Chapitre 46 - En un claquement de doigt

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— C'est rassurant de savoir que, finalement, le Grand Consul a su montrer un peu d'empathie pour ces malheureuses ! m'exclamé-je, pleine d'espoir.

— Il ne s'agit pas d'empathie, me coupe K. Il a juste jugé plus prudent de les garder en vie au cas où nous aurions besoin de plus de gamètes.

— Charmant, grogne Mei.

— Tu trouves ? s'étonne Jofen en fixant mon amie.

— Beaucoup de terriennes sont infertiles, déclare Sayan en ignorant son compagnon. Vous vous empoisonnez avec vos technologies d'un autre âge. Le Grand Consul en a pris conscience. En parlant de lui, il faut que nous vous disions quelque chose d'important le concernant.

— Que c'est un gros blaireau ? demande Mei d'un ton sarcastique. Mais on le sait déjà, ça !

— Euh, quelque chose de plus important encore.

— Est-ce que le mot blaireau à une signification particulière dans ce contexte ? demande Jofen, les yeux toujours rivés sur notre brune piquante.

— Oui, et ça me fait penser que je dois t'expliquer ce qu'est un suppositoire !

— Pitié, je ne veux pas entendre ça ! se lamente Sam. Pas avant de mourir.

Un petit hoquet de rire m'échappe, et je surprends un sourire franc sur le visage de Kalen.

— Je t'aime bien, Mei, fait Jofen. Je suis désolé de t'avoir causé de la peine.

— Merci, bégaie Mei. Je... j'aime bien votre compagnie à tous les trois. Même la tienne, Jofen. Je n'ai pas pris la mesure du poids que vous portiez, des pressions que vous subissiez. Je n'arrivais pas à vous comprendre, surtout toi. Tu me paraissais si froid, si inatteignable. Ne sachant pas comment me comporter avec toi, je me suis rendue imbuvable. C'est à moi de m'excuser. On aurait pu faire bouger les choses. C'est dommage.

— Ce n'est pas encore la fin, lui assure Jofen.

Il pose alors une main peu assurée sur l'épaule de Mei. Sayan l'encourage silencieusement, le regard rempli de bienveillance pour son compagnon. Nous vivons probablement nos dernières heures, et pourtant, aucun de nous ne cède à la panique. Au contraire, je sens une forme d'optimisme nous lier.

Nous marchons jusqu'à une sorte de navette orange en lévitation alors même qu'aucun moteur n'est visible, ni même de rail magnétique. Je suis abasourdie par cette prouesse technologique. Nous l'empruntons et après dix minutes, nous stoppons dans une partie du vaisseau aux murs turquoise. Encore deux couloirs à passer. La luminosité n'est ni agressive ni tamisée. L'absence totale de décoration me saute subitement aux yeux. Il n'y a rien, absolument rien qui puisse donner un peu de vie à ces lieux.

Notre escorte nous mène devant une porte noire. Cette dernière se met à coulisser vers le haut. Je glisse mes doigts dans ceux de Kalen. Il me regarde et m'adresse un regard encourageant tout en pressant ma main.

— Je t'aime, Kalen.

— Je t'aime, Lyna.

Nous avançons dans la pièce meublée d'une grande table en matière synthétique étrange. Son plateau semble être un ordinateur géant aux touches translucides disposées en cercles. Assis devant cet étrange objet, Je sens que Mei retient une réplique bien sentie et je me mords la lèvre pour m'empêcher de glousser. C'est officiel, nous sommes complètement folles. Le désespoir aura fini par nous griller les neurones. Le type se lève sans remarquer notre manège et sourit de toutes ses dents, comme pour rappeler le ton de son uniforme, mais ce rictus sonne faux. J'ai envie de lui en coller une. Je sens la main de Kalen serrer davantage la mienne.

Corps étrangers [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant