite, peu importait la situation ?

Cela dit, alors que je reculai la chaise pour la Grande Prêtresse afin qu'elle s'asseye à l'opposé du loup, je ne pus que constater la deuxième garde du dirigeant. Derrière lui se tenait Marcus, son fidèle bras droit. Un démon sexy, si on aimait les grands Noirs bâtis comme des soldats. Et... cette chienne de Bianca – qu'il avait (pas du tout) bannie de son lit. Une fausse rousse vulgaire qui n'avait pour elle que son flair surdéveloppé. Même pour une louve de bas étage de son espèce.

Super ! Voilà que la jalousie me faisait parler comme Mère !

Je me retins de lui jeter un regard noir, irritée de son audace. Je me contentai de me tenir à la droite de ma génitrice, les bras derrière le dos, aussi frigide qu'un tronc d'arbre. Ce matin encore, alors qu'il me suppliait de rester à ses côtés, il m'assurait avoir repoussé cette connasse. Le voilà qu'il se pointait avec elle. D'ailleurs, à sentir le poids de son attention sur ma personne, il était certain que nous partagions le même avis nous concernant.

— Oh là là ! ricana la sorcière. Il fait un peu froid ici...

La porte de la salle s'ouvrit brusquement, coupant court à son besoin de semer la zizanie. Eliott, l'Alpha de la Louisiane, entra. Comme à son habitude, bien qu'il fût évident qu'il méprisait son Chef, tout en vouant une crainte extrême vis-à-vis de sa puissance, il courba l'échine devant Kaÿan, la main sur le cœur. Ce dernier ne dénia même pas répondre à sa salutation. Il préféra de loin rester dans sa pose nonchalante favorite, la joue collée sur son poing. Il dardait sur ma mère ses beaux yeux noirs, impassible.

Eliott fut suivi de près par Hector, le Seigneur des vampires. Couvert de la tête aux pieds comme une nonne, quand il entra, il ne put s'empêcher de pester en direction de la Prêtresse :

— Si tu voulais me tuer à coup de rayons de soleil... c'est raté, sorcière.

Hector était de ces prétentieux qui pensaient être si importants que tout le monde conspirait contre lui. Et d'une certaine manière, il n'avait pas complètement tort. Le coincé du cul qu'il était, faisait hérisser tous les poils de chaque personne qu'il croisait, ses fidèles suceurs inclus.