Chapitre 10 - Avoir une araignée au plafond

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Je dois me ressaisir. Je déteste les selcyns pour ce qu'ils ont fait à Saïd et à Mei. Je déteste cette situation, coincée dans une chambre à ne rien pouvoir faire d'autre que de mater un type à poil. La fureur revient bien vite et je bous intérieurement. N'y tenant plus, j'appuie sur le petit bouton orangé qui se situe à côté de l'écran affichant mon ennemi. L'effet est immédiat. Le type se redresse (je jurerai que ses cheveux ont poussé), tapote sa machine, remet son caleçon et son pantalon et détale sans prendre la peine de remettre son haut ni ses chaussures. Mince, je suis presque sûre qu'il va débarquer ici. Vite, je dois trouver un truc pour me défendre. Je cherche une potentielle arme, mais à part le verre et le plateau, rien ne me paraît pouvoir faire le moindre dégât. Il me restera mes poings, si besoin. Je me fige devant la porte et attends, le corps tendu, prêt à combattre. Tic, tac. Je me suis peut-être trompée, le départ du type n'a peut-être rien à voir avec moi. Je m'apprête à me relâcher au moment où un léger déclic me parvient. La paroi blanche coulisse vers le haut dans un bruit de frottement, faisant apparaître les pieds nus de mon hôte, son pantalon noir, ses abdominaux bien dessinés, ses pectoraux... je ferme les yeux une microseconde et jette de toutes mes forces le verre sur la tête de l'alien. Il le rattrape d'un geste trop vif pour être humain. Je renouvelle avec le plateau, mais là encore, mon ennemi parvient à s'en saisir au vol. Je pousse un cri et cours sur lui, prête à frapper. Il contre mon premier coup, ainsi que les suivants et finit par attraper mon mollet lors de ma vaine tentative de coup de pied. Je le toise avec hargne. Son visage est calme, il me regarde avec une pointe de curiosité. Je suis encore plus énervée et tente de me débattre. Il me lâche : je m'écroule comme une crotte. Toujours à terre, je recule vivement en l'observant, prête à l'insulter. Mais un détail attire mon regard. La tache noire sur sa clavicule. Un reste de tatouage, le haut d'une tête de félin.

— K ? m'entends-je demander.

— Bonjour Docteur Lyna Ferrat, fait l'homme d'une voix atone. Je suis , chef de la première division du Grand Consul. Je vous souhaite la bienvenue à bord de mon vaisseau : Cassy-3.

— Impossible, bégayé-je. Et... votre charabia n'a ni queue ni tête !

— Les mots ne sont que des mots, me dit-il en fronçant légèrement les sourcils. Pourquoi auraient-ils des queues et des têtes ?

— Hein ?

Mais qu'est-ce qu'il me raconte ? Je me relève sans le lâcher des yeux. Difficile de reconnaître mon patient. Sa peau est totalement guérie et ne porte plus aucune trace des brûlures, elle est même parfaitement lisse, si bien que je refoule l'envie de la toucher. Ses cils et ses sourcils ont repoussé, ainsi qu'une petite toison sur son torse. Même ses cheveux sont revenus de manière uniforme sur son crâne, et atteignent une longueur de deux ou trois centimètres. Je plonge dans ses iris noisette. Ce regard, oui, je le reconnais. Il reflète à la fois une grande vivacité d'esprit et une absence quasi totale d'émotions.

— Vous n'avez aucune séquelle ? demandé-je.

— Non, mon système immunitaire combiné à une session hebdomadaire de flaster, notre appareil de soin, a suffi à me rétablir. Je garde une sensibilité sur certaines zones comme les aisselles, l'arrière des genoux et les testicules.

Je rêve où il me parle de ses testicules sans ciller ? Je suis médecin, mais quand même. Je prends une grande inspiration et m'approche d'un pas.

— Je peux regarder ?

— Si vous voulez, me dit-il en commençant à baisser son pantalon.

— Eh, mais vous faites quoi ! Gardez vos vêtements, je me contenterai des aisselles pour aujourd'hui !

Corps étrangers [TERMINÉ] Where stories live. Discover now