un bout de cette lettre de suicide

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Père ne m'aime pas pour l'enfant que je suis.

Je l'avais déjà glissé quelque part dans une pénombre compliquée où ma conscience n'était pas tranquille contrairement à la tienne. Déboussolé.e, je vis un jour de plus où je me sens obèse, me goinfrant d'un confort qui ne me conviendrait sûrement jamais. Je me dis des peut-être, des encore. Dans le doute, dans la peur. Je parle de toi père, de mère nuage aussi, d'une vie qui m'échappe, de douleurs que je ne sais pas apaiser. Je me questionne, je me supporte, je me détruis, je me maintiens en vie. Avec la peur de m'exprimer, la peur de ne pas plaire, la peur d'être moi, la peur d'exister, la peur de moi. J'oublie comment faire les choses. J'oublie comment aligner des mots pour extérioriser. J'oublie comment sourire. J'oublie comment tenir le cap quand l'orage tambourine à la porte de mes cauchemars.

Les lendemains avaient un goût amer de déjà-vu. Je pleurais. Oh Lilith que je pleurais. Ça en devenait contraignant et même anesthésiant. Etait-ce réel de continuer ses journées dans un piteux état, affaibli.e par le poids d'une agonie qui déchirait le peu de stabilité qu'il pouvait me rester ? Les beaux jours semblaient me rire au nez.

Les jours à suivre seront peut-être plus cléments. Non père, je ne souhaite pas mourir comme un chien. J'avais 18 ans et j'étais perdu.e. J'avais 18 ans et je m'effondrais tous les soirs parce que je ne savais plus comment m'y prendre pour respirer. J'avais 18 ans et tu avais fait plus que me tourner le dos. J'avais 18 ans, j'étais malade et tu as refusé que je me soigne en concluant cet épisode avec ton amour.

L'enfant batard n'a peut-être que ce qu'il mérite. Aîné.e qui n'a pas le droit de vivre un seul jour pour iel-même. Tout son monde subissait une rupture et iel devait rester droit.e, souriant.e, un.e exemple, éteindre ses émotions, exister pour un nom qui ne lui appartenait pas. Plus jamais, j'ai été cet enfant crédule qu'on connaissant pétillant.e. Etre un modèle, me priver, donner, ne pas broncher, acquiescer, refouler, écouter, obéir. Obéir. C'est ça. Je devais m'effacer pour obéir parce qu'on ne voulait pas de moi et que je n'allais jamais suffire. Me faire mourir de faim ne faisait pas l'affaire. Je prenais de la place et ce n'était pas convenable. Je peinais à rester debout père. Même mère nuage ne semblait pas s'inquiéter. Je me suis fait vomir, j'ai pris plus de médicaments qu'il en fallait, j'ai enfoncé des lames dans la peau aussi longtemps que je le pouvais, je me suis frappé.e, je me suis mordu.e. Je me suis supplié.e d'arrêter. J'aurai voulu que ça s'arrête.

A 15 ans, c'était une évidence.

A 18 ans, c'était la fin. Que pouvais-je me demander de plus ?

A 24 ans, qu'est-ce que je fais encore là ?

quelques notes amochéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant