La plongée - Chair de Poulpe

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— Comme vous le savez, tonnait une voix grave, accompagnée de l'écho d'un pas claudiquant, nous voguons vers l'Archipel aux Milles Yeux et nous lui arracherons son trésor. Cette nuit, grâce à de précieuses sources que je ne vous dévoilerai pas, j'ai compris comment nous déjouerons les pièges tendus par les sirènes. Un tribut doit leur être payé. Et rien de mieux que des perles pour attendrir ces êtres orgueilleux, même s'il ne sera pas chose aisée de s'en procurer. Cependant, ...

— Capitaine ! cria une seconde voix. Homme à la dérive !

Sous ma peau desséchée, la houle maltraitait mes entrailles à m'en donner la nausée.

— Encore ? Mais je suis en plein discours, là ! Lequel de cet équipage abruti a voulu jouer sur la planche, cette fois ? Elle est censée servir au « supplice de la planche » ! Le nom n'est-il pas assez explicite pour que vous compreniez qu'il ne s'agit pas d'un simple trampoline !

Il y avait une grosse tâche lumineuse au-dessus de moi. Ça aveuglait mes yeux et entrainait ma tête dans une valse boiteuse.

— Hors de question qu'on repioche à nouveau une bouseuse d'écrevisse étourdie ! ajouta la grosse voix qui semblait se rapprocher dangereusement.

J'aurais juré être entouré d'eau mais, si c'était le cas, pourquoi j'avais si soif ?

— Non, Capitaine ! Ce n'est pas un membre de l'équipage ! C'est un homme... Hein ?

Mes tentacules refusaient de m'obéir et de s'étendre vers les bords de mon radeau. Une gerbe d'eau les éclaboussa et je toussai. Pouah ! C'était pas de l'eau minérale...

— Un poulpe... ?

— Passe-moi ça ! coupa le capitaine.

Un bruit sourd martyrisa mes branchies.

— Mille millions de mille sabords ! Ce poulpe porte le même cache-œil et la même jambe de bois, si on peut appeler ça comme ça, que moi ! Qu'on le pêche et que ce salopiot de copieur affronte ma fureur !

Neurone A et neurone B se connectèrent enfin. Je parvins à comprendre qu'on parlait de moi. Maman m'avait appris ce que je devais faire dans ces moments-là.

— Sacrebleu ! Le poulpe est devenu bleu !

Zut, j'avais dû me tromper de couleur. Ça ressemblait à quoi un radeau déjà ?

— Tonnerre de feu ! Le voilà disparu ?

Ah ! J'étais peut-être tiré d'affaire...

— Attendez ! Non ! Si je penche un peu ma caboche sur le côté, je peux voir sa carcasse sur les trois planches en bois qui lui servent de rafiot. Pourquoi aucun de vous ne m'a encore ramené ce céphalopode écervelé ? C'est comme ça que vous pensez me prouver être digne d'un second ? En observant béatement les mouettes lâcher leurs fientes sur mon navire ? Diable ! Remuez un peu vos os avant que l'oxydation marine ne les rouille !

...ou pas. Un chaos insupportable m'emporta. Du bruit de partout. Je fus soulevé par un être malpoli qui manifesta un profond dégout à mon encontre. Si je n'avais pas été si desséché, j'aurais pris un malin plaisir à lui baver dessus.

— Alors, octopodidé poisseux ? On fait moins le malin maintenant ! Toi qui oses me copier, moi, Barbenfeu, qu'as-tu à dire pour ta défense ?

J'atterris brutalement sur un autre plancher de bois et entrouvris un œil pour jauger les alentours. Une armada de gens étranges m'entourait. Je préférai refermer ma paupière, ni vu ni connu, espérant que faire le mort me sauverait la mise. Je reçus un coup de pied mais demeurai inerte.

Naabot mo na ang dulo ng mga na-publish na parte.

⏰ Huling update: Feb 17 ⏰

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