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pour tous ceux qui ne croient pas aux-âmes soeurs,

et pour tous les autres. avec tout mon espoir,





Le Soleil meurt lentement derrière la mer. Il n'en reste qu'un croissant visible depuis la plage. Le ciel, théâtre de ce funeste départ, a revêtit ses plus belles couleurs et les envoie, tels des soupirs rosés, sur l'eau qui ondule à ses pieds. Les vagues s'écrasent, fouettent le sol, étendent leur écume blanchâtre au loin, comme des mains qui s'accrochent une dernière fois avant de retrouver la mer... Et le vent souffle, entraînant le sable dans des danses effrénées. C'est comme un adieu au jour ; comme un salut respectueux à la nuit qui s'approche.

    Quelque part, entre les dunes et les châteaux de sable, résonnent des voix qui chantent. Les cordes des guitares se caressent et font s'élever leur mélodie. Tout est si doux, si paisible. Un soir d'été semblable à tant d'autres, mais dont la beauté ne cessera jamais d'émouvoir.

    Il est assis en tailleurs sur le sable et sourit. Les yeux rivés sur les musiciens, son corps se balance en rythme. Parfois, sa voix rejoint celles de ses compagnons, quelques secondes seulement, si doucement que même lui n'est pas sûr de s'entendre. Mais il se sent bien. Participant dans son silence à cette ambiance joyeusement tranquille. Il ne voudrait être nulle part ailleurs, en cet instant, que sur cette plage.

    Un feu s'élève en crépitant au centre du cercle et des acclamations l'accueillent.

Il ne fait pas encore noir, il ne fait plus tout à fait jour. C'est l'entre-deux, l'instant suspendu, le souffle retenu. La descente lente du Soleil sur la mer et les sourires qui brillent autour de la nouvelle source de lumière.

Il regarde autour de lui, puis lève le regard vers les cieux. Ses iris s'impriment des couleurs du ciel. Il sourit. Encore. Et se laisse tomber en arrière, couché sur le dos, les mains sur le torse, il ne bouge plus. Son cœur bat dans sa poitrine, il le sent contre ses paumes. S'il ferme les yeux, il peut imaginer l'entendre. C'est un tambour qui tremble, BOUM, BOUM, BOUM. Et chaque battement est un feu d'artifice. Il voudrait les sentir éclater entre ses doigts, voir les étoiles traverser le noir de ses paupières, sentir dans son corps l'instant où tout éclate, le tremblement de cette force explosive... mais ses yeux fermés ne lui offre que le noir.

    BOUM, BOUM, BOUM.

    Il sent qu'il va se passer quelque chose.

    Depuis qu'il est arrivé sur cette plage, depuis qu'il a posé ses pieds sur le sable, depuis qu'il a vu la mer, et le Soleil disparaître derrière elle. Il ressent en lui comme un appel, comme une voix qui le prévient.

    Mais il ne comprend pas ce qu'elle lui dit ; alors il attend. Immobile, les paupières closes, étendu sur le sable. Il attend ; écoutant les chants, les rires et la musique qui planent dans l'air autour de lui. Il attend, presque religieusement, certain que ce quelque chose va se produire.

    Et puis soudain le monde se tait.

    Un silence si énorme, si surprenant, que même son cœur dans sa poitrine semble s'arrêter.

    Et les vagues au loin ont cessé de crier sur le sol ; et les guitares ont immobilisé leurs cordes. Même le ciel s'est tu. Il ne reste que le bruit dans sa tête de cet appel qui résonne. Et il comprend enfin ce qu'il voulait lui dire :

Elle est là. Elle est là.

Mais qui ? pense-t-il. Qui est là ?

Elle est là. Elle est là.

Il ressent sa présence comme un coup entre les côtes et se redresse. Ses yeux s'ouvrent en grand et il la voit.

Elle est là. Elle est là.

Elle s'avance, et il la regarde. Le souffle coupé. Elle est si belle. Et elle brille. Comme un Soleil, comme une Lune. Elle scintille, il ne voit plus rien autour, le silence est toujours là, profond, pesant.

Et puis elle tourne la tête et leur regard se croisent.

Et son cœur hurle.

Son cœur explose.

Son cœur se décompose en un millier d'étoiles.

Apocalypse.

Et il voit dans ses yeux que son coeur aussi a explosé. Il en voit même les étoiles qui volent jusqu'à lui, qui l'enveloppent, qui le caressent, qui le réchauffent.

Elle ouvre la bouche. Il voudrait l'embrasser.

Elle s'avance d'un pas. Il voudrait l'enlacer.

Elle s'arrête net, hésite, le regarde toujours. Il voudrait lui faire l'amour, sentir son corps dans le sien, sentir sa peau, sentir sa bouche, entendre sa voix.

Puis une main jaillit du néant et tape son épaules, elle se détourne de lui. Le monde réapparaît.

Il reprend son souffle, suffoque, pose une main sur son cœur.

Que vient-il de se produire ? L'a-t-il imaginé ?

Mais non, elle est bien là, parlant avec quelqu'un qu'il ne connaît pas, lui offrant la vue de son profil. Il se relève tant bien que mal.

Elle tourne à nouveau les yeux vers lui.

BOUM. BOUM. BOUM.

Même plus besoin de se concentrer. Il l'entend à présent si nettement, son cœur qui bat dans sa poitrine.

Tu es là. Tu es là.

Ils se fixent en silence, sans respirer. Et puis il se détourne et s'élance vers la mer. Il sait qu'elle le suivra, il entend ses étoiles qui le suivent, juste dans son dos.

Il sait qu'elle le suivra, il la connaît si bien qu'il pourrait même l'entendre penser.

Ses pieds s'enfoncent dans l'eau, son corps se mélange aux vagues. Il plonge, le silence de la mer l'étreint une seconde puis il ressort à la surface. Elle est là. Le visage ruisselant, les yeux pétillants.

Il tente de dire quelque chose mais n'y parvient pas. Aucun mot ne s'échappe de ses lèvres. Il s'approche alors, elle le regarde sans rien dire.

Et puis il tend la main et effleure sa joue.

Tout explose à nouveau.

Elle se penche, accueille sa caresse, effleure ses doigts de ses longs cils noirs.

— Qui es-tu ? murmure-t-elle.

Il sourit, les larmes dévalent de ses yeux. Il ne sait d'où elles viennent, ni depuis quand elles sont là. Mais elles existent bel et bien, contentant les éclats de ses sentiments en pagaille.

— Qui es-tu ? répète-t-elle.

Elle lui sourit et éclate de rire. Et il rit avec elle. Leurs rires s'envolent, rejoignent le ciel.  Et puis leurs bouches se trouvent.

à finir !!

sous le soleil des âmes perdues (puis retrouvées)Where stories live. Discover now